Etrange premier roman de Bechir Garbouj qui, aux jours pleins de bruits et de fureurs de notre révolution, préfère se réfugier dans le souvenir de cette autre révolution, celle de mai 68. C'est une mélodie nostalgique, un peu triste, qui évoque un temps de bruine, une petite musique, des ombres qui s'effacent, une mémoire qui s'enfuit. C'est l'histoire d'une histoire sans réelle histoire, des rencontres inachevées, des amours non abouties, des images passées, des départs avortés. C'est le roman d'une mémoire que rythment les pas d'un chat vagabond et infidèle, que fait remonter une pluie de printemps, que parfume l'odeur d'un jardin proche, que fixe une vieille photo cornée. Cela pourrait être du Modiano tunisien Etrange premier roman de Bechir Garbouj qui, aux jours pleins de bruits et de fureurs de notre révolution, préfère se réfugier dans le souvenir de cette autre révolution, celle de mai 68. S'extrayant d'une réalité bruyante, il choisit de se souvenir de ces jours que le temps a adoucis, dont les aspérités se sont effacées, dont les rumeurs se sont éteintes, dont les couleurs se sont adoucies. Il n'en reste que le souvenir de tendres rencontres, de douces ruptures, de longues marches dans une belle cité, d'une fascination désabusée et de ce sentiment de ne pas en être qui voile tout d'une légère indifférence. Il est l'intrus, l'étudiant étranger qui erre entre les lieux de la Révolution. Il est à la recherche d'une femme, et en même temps d'un fil conducteur pour comprendre l'évènement, comprendre en fait la fascination qu'exerce sur lui cette « étrange saison » où il est entré comme « par effraction. » Le vieux professeur qui, aujourd'hui, se souvient et raconte entre deux siestes, ne raconte-t-il pas en fait tout simplement...sa jeunesse ?