L'ouvrage consacre plusieurs chapitres à l'art de vivre des beys : leurs palais, leurs mariages, les us et coutumes de leurs familles, l'organisation de leur cour. Le livre comporte également les biographies des grands vizirs : Mohamed el Aziz Bouattour, Youssef Djaiet, Taieb Djellouli, Khalil Bouhajeb, Mhammed Chenik, Mustapha Kaak... Comme il se présente lui-même, Maher Kamoun, l'auteur de « La Régence de Tunis sous le règne des beys. 1613-1957 » (octobre 2016), n'est «ni historien, ni homme politique, ni chercheur, ni journaliste». Grand commis de l'Etat, il a travaillé dans les années 70 sous les ordres de quatre premiers ministres de Bourguiba, auquel il a consacré en février dernier, un livre : «Bourguiba 1903- 2000 Ombres et Lumières». Maher Kamoun, féru de lecture, d'écriture et d'histoire, vient de publier un nouvel ouvrage sur les beys, les rois de Tunis, qui ont dirigé le pouvoir en Tunisie durant deux siècles et demi. Dans un style pédagogique extrêmement lisible, il raconte comment les troupes ottomanes débarquent en juillet 1574 sur les côtes tunisiennes pour libérer Tunis des mains des Espagnols. En 1584, Tunis devient une iala (province) ottomane, gérée par un wali, le représentant du sultan mais tout de même poste strictement honorifique. Les deys (une autorité militaire) prennent ensuite le relais. Petit à petit, le pouvoir des Deys s'efface au profit de ceux des Beys, qui deviennent les maîtres absolus du pays. Leur volonté «a force de loi et leurs décisions ne sont susceptibles d'aucun recours», explique l'auteur. Après les Beys mouradites, c'est en 1705 que s'installe la dynastie husseïnite. Elle comptera dix-neuf souverains, dont quatre furent assassinés. Selon Maher Kamoun, avant l'installation du protectorat en 1881 : «Parmi les douze beys qui se succèdent sur le trône, seuls quatre se distinguent durant leurs règnes par de notables réalisations». Il s'agit, estime l'auteur, de Hussein Ben Ali, le fondateur de la dynastie, qui eut le mérite de s'appuyer sur les élites tunisiennes dans la gestion des affaires du pays. Il cite ensuite Ali Pacha Bey, son fils Hamouda Pacha Bey et Ahmed Pacha Bey. A l'époque de Hamouda Pacha Bey (1782-1814), le pays connaît une belle prospérité, notamment grâce à l'activité de la course, qui va renflouer les caisses de l'Etat. Bâtisseur, le Bey entreprend plusieurs travaux urbanistiques, dont l'édification d'une nouvelle partie des souks de la Médina de Tunis. Après la publication de la Constitution de 1861, la crise financière s'aggrave, la révolte de Ben Ghedhahem gronde à cause de l'augmentation de la mejba, taxes, les épidémies se multiplient. Le pays est au bord de la faillite. Résultat, le protectorat s'installe et avec lui une réduction substantielle du pouvoir du bey. «Son autorité devient formelle et son rôle va se limiter à sceller des décrets que le représentant de la puissance protectrice lui présente, voire lui impose», note l'auteur. L'ouvrage consacre plusieurs chapitres à l'art de vivre des beys : leurs palais, leurs mariages, les us et coutumes de leurs familles, l'organisation de leur cour. Le livre comporte, également, les biographies des grands vizirs : Mohamed El Aziz Bouattour, Youssef Djaiet, Taieb Djellouli, Khalil Bouhajeb, Mhammed Chenik, Mustapha Kaak... En fait, et comme l'explique Maher Kamoun, malgré sa dimension despotique, «le pouvoir beylical a permis de pérenniser l'Etat tunisien et de préserver un tant soit peu l'identité tunisienne. Celle-ci, au contact de la modernité du monde et de la réalité coloniale, se transformera en conscience nationale...». L'ouvrage, agréablement illustré, foisonne de portraits d'hommes du pouvoir et de données sur des personnages qui ont marqué l'Histoire tunisienne des dix-septième, dix-huitième, dix-neuvième et vingtième siècles.