En convoquant plus de... quarante joueurs, le sélectionneur a sans aucun doute flatté l'ego des joueurs appelés et de leurs équipes (pas très sûr !), rendu un fieffé service aux agents qui saisiront ce cadeau venu du ciel, mais il a insulté l'intelligence des tunisiens qui sont plus que surpris, choqués même, par cette initiative qui ne répond à aucun impératif pédagogique ou technique. Monsieur le sélectionneur, dont nous respectons le passé de grand joueur d'une des équipes polonaises les plus performantes de l'époque — il compte plus de soixante sélections —, ne saurait nous affirmer qu'il a vu, tout au long de sa carrière, une liste aussi longue de joueurs appelés pour la préparation d'une... phase finale. Si le sélectionneur venait de débarquer dans un pays inconnu et qu'il n'avait aucune idée des joueurs et du football qui y était joué, cela aurait été compréhensible. S'il visait à assurer des doublures pour son équipe type, cela aurait été admissible, mais pas dans ces proportions. S'il n'avait pas déjà une équipe type, toujours perfectible, qui a déjà joué ensemble tout au long des éliminatoires, on l'aurait excusé de ses hésitations. Mais ce n'est pas du tout le cas. Le sélectionneur et ses adjoints ne pourront jamais encadrer un nombre aussi élevé de joueurs. C'est du vernis qu'il appliquera pour justifier sa présence ou son activité. Dans quel pays du monde (développé, s'entend) a-t-on vu ce nombre aussi effrayant que rien ne justifie ? Bien des joueurs figurant dans cette liste, arrachés à leurs équipes, handicaperont, par voie de conséquence, la préparation qui entre dans une phase cruciale pour la deuxième phase du championnat ou pour la préparation des coupes africaines. Et même s'il en aurait besoin, la préparation au sein de leurs clubs est autrement plus efficace qu'au sein d'un groupe de quarante éléments avec en leur subconscient l'idée qu'ils ne sont là que pour l'accomplissement d'une simple formalité et... pour profiter d'un voyage et ne pas être suspendus. Imaginez avec quel état d'esprit ils s'entraîneront ! Ces joueurs ne sont pas bêtes et savent qu'ils sont là pour la décoration. D'ailleurs, bon nombre d'éléments opérant à l'étranger ne viendront pas pour faire partie de cette randonnée. Leurs équipes ne les libéreront que pour les rencontres officielles. Pourquoi le sélectionneur a-t-il agi ainsi ? Pour les joueurs qui font partie de la liste... élargie, il aurait pu se mettre d'accord avec leurs entraîneurs de clubs pour les préparer à faire face à une éventuelle convocation. Ils auraient été beaucoup mieux encadrés. Pourquoi ces dépenses inutiles alors que le pays est dans une mauvaise passe et doit faire des économies là où c'est possible, et que la fédération elle-même se doit d'éviter d'alourdir l'ardoise de ses dettes ? Est-elle sûre qu'elle n'ira pas quémander, dans quelques mois, des subventions auprès de la tutelle ? Où est la direction technique nationale et que pense-t-elle vraiment de cette initiative ? Parraine-t-elle cette étrange décision et y a-t-il au sein de cette Direction un seul technicien qui accepterait de conduire un groupe de quarante éléments ? La FTF, dans le cadre de la sacro-sainte règle de non-intervention dans les affaires du sélectionneur, n'a pas réagi, mais l'avis de la DTN est important, à moins que le sélectionneur ne se considère au-dessus de tous et que personne ne lui arrive à la cheville. C'est là où il se trompe. Un Souayah, Benzarti, Ellili, Kasri, et bien d'autres techniciens tunisiens, qui n'ont absolument rien à envier au sélectionneur en place, n'auraient jamais agi de cette manière ! Ô rage, ô désespoir, ô impuissance ennemie ! n'a-t-on donc tant vécu que pour cette infamie ?» (d'après Le Cid)