Par M'hamed JAïBI Le débat autour de la loi de finances, entre le gouvernement et les partenaires sociaux, s'est terminé en queue de poisson, faute de moyens. Mais une nouvelle approche s'est imposée aux parties en négociations, c'est la résolution unanime d'aller désormais vers un «partage équitable des sacrifices». Un compromis non signé De sorte que la nouvelle loi de finances s'avère être un compromis non signé à l'initiative du gouvernement Chahed, appelé à engager l'Ugtt et l'Utica. Les deux grandes centrales socioprofessionnelles, d'habitude opposées, revendiquent solidairement une refonte de la fiscalité qui sache intégrer dans le système aussi bien l'ensemble de l'économie parallèle que la masse des fraudeurs et récalcitrants de l'«évasion fiscale». Celle-ci porte sur des sommes fabuleuses impossibles à quantifier puisqu'elles échappent aux législations fiscale, douanière et économique actuelles. L'engagement du gouvernement Ce qui est nouveau dans notre pays, c'est que le gouvernement d'union nationale reconnaît l'ampleur de cette défaillance et reprend à son compte l'objectif de la refonte, sur la base d'une quête solennelle de l'«équité fiscale et sociale» qu'il s'engage à mener à terme en s'en donnant les moyens à l'avenir. En attendant de se donner les moyens de cette refonte essentielle, le gouvernement a tenu bon sur les propositions de Youssef Chahed faites à l'Utica et à l'Ugtt, lesquelles accordent un bon répit aux finances publiques. Mais, alors que la centrale patronale a fini par accepter la taxe additionnelle de 7,5%, le gouvernement a dû, pour convaincre l'Ugtt, renoncer à la majoration de la TVA et ramener à une seule année le gel des salaires au cas où la croissance du Pib atteindrait les 3% en 2017. Les conditions de «l'union nationale» Le gouvernement d'union nationale y est pour quelque chose. L'initiative présidentielle n'est pas étrangère à la souplesse du langage chez les syndicalistes et à la détermination du gouvernement de faire valoir le consensus élargi qui l'a vu naître. Il ne s'agissait donc pas simplement de faire passer une loi de finances rafistolée qui puisse donner du répondant au budget de l'Etat, mais d'asseoir avec les moyens du bord les conditions d'une visualisation du projet d'«union nationale» et de ses perspectives de cohésion sociale, de prospérité partagée et de développement équilibré dans toutes les régions du pays. Un pari risqué sur l'avenir De par cette démarche, le gouvernement Chahed consolide ses assises politiques et sa base sociale. Et les divers ralliements de personnalités et de groupes de divers bords au volontarisme affiché par l'équipe gouvernementale, à l'image de Néjib Chebbi, de Omar S'habou, de Mustapha Kamel Nabli, d'une partie du Watad et de certaines sensibilités syndicales, est, sans doute, le signe que le pari sur l'avenir esquissé par Youssef Chahed trouve quelque écho. Il s'agit cependant d'un pari qui restera risqué tant qu'il n'aura pas identifié les moyens de son engagement : contrôler l'économie parallèle, élargir substantiellement l'assiette fiscale, rehausser l'autorité de l'Etat et battre en brèche la corruption.