S'emparer d'un espace public et en faire un berceau artistique le temps d'une après-midi, c'est désormais chose faite ! Grâce à la participation des jeunes et des enfants du quartier qui ont mis la main à la pâte en façonnant eux-mêmes les créations exposées dans le cadre d'«El Warcha», un atelier de design, crée par Benjamin Perrot et soutenu par l'association l'ArtRue ... «El Warcha» a été présentée au public l'après-midi du 10 décembre à la «place de la Hafsia» en présence d'un nombre considérable de curieux, venus spécialement découvrir l'aboutissant d'une résidence artistique fructueuse. Cette place publique centrale, toujours aussi animée par les habitants de la médina et des quartiers environnants, grouillait, ce jour-là, surtout d'enfants de 6 à 12 ans, courant dans tous les sens, agités et excités, à l'idée de s'adonner à des jeux nouveaux, et de se divertir autrement en usant ... de leurs propres créations ! Un concept inédit, comme on en voit rarement en Tunisie ou ailleurs ! Une fois sur place, les visiteurs sont munis d'une carte. Une sorte de schéma à emprunter pour découvrir, au fur à mesure, les créations fabriquées par les enfants du quartier. Des œuvres d'arts au charme exquis, achalandées aux quatre coins de la place «El Hafsia» et même à l'intérieur des bâtiments environnants, usés par le temps, délabrés, qui manquent d'entretien mais qui restent non moins attrayants. Cerise sur le gâteau : les enfants du quartier eux-mêmes se sont chargés de faire le guide aux participants, aussitôt tombés sous le charme des astuces communiquées par ces petits créateurs et de leurs agissements juvéniles ! Commence alors la découverte fort intéressante, définie comme étant «un atelier de design participatif», qui repose essentiellement sur l'interactivité, l'échange, l'apprentissage des jeunes et des enfants. Ces derniers s'y sont adonnés à cœur joie, chapeautés par Benjamin Perrot et d'une poignée de membres, issus de l'ArtRue. Ensemble, ils ont dirigé des travaux pratiques, qui permettaient aux enfants de laisser libre cours à leur imaginaire. Une activité qui s'est étendue de septembre à décembre 2016. Hamacs, luminaires, poubelles, cages à pigeons, tables circulaires ou de ping-pong, jeux de dames et même des plantes, fabriquées, pour la plupart, en morceaux de bois, dénichés des environs, finement montés. Donnant lieu à un atelier d'artisanat, d'art et de design, à ciel ouvert. Chaque création a impacté les habitants du coin : des poubelles ont été montées afin d'inciter une centaine d'enfants à nettoyer le quartier. Un acte citoyen d'envergure, organisé en coopération avec la mairie. Les plantes avaient une portée écologique. Des bacs à fleurs ont été réalisés; meubler les espaces de la médina qui manquent cruellement d'espaces verts est primordial sans oublier les luminaires suspendus pour des habitations qui manquent d'électricité. Et le résultat final a, non seulement subjugué les participants, mais a grandement fasciné les habitants du coin, émerveillés par le déclenchement d'une telle effervescence. «El Warcha» était ludique et a initié des enfants à la création et aux travaux manuels. Elle a titillé la fibre artistique et citoyenne des participants. Benjamin Perrot a tenu les rênes de ce travail. Ce jeune artiste a fait des études en design et architecture à l'école St Martins de Londres et a travaillé dans une agence d'architecture et d'urbanisme londonienne avant de débarquer à Tunis, en 2015 dans le but de réaliser son propre projet de recherche autour de l'espace public et du patrimoine. Il nous a affirmé, qu'auparavant il avait déjà commencé un travail sur les espaces publics. «Je m'étais intéressé aux questions citoyennes ou comment l'espace public peut être un espace de rencontres, d'échanges mais qui, d'un point de vue théorique, reste un espace politique. Dans la réalité, souvent, c'est un espace de transition, de passage. L'appropriation du citoyen de l'espace public n'est pas toujours évidente ! Ou bien elle se fait pour des raisons commerciales. Mais procéder ainsi juste à des fins d'échange, de rencontres, ce n'est pas évident... En Tunisie, c'est une approche nouvelle pour faire de cet espace public, jadis exclusivement lié à la répression et à l'autorité et soumis à un certain contrôle, un espace citoyen qu'on pourrait désormais investir plus facilement».