Par Mahmoud LARNAOUT La situation économique et sociale est sérieuse, pour ne pas dire alarmante : Chômage intolérable, baisse vertigineuse du tourisme, balance des paiements négative, fermetures d'entreprises, sit-in, grèves légales et sauvages, exactions, barrages des routes, incendies des édifices publiques, demandes excessives et immédiates d'augmentation de salaires etc... Le budget de l'Etat va, lui aussi, être fortement dans le rouge avec un déficit prévu de -6% pour l'année 2012 que nous devons équilibrer par le recours aux crédits pour financer, en fait non pas des investissements, mais de la consommation, ce qui est grave. C'est d'autant plus grave que les crédits étrangers sont chers et difficiles à obtenir, en raison de la mauvaise notation du risque de notre pays par les Agences internationales d'évaluation, résultant de l'instabilité, du manque de sécurité et des troubles sociaux qui traversent la Tunisie depuis l'avènement de la Révolution. Ceci handicapera l'avenir, s'il se perpétue. Dans le même temps, nos principaux partenaires européens entrent, présentement, dans une crise comparée par les spécialistes à celle de 1929; cette crise en dissuadera plus d'un à faire du tourisme ou de l'investissement en Tunisie. Malgré ce tableau noir, et peut-être à cause de lui, nous avons la possibilité, si nous le voulons, de nous en sortir par le haut, à condition de dire la vérité et de convaincre nos citoyens de la gravité réelle de notre état et de la nécessité pour nous tous de faire des efforts pour relever le défi. La solution consisterait, à notre avis, à recourir à la solidarité populaire qui prendrait la forme suivante : - Lancement d'un emprunt national décennal dont il conviendrait de fixer le montant et les conditions. Nous l'avons déjà fait avec succès dans une des périodes du régime de Bourguiba. - Prélèvement auprès des salariés et des entreprises, au delà d'un minimum à définir, d'une contribution exceptionnelle progressive en fonction des revenus et pour une période à déterminer et qui irait directement dans le budget de l'Etat sans passer par des caisses plus ou moins contrôlées. - Un nouvel impôt sur la fortune Cette approche est l'une des voies possibles de salut et de responsabilisation qui pourrait avoir le mérite de resserrer les liens sociaux entre les différentes couches de la nation et de gommer les écarts inacceptables entre les régions et les personnes et nous éviter de passer par les fourches caudines des crédits extérieurs. D'autre part, et même si nous aggravons quelque peu le déficit du budget prévu pour répondre aux énormes besoins des familles nécessiteuses qui se noient dans la pauvreté et dans la précarité et pour lever l'angoisse et le désespoir des chômeurs, en octroyant un revenu familial minimum et décent, nous aurons prouvé au monde qui nous scrute que nous sommes en mesure de nous prendre en charge et de dépasser nos difficultés; ceci nous vaudra plus d'indépendance et plus de considération de la part des nations et surtout plus de confiance en application de l'adage « Aide toi, le ciel t'aidera». En plus, cette approche pourrait avoir, en accord avec les partenaires sociaux, un effet bénéfique sur la paix sociale, ôh combien nécessaire, pour bâtir un plan de développement et laisser s'épanouir nos potentialités dans tous les domaines Il ne tient qu'à nous pour nous sortir de l'oeil du cyclone. Mesdames et Messieurs du nouveau gouvernement, ayez le courage politique de dire les vérités de notre réalité économique et sociale au peuple en langage cru et clair et des efforts et des sacrifices qu'il doit consentir dans la solidarité pour sortir de l'anse de la bouteille; car l'autre solution d'emprunter à l'étranger à des taux prohibitifs ne peut que grever l'avenir de nos enfants et enchaîner notre libre arbitre et notre souveraineté.