A-t-on décidé de brader l'hôpital public au profit des cliniques privées ? La question est posée sérieusement par les syndicalistes du secteur qui ont pris la décision de ne plus se taire et de dévoiler les dures réalités de la situation catastrophique dans laquelle se trouvent des hôpitaux prestigieux comme celui de La Rabta et Charles-Nicolle. «Aujourd'hui, confie à La Presse Farouk Ayari, secrétaire général de l'Union régionale du travail à Tunis relevant de l'Ugtt, l'hôpital de La Rabta offre l'image désolante d'un petit centre de soins urgents où les patients sont livrés à leur propre sort, les médecins dans l'incapacité de prodiguer les soins requis à leurs malades faute d'équipements nécessaires, et les patients et leurs proches, notamment ceux qui viennent de l'intérieur de la République, sont obligés de rentrer bredouilles chez eux tout simplement parce que le scanner n'est pas en état de fonctionnement et que la direction de l'hôpital ne dispose pas dans ses caisses de cent ou deux cents dinars pour le réparer». Il ajoute : «Mardi 29 et mercredi 30 novembre, les membres du personnel de l'hôpital de La Rabta ont porté le brassard rouge pour signifier au ministère de la Santé que la situation actuelle ne peut plus perdurer. Nos revendications ne sont pas à caractère salarial. Nous visons à sensibiliser les autorités pour qu'elles prennent des mesures urgentes afin de sauver l'hôpital de La Rabta qui offre ses services quotidiens aux habitants du grand district de Tunis comportant quatre gouvernorats et qui accueille des milliers de patients qui viennent des régions intérieures du pays. Aujourd'hui, il n'est plus question de contester ces rendez-vous de six ou même d'une année qu'on a pris l'habitude de fixer aux patients des régions de l'intérieur. Maintenant, ces patients sont confrontés à un autre problème: Quand ils se présentent à leur rendez-vous, les médecins et les cadres paramédicaux leur signifient que le scanner de l'hôpital est en panne et qu'on attend depuis des mois que la direction de l'hôpital le répare. Et commencent à ce moment les disputes et les actes de violence à l'encontre du personnel, puisque les parents accompagnateurs des patients ne peuvent comprendre ou accepter que La Rabta ne soit pas en mesure de faire redémarrer une machine à l'arrêt, car ses caisses sont vides. Depuis 15 jours, les chirurgiens n'ont effectué aucune intervention, faute de moyens parce que les fournisseurs ne sont pas payés et ils refusent de continuer à approvisionner l'hôpital. Pourtant, les solutions existent La situation étant ce qu'elle est, le ministère faisant, jusqu'ici, selon nos sources syndicales, la sourde oreille aux correspondances qui lui ont été adressées par les médecins et le syndicat de base de l'hôpital de La Rabta, une question se pose d'elle-même : y a-t-il des solutions qui pourraient sauver l'hôpital de la fermeture, comme l'avancent les syndicalistes ? «Oui, les solutions sont possibles. En premier lieu, la Cnam doit verser à l'hôpital les sommes considérables qu'elle lui doit. L'hôpital croule sous de grosses dettes qu'il doit lui aussi à ses fournisseurs dont en premier lieu la Pharmacie centrale qui exige la somme de 16 millions de dinars pour reprendre l'approvisionnement de l'hôpital en médicaments. Au sein de l'Ugtt, nous attendons que le ministère décide de nous rencontrer pour un débat ouvert qui ne se limitera pas uniquement aux problèmes de l'hôpital de La Rabta, dans la mesure où l'hôpital Charles-Nicolle vit aussi les mêmes difficultés. Idem pour les hôpitaux régionaux», précise Farouk Ayari.