Par Abdelhamid GMATI Il se passe des choses peu reluisantes et graves dans nos établissements scolaires sans que cela inquiète beaucoup de monde. Un rappel des événements au cours de ce mois d'octobre: — « Un élève du centre de formation professionnelle de Siliana a poignardé, jeudi dernier, son enseignante, avant de fuir. L'enseignante avait alerté, le matin même, la direction du centre sur le mauvais comportement de l'adolescent, qui a été convoqué par l'administration et a signé un engagement à changer de comportement. Mais avant de retourner en classe, pour la 2e séance de la journée, il a demandé à parler à l'enseignante, qui a refusé et lui a demandé de quitter la classe. C'est alors qu'il sortit un couteau et la poignarda à l'abdomen au niveau du rein, avant de prendre la fuite ». — Toujours jeudi dernier, un mandat de dépôt a été émis à l'encontre d'un directeur d'une école primaire à Bargou, dans le gouvernorat de Siliana, qui aurait harcelé sexuellement une élève de 11 ans. La petite fille avait raconté à son père ce qui lui était arrivé. Ce dernier a, donc, porté plainte auprès du poste de police de la région. Après diverses confrontations, il s'est avéré que le directeur n'en était pas à sa première action du genre. Il a été arrêté. — Le 6 octobre dernier, un rassemblement de soutien en faveur d'un surveillant agressé par un élève a eu lieu au collège 23 Janvier à Béni Khalled (gouvernorat de Nabeul). L'élève a asséné un coup de poing au surveillant qui lui demandait d'enlever sa casquette. Le cadre éducatif du collège était scandalisé par ce comportement. — Toujours le 6 octobre dernier, des parents d'élèves ont porté plainte contre une enseignante de français au collège Barnoussa au Kef, qui avait rasé les cheveux de quatre élèves issus de familles démunies. Les élèves ont été moqués par leurs camarades. Un des parents a contacté le délégué régional à l'éducation au Kef, mais ce dernier n'a pas réagi, et s'est contenté d'inviter les parents à trouver une solution au problème. La délégation de protection de l'enfance a ouvert une enquête en apprenant les faits et une plainte auprès de la justice a été déposée. Des sources fiables rapportent que plus de 100 cas d'agression verbale et physique sont commis quotidiennement dans les écoles tunisiennes. On dénombre également 9.727 cas d'agression au cours du premier trimestre de l'année scolaire 2015/2016. Le ministère de l'Education a déposé 1.100 plaintes auprès des autorités judiciaires tunisiennes, suite à l'enregistrement d'agressions qui ont été commises par des élèves contre des enseignants et dans les établissements éducatifs. Ce phénomène de la violence en milieu scolaire date de plusieurs années. On rappellera qu'en novembre 2007, et « dans le cadre de sa coopération avec le ministère de l'Education et de la Formation, le bureau de l'Unicef à Tunis a organisé une visite d'étude en France (Centre international d'études pédagogiques – Ciep) et en Belgique (Bureau d'ingénierie en éducation et en formation – Bief) au profit de 9 responsables du ministère sur les questions de « la médiation scolaire, la gestion des incivilités, de la violence en contexte scolaire et l'éducation à la citoyenneté », du 5 au 10 novembre 2007. La visite d'étude a pour objectif de permettre au groupe de prendre connaissance de l'expérience française et belge en matière de prise en charge de la violence en milieu scolaire (les différents programmes et initiatives) et de promotion de l'éducation à la citoyenneté ». De plus, cette violence chez les jeunes et les moins jeunes n'est pas propre à la Tunisie. Elle s'est manifestée en France, en Belgique, au Maroc et ailleurs. Aux Etats-Unis, un film de 1955 devenu célèbre, « Graine de violence », traite de cette violence chez les adolescents dans l'enceinte scolaire. D'où vient cette violence et quelles en sont les causes? On pointe du doigt le milieu familial qui, s'il comporte de la violence aura un impact sur le jeune.. Il y a aussi la rue et les mauvaises fréquentations. Les médias, surtout audiovisuels, ainsi que les sites sociaux qui, souvent, présentent la violence comme solution aux problèmes. Et puis, il y a les facteurs internes de l'établissement scolaire (nombre d'élèves, conditions de travail), surveillants et enseignants violents. En Tunisie, les responsables du secteur en sont conscients depuis des années. Les mesures préconisées, outre les mesures disciplinaires et pédagogiques, visent surtout la prévention, la sensibilisation des parents, la formation des enseignants à encadrer les élèves. En définitive, « si l'on veut une école de qualité, il faut mettre les moyens à l'intérieur des classes, notamment au niveau de la formation des enseignants ».