La natation tunisienne vient d'écrire une nouvelle page glorieuse grâce à l'ascension fulgurante du jeune Ahmed Jaouadi. Âgé de 20 ans, il a été sacré double champion du monde sur 800 m et 1500 m nage libre lors des Championnats du monde 2025 à Singapour (bassin de 50 mètres), inscrivant son nom en lettres d'or dans les annales de la discipline. Un exploit qui le place dans la lignée des légendes tunisiennes Oussama Mellouli et Ahmed Ayoub Hafnaoui. Ce doublé historique consacre des années de travail et illustre la progression impressionnante du nageur, qui s'impose désormais comme un spécialiste incontesté des épreuves de demi-fond, réputées pour leur exigence physique et tactique. Sa performance confirme non seulement son immense talent, mais aussi sa foi inébranlable en ses capacités à s'imposer au plus haut niveau. « J'avoue avoir ressenti une légère déception, car mon objectif était de battre le record du monde du 1500 m nage libre. Mais ce titre reste une grande satisfaction, surtout qu'il s'agit de ma deuxième victoire en une semaine », a-t-il confié, drapeau tunisien à la main, à sa sortie du bassin. Une déclaration qui en dit long sur l'ambition de ce jeune athlète à l'appétit insatiable. Mais derrière ces médailles se cache un long parcours. Jaouadi a débuté la natation à l'âge de 6 ans à l'Avenir Sportif de La Marsa. Il a ensuite poursuivi sa formation en France, au sein du club Alpes 38 de l'université de Grenoble, tout en continuant ses études. À 16 ans, il intègre la sélection tunisienne seniors à l'occasion des Championnats arabes 2021 à Abou Dhabi, d'où il repart avec quatre médailles. L'année suivante, il en décroche cinq autres aux Championnats d'Afrique à Tunis. En 2023, il franchit une nouvelle étape en rejoignant le club français de Martigues, où il est pris en main par Philippe Lucas, entraîneur emblématique ayant accompagné des championnes comme Laure Manaudou ou Sharon Van Rouwendaal. Ce choix stratégique porte rapidement ses fruits. L'année 2024 fut décisive pour Jaouadi, avec trois grandes compétitions : les Mondiaux de Doha, les Jeux olympiques de Paris, puis les Mondiaux en petit bassin à Budapest. À Paris, il se classe 4e du 800 m, juste derrière les stars mondiales de la discipline : l'Irlandais Daniel Wiffen, l'Américain Bobby Finke et l'Italien Gregorio Paltrinieri. En décembre, il rebondit en remportant l'or sur 1500 m et le bronze sur 800 m à Budapest. Mais c'est bien à Singapour que Jaouadi franchit un cap décisif. Il s'offre deux médailles d'or, qu'il dédie à son compatriote et ami Ahmed Ayoub Hafnaoui, actuellement en difficulté : « Je dédie cette victoire à Hafnaoui. Il traverse des moments difficiles... », déclare-t-il, ému. Son kinésithérapeute Ahmed Ben Dhaou, interrogé par l'agence TAP, souligne l'importance de la stratégie adoptée. Sur le 800 m, Jaouadi a géré sa course en accélérant progressivement, profitant de son finish redoutable. Sur le 1500 m, face à des adversaires comme l'Allemand Florian Wellbrock ou l'Américain Finke, il a opté pour une montée en puissance par paliers, parfaitement exécutée. Avec ces deux titres mondiaux, Jaouadi s'impose désormais comme une figure incontournable de la natation internationale. Mais cette reconnaissance s'accompagne aussi d'une pression accrue. Sous les projecteurs et observé de près par ses concurrents, il devra faire preuve d'une rigueur et d'une détermination sans faille pour atteindre son ultime objectif : une médaille olympique à Los Angeles en 2028.