«En tant qu'avant buteur, vous devez ennuyer et distraire les défenseurs adverses». Qui mieux que Khaled Touati pour apprécier l'évolution globale des attaquants en Tunisie, leur disposition et autre tendance au «mutisme» depuis quelques années déjà: «A mon époque, un attaquant devait marquer des buts autant qu'apporter son concours offensif. J'ai été sacré meilleur buteur du CA en championnat lors des saisons 1984-1985, 1987-1988 et 1988-1989. Cette année-là, en 1989, j'ai inscrit quatorze buts. Marquer, c'est se placer correctement, savoir se déplacer sur le terrain, sentir le jeu, ne pas se tromper de tempo et anticiper le geste de vos coéquipiers. Exemple, je savais pertinemment où Lotfi Mhaïssi allait placer le ballon. Je m'élevais en conséquence via un timing juste et précis. Ce qui est important en football, c'est la façon de créer des occasions de but. Afin de devenir un bon buteur, vous avez impérativement besoin de plusieurs éléments dans votre jeu. Une grande responsabilité est souvent un atout pour les attaquants. Il faut être prêt à améliorer son jeu en tant qu'attaquant. Un buteur, ce n'est pas seulement un rush ou un déboulé gagnant. Il faut sans cesse travailler sa panoplie. Savoir caresser le cuir s'apprend. C'est votre sensation pour le ballon et votre capacité à le contrôler rapidement, dès la première touche, qui s'avèrent parfois payants. C'est essentiel pour avancer. Avant de commencer à travailler sur les autres aspects du jeu, vous devez avant tout avoir une première touche excellente. Tirer continuellement contre un mur et contrôler le ballon, c'est utile pour un avant. Un attaquant doit aussi avoir des idéaux. Cela se travaille dans la tête. Il faut être le plus créatif possible. La créativité est le centre du jeu d'un attaquant. Pour être plus créatif et efficace, vous devez être constamment en mouvement par rapport à vos coéquipiers. Bien entendu, tout cela englobe le cursus proposé par les entraîneurs. Ces derniers optent de plus en plus pour les plans de jeu rigides tels que le bloc, le marquage, le balayage, l'écran, le ratissage-quadrillage. On ne parle que de consignes et on oublie le génie, la prise d'initiative et le plaisir. Le don de buteur est par essence inné. C'est un pléonasme mais certaines choses ne s'apprennent pas. Pour le reste, il y a les répétitions, l'aérobie, l'amélioration de la condition physique et la recherche de la fraîcheur. Exemple, un buteur doit sans cesse améliorer sa vitesse, sa force et son agilité. En tant que buteur, il est crucial d'être en mouvement dans plusieurs directions. En tant que buteur, vous devez ennuyer et distraire les défenseurs adverses. Zigzags La prochaine fois que vous disputerez un match et que vous serez dos au but, essayez de courir en décrivant des cercles autour des défenseurs avant d'effectuer un sprint ou vérifiez vos alentours avant de recevoir le ballon et le garder. Cela fait partie des ficelles du métier. Car vous avez toujours l'avantage si vous bougez constamment. Vous défaire du marquage est essentiel. La règle numéro un est de ne pas courir dans une direction, mais de faire des zigzags. Ceci vous permettra également d'éviter les meilleurs pièges de hors-jeu. Autre donne primordiale pour un attaquant, le tir. Il faut s'entraîner à effectuer des tirs. Le tir est la compétence la plus importante d'un buteur. La technique de tir est un art précis. Il faut répéter le geste jusqu'à atteindre la précision. C'est la formation de base. Essayez de faire en sorte que vos tirs planent au-dessus du sol avec pleine puissance et précision. Les erreurs les plus fréquentes sont de balancer la jambe un peu trop, se pencher en arrière et ne pas regarder le ballon. Ne soyez pas dupe, les lucarnes et les coups francs enveloppés sont esthétiques, cependant les meilleurs attaquants préfèrent envoyer le ballon à pleine puissance à ras de terre. Les tirs de tête sont complètement différents. Quand vous recevez un centre de quelqu'un, n'ayez pas peur. Cela fait mal si vous hésitez, laissez donc le ballon frapper votre tête. Regardez fermement le ballon, ne pas fermer les yeux, passer sa tête devant et laisser son corps en arrière. Vous contrôlerez ainsi la destination du ballon. Il ne faut pas laisser celui-ci rebondir sur soi. En football, la finition est un art. Dans des situations, on doit juste éliminer le gardien ou réaliser une passe précise, il faut avoir un esprit vif et du sang-froid. Dans ces situations, la plupart des buteurs essayent d'effectuer un tir où il est fort probable de marquer un but en «glissant» ou en «plaçant» le ballon dans les filets. Pour y arriver à terme, l'entraînement pratique est essentiel. Les bonnes touches de ballon sont également primordiales. Voilà la panoplie pratique et théorique de l'attaquant racé. Vous savez, le football est un spectacle. Si l'on privilégie une orientation compacte via un bloc hermétique avant tout, on sécurise ses bases mais on laisse l'initiative du jeu à l'adversaire. Il faut avoir du courage et placer l'attaque au cœur du jeu. Ce qui n'est plus le cas de nos jours. Regardez les meilleurs produits tunisiens de la dernière décennie. Que des pivots et des défenseurs. Où sont les attaquants de la trempe de Jamel Limam, Adel Sellimi, Zied Jaziri, Faouzi Rouissi, Houarbi, Rakbaoui, etc. A l'exception de Hamdi Harbaoui et Youssef Msakni, je ne vois personne...»