Par Abdelhamid Gmati Le prix du « meilleur professeur au monde », doté d'un million de dollars, a été remporté, dimanche dernier à Dubaï, par une enseignante travaillant dans un village reculé de l'Arctique. Elle a été choisie par le Global Teacher Prize, qui récompense chaque année un enseignant hors du commun, parmi 20.000 candidats issus de 179 pays. La lauréate s'est distinguée avec son initiative, lançant un programme de formation sociale à l'intention de ses élèves, notamment les filles, dans une région où les grossesses d'adolescentes sont fréquentes, les taux d'abus sexuels et les suicides élevés. Ce concours, organisé pour la troisième fois, avait été remporté par une enseignante palestinienne de Cisjordanie occupée, Hanane Al-Hroub, pour « l'importance qu'elle donne au jeu dans l'éducation des enfants » afin de contrer la violence dans le milieu scolaire. On ne peut s'empêcher de s'interroger sur nos enseignants et en quoi ils se sont distingués. Il faut d'abord souligner que le plus grand nombre d'entre eux s'évertuent à faire leur travail convenablement, plusieurs s'investissant pour contrer l'abandon scolaire. Mais dans leur ensemble, ils sont mobilisés par deux syndicats de l'enseignement primaire et du secondaire, qui ne cessent de décréter des grèves à répétition depuis deux ans. Au départ, les revendications matérielles et professionnelles étaient légitimes. Et ont été, pratiquement, satisfaites. On soulignera qu'en moins de deux ans, les salaires mensuels des professeurs de l'enseignement secondaire, toutes catégories confondues, ont augmenté de près de 400 dinars. Une augmentation jamais enregistrée dans l'histoire de l'enseignement en Tunisie. Mais voilà que, depuis quelque temps, une revendication politique est défendue, «bec et ongles», par essentiellement le secrétaire général de l'enseignement secondaire, Lassâad Yaâcoubi, qui exige le limogeage du ministre de tutelle, Néji Jalloul. Dernier épisode de ce feuilleton : la menace de suspensions des cours à partir du 27 mars. Intervention du bureau exécutif de l'Ugtt, samedi dernier, pour exprimer son refus concernant cette suspension des cours. Le communiqué s'inquiète des « tentatives de diabolisation des syndicats et de manipulation de l'opinion publique par des parties relevant du ministère de l'Education». Mais «pour que les intérêts des élèves soient préservés, surtout au vu de l'approche des examens», il demande aux structures syndicales de l'enseignement secondaire et aux enseignants de poursuivre leur travail avec « rigueur et discipline ». Mais, le lendemain, l'irascible Yaâcoubi persiste et annonce son attachement à la décision consistant en la suspension des cours à partir du 27 mars 2017. Dans la même veine, son syndicat dénonce les positions de « certains partis politiques diabolisant l'action syndicale et mettant en doute le patriotisme des responsables de l'Union». Mieux : le même Yaâcoubi affirme : «Nous sommes une organisation nationale, et nous sommes un partenaire. Nous n'obéissons pas aux ordres de la présidence du gouvernement ». Sur ce, l'Ugtt déclare être contre la décision du syndicat de l'enseignement secondaire concernant la suspension des cours et appelle le gouvernement à lui trouver un remplaçant dans les meilleurs délais. Dans ce « jeu » syndical, on s'interroge sur les raisons de cette exigence du limogeage du ministre. Selon certains analystes, «il n'y a pas de guerre entre Lassâad Yaâcoubi, le secrétaire général du Syndicat de base de l'enseignement secondaire, et Néji Jalloul, le ministre de l'Education. La cause de Yaâcoubi est purement politique, et il utilise son poste au syndicat pour servir les intérêts du parti politique auquel il appartient. En attendant, des centaines de milliers d'écoliers et de lycéens sont pris en otage et privés de leur droit à l'enseignement. Faut-il s'étonner que les parents d'élèves et une grande partie de l'opinion soient outrés par ces manigances syndicales ? Et s'il y a diabolisation syndicale, elle provient des syndicats eux-mêmes.