La vague des nationalismes traverse les pays d'Occident de part et d'autre de l'Atlantique : elle fait craindre des changements majeurs dans la diplomatie internationale. Mais tout est-il si sombre pour le Proche-Orient ? La cause palestinienne ne dépend pas que de l'engagement de ceux qui l'ont fait sienne, et en particulier des Palestiniens eux-mêmes : elle dépend aussi, dans ses avancées comme dans ses difficultés, du contexte international. Et plus précisément des élections qui ont lieu dans tel ou tel pays et à la faveur desquelles une majorité en chasse parfois une autre, et une diplomatie en remplace une autre. Tout le monde est d'ailleurs en droit de s'interroger sur les retombées à long terme de cette vague nationaliste et plus ou moins xénophobe qui traverse actuellement les pays d'Occident en général. Aux Pays-Bas, les législatives d'avant-hier n'ont pas permis au Parti de la Liberté (PVV) de l'emporter, mais ce parti d'extrême droite, ouvertement islamophobe, n'est pas passé loin de la victoire. Comme l'a souligné son leader, le député Geert Wilders, le PVV est désormais le second parti du pays. Sa participation au gouvernement pourrait d'ailleurs s'avérer incontournable, à moins d'une large coalition entre ses adversaires... En France, la candidate à la présidentielle de mai prochain qui défend les couleurs de l'extrême droite est depuis longtemps en tête des sondages, s'agissant en tout cas de la primaire. Et le tableau est à peu près le même dans la plupart des pays européens, à des nuances près. Mais, s'agissant de la question palestinienne, un fait majeur s'est déjà produit avec le changement d'administration à Washington. Même si les huit années pendant lesquelles Obama a mené la barque de la diplomatie américaine ont donné une récolte que d'aucuns qualifieraient de très maigre, il n'est pas interdit de penser que ce qui attend les Palestiniens soit pire. Qu'on se souvienne des promesses de campagne faites par Donald Trump aux Juifs américains, parmi lesquelles le transfert de l'ambassade américaine à Jérusalem. Qu'on se souvienne aussi de l'indulgence avec laquelle la nouvelle administration a accueilli l'annonce de nouvelles colonies par le gouvernement israélien. Pas plus tard qu'hier, on a d'ailleurs appris qu'une rencontre a eu lieu avec des représentants des colons, en rupture avec les anciens usages de la diplomatie américaine... Il y a un mois, le président américain recevait le Premier ministre israélien et évoquait avec lui, lors d'une conférence de presse, la solution «à un seul Etat» : celle qui a précisément toutes les faveurs de la droite israélienne la plus dure, celle-là même qui ne veut pas entendre parler d'un Etat palestinien indépendant comme voisin ! Où en est-on aujourd'hui ? Eh bien, curieusement, les signes ne sont pas aussi sombres qu'on aurait pu le craindre. On attend, probablement pour le début du mois prochain, une rencontre entre le président de l'Autorité palestinienne et le président américain. L'annonce de cette rencontre a été faite vendredi dernier, 10 mars, suite à un entretien téléphonique entre les deux dirigeants. Mardi dernier, Mahmoud Abbas a reçu à Ramallah le conseiller spécial de Trump en négociations internationales, Jason Greenblatt. Et c'est Abbas qui, à l'issue de cette rencontre, a déclaré qu'un accord de paix historique «était possible». Les contacts directs avaient commencé en réalité dès le mois dernier : presque au même moment où Trump recevait Netanyahou à Washington, Mike Pompeo, le nouveau directeur de la CIA, s'entretenait avec le président palestinien à Ramallah... Ce regain diplomatique américano-palestinien s'est d'ailleurs accompagné d'une mise entre parenthèses, sinon d'un abandon, des promesses de campagne les plus contestables... Que faut-il penser ? Que la vague nationaliste à laquelle on assiste n'est pas si inquiétante ? Peut-être est-il un peu tôt pour apporter une réponse si optimiste. Et la généralisation à partir de l'exemple américain ne serait pas prudente, d'autant que la politique américaine elle-même n'a pas encore dissipé le flou qui continue de l'entourer. Il est indéniable que l'on assiste chez les populations des pays occidentaux à un phénomène de repli sur soi et de rejet de l'étranger qui, en soi, ne saurait être considéré comme un facteur favorable dans l'évolution de notre monde vers plus de concorde et de paix. Mais si l'administration américaine, bien que portée par cette vague nationaliste, est capable de faire preuve de souplesse et si, d'autre part, une mobilisation des pays voisins est réellement engagée au service d'une issue au Proche-Orient — avec le soutien de la communauté internationale —, alors, bien des espoirs sont permis.