Son but face au Mexique restera dans les annales. Très recherchés dans le football moderne, les latéraux volants, ou axiaux avancés, font de plus en plus le bonheur de leurs écuries respectives. Capables d'apporter leur concours offensif et de se montrer décisifs, ils apparaissent comme des éléments importants dans les dispositifs de jeu. Et pas seulement pour sécuriser ou bétonner. Ali Kaâbi, l'ex-international de l'âge d'or du football tunisien, en sait forcément quelque chose. Que ce soit sous la bannière cotiste ou en sélection, ce solide et longiligne arrière central (reconverti par la suite en technicien) en connaît un rayon sur les défenseurs-buteurs. Il nous en parle avec minutie: «Un bon arrière doit forcément travailler son jeu de tête jusqu'à atteindre le but, la cible (renvoyer le ballon ou le loger dans les filets). Il s'agit de répéter le même geste à l'entraînement jusqu'à atteindre la perfection. Car c'est une arme redoutable en compétition. Cela dit, ce n'est qu'un aspect de la panoplie dont doit disposer un défenseur dit moderne et complet. Il doit aussi avoir le réflexe d'apporter le surnombre dans la surface adverse pour apporter sa contribution aux statistiques offensives de l'équipe. Est-ce inné ? Non, c'est une question d'apprentissage et de caractère à forger dès les premières classe. Débouler, impressionner le vis-à-vis quand on arrive lancé dans la surface adverse tel un colosse, c'est le «béaba» du sport-roi. Un défenseur, autant qu'un attaquant, doit être particulièrement attiré vers l'offensive. Il doit être aimanté par l'attaque et les filets adverses. Monter, descendre, dédoubler, piquer vers l'axe, contourner... C'est à ce prix qu'il va acquérir des notions offensives et un don de buteur. Un défenseur qui se respecte fait rarement le voyage pour rien (longue chevauchées). Lorsqu'il décide de s'engouffrer dans son couloir à titre d'exemple, c'est pour maximiser les chances offensives des siens. Quand un technicien prône pour une défense avancée. Et quand un défenseur a du flair (voyant un ballon traîner aux abords de la surface), il peut faire la différence. C'est dire combien le sens du timing chez un arrière fait peser une menace constante sur les défenses adverses. Un arrière est certes connu pour sa vélocité, ses tacles salvateurs, mais également pour ses montées décisives. Que de coups de pied arrêtés ont été transformés par des arrières. Que de buts de la tête. Que de lourdes frappes qui viennent se loger au fond des filets. De plus en plus de défenseurs se muent en buteurs et aident considérablement leurs équipes. Il ne s'agit plus de spécimens rares, de descendants des Ronald Koeman, le «Kaiser»...Cela fait désormais partie du cursus pour sortir du lot. Toujours bien placé, lecture du jeu, frappe en pivot, timing parfait, coups de tête puissants :le défenseur-buteur est avant tout un atout pour son équipe et pas seulement pour blinder les bases arrières. «Prise d'initiative et personnalité» Voilà pour le volet individuel et prise d'initiative. Sauf que le football est un sport collectif. Il faut forcément se fondre dans un schéma qui dicte le positionnement de tout un chacun. A titre d'exemple, lors de l'épopée de l'équipe nationale 78, si Dhouib monte, Ghommidh se décale alors que je recule d'un cran. Bref, tout dépend de la décision prise (à la seconde près) par le second pivot. Cette prise d'initiative dépend des espaces, des brèches et de la réaction adverse. En clair, le pivot fait la couverture sur le latéral afin de permettre au bloc d'avancer et à l'excentré de débouler. Cela dépend bien entendu de la qualité des joueurs sous la main. Vivacité, conduite de balle, slalom, renversement, coups de reins, variation, tempo, enchaînements, le football tient certes à si peu de choses mais seuls des éléments complets peuvent appliquer ce qui est exigé ou ce que la situation leur dicte à l'instant «T». Question de talent mais aussi de personnalité et de tempérament». La personnalité, voilà l'abreuvoir d'un défenseur-buteur ou d'un latéral volant. Qu'il s'agisse de Hatem Trabelsi, Tarak Thabet, Badra, Radhi Jaïdi, Ali Maâloul, Sabri Jaballah, Mohamed Hedi Abdelhak, Magharia, Salou Tajou, Maman Yussufu ou même Bilel Ifa, Brigui et Mohamed Ali Yaâkoubi, un mental d'acier les a conduits à avancer et tenter leur chance. Notre interlocuteur Ali Kaâbi finit son allocution en mettant en exergue les bienfaits d'un bon apprentissage pour former des défenseurs-buteurs: «Je dois beaucoup à un technicien qui ne jure que par le football offensif sous tous les angles et sous toutes les coutures. Nous autres, arrières, étions fortement et particulièrement sollicités dans ce cas d'espèce. Il s'agit de Rachid Turki qui nous a enseigné les bases du football d'attaque. Savoir se déplacer parfaitement bien dans la surface adverse. Couper les trajectoires des corners tirés par ses coéquipiers avec aisance. Rester à l'affût pour reprendre un ballon éventuellement repoussé par le gardien adverse. Rester attentif. Surprendre...Rachid Turki est pour moi le précurseur d'un principe qui propose un jeu offensif basé sur le mouvement et la permutation. A ce niveau-là, les défenseurs sont au cœur de la stratégie».