L'année 2017 est une année qui restera probablement gravée dans l'Histoire de la Tunisie. Ce sera une année difficile sur tous les plans, particulièrement économique. Comme l'a dit et répété notre chef du gouvernement, Youssef Chahed, la situation est extrêmement alarmante et il faudra faire des sacrifices. Il est vrai que le chef du gouvernement d'union nationale s'est montré extrêmement alarmiste quant à la situation qu'il a trouvé en arrivant à la Kasbah. Il a dressé un tableau noir…qu'on connaissait déjà.
Le diagnostic, la situation actuelle, sont connus de presque de tout le monde, d'un côté. Mais surtout, chaque chef du gouvernement qui est venu prendre ses fonctions a déclaré la même chose : la situation est catastrophique, la conjoncture est difficile, faites des efforts, il faudra des sacrifices etc. Et après, il ne se passe rien ou presque. Les gens en ont marre de ce discours alarmiste sans profondeur et sans solutions concrètes pour des problèmes bien identifiés. Les gens ne donnent plus aucun crédit à celui qui vient leur décrire une catastrophe à leurs portes et qui se met à leur niveau pour se lamenter et pour « sensibiliser ». Les gens sont conscients que tout va mal, ils le vivent tous les jours, ils le constatent tous les jours et surtout, ce sont les premiers à le subir, tous les jours.
Le plus grave dans cette situation est que la rengaine du sacrifice ne marche plus. On ne peut pas toujours demander aux mêmes personnes de faire des sacrifices. Un père de famille classique a subi, cette année, les dépenses de Ramadan, ensuite de l'Aïd, ensuite celles des vacances d'été, puis l'autre aïd avec la rentrée. Il se prend de l'inflation dans les dents chaque jour et n'arrive plus à joindre les deux bouts puisque la classe moyenne se mue chaque jour en classe pauvre. De l'autre côté, s'il suit un peu les informations, il constatera qu'il suffit de couper des routes pour obtenir des postes de travail, qu'il suffit de menacer d'une grève pour être augmenté, qu'il est en fait plus avantageux de travailler dans l'informel que de subir de plein fouet la retenue à la source. En 2017, les prélèvements obligatoires risquent d'augmenter et ce même père de famille risque de se trouver avec une augmentation de 25% de la vignette de sa petite 4 chevaux, avec une augmentation du prix de l'électricité et j'en passe, au nom du sacrosaint patriotisme et esprit du devoir.
Ces notions, même abstraites dans une certaine mesure, ne sont pas étrangères aux Tunisiens. L'idée de faire un effort collectif pour sauver la nation est une idée qui peut rassembler et créer le consensus. Seulement, une condition doit être respectée : tout le monde doit s'y mettre ! Et c'est là où le bât blesse et où le Tunisien perd confiance et estime qu'il est floué. Il estime que l'effort n'est pas réparti de manière égale et que c'est le salarié, victime de la retenue à la source, qui paye le prix fort. Et malheureusement, il n'a pas tout à fait tort. Il existe des aberrations en Tunisie actuellement. Comment convaincre ce père de famille de payer encore plus à l'Etat quand il sait par exemple qu'un médecin ayant son propre cabinet paye moins d'impôt qu'un médecin de la fonction publique ? Comment le convaincre de payer plus alors qu'un avocat, par exemple, peut construire un immeuble et le louer sans payer quoi que ce soit ? Comment le convaincre quand il sait qu'il existe des milliers de personnes qui travaillent dans l'informel qui ne paient rien du tout ? Comment le convaincre quand il sait que les plus gros contrebandiers blanchissent leur argent dans l'immobilier au vu et au su de tout le monde ? Le plus gros des challenges en 2017 sera celui de rétablir la confiance et de montrer à la population que tout le monde est, réellement, concerné. Il faudra le montrer par les faits et non par les discours. Les gens en ont marre des discours…