Par Jalel MESTIRI La problématique consiste à s'interroger sur les conséquences de cette mutation juridique, sur son développement économique et sa rentabilité. Il s'agit au fait de définir l'intérêt et les limites d'une transposition du cadre juridique de l'entreprise vers le secteur du football professionnel. Les diagnostics des dernières années sont déroutants. Les clubs tunisiens sont malades. Ils sont de plus en plus exposés au désordre et au marasme financier. A l'inattention. Ils connaissent tous et sans exception des pertes cumulées. A moins de posséder une boule de cristal, responsables et dirigeants sont dans l'incertitude, alors que les charges fixes atteignent, sans cesse et en l'absence de revenus, les sommets. La persistance des déficits observés dans les budgets impose forcément une restructuration. Tout particulièrement l'impératif de valoriser les clubs, d'ajuster leur capital, de trouver des fonds propres et de favoriser leur cotation en Bourse. Le constat ne date pas d'aujourd'hui, le résultat encore davantage : la professionnalisation du football entamée en 1994 n'a pas suffi. Elle aurait dû depuis longtemps être accompagnée du changement du statut juridique des clubs. C'est-à-dire de passer du statut d'association à celui de société anonyme. Si on considère d'ores et déjà pareille option, du reste révolutionnaire, comme une avancée pour le football tunisien, l'on se demande toutefois si les clubs sont suffisamment prêts pour fonctionner comme des entreprises normales? Il faut dire que l'idée de faire bénéficier les clubs d'actionnariat public et privé se fait de plus en pressante. Notamment une loi qui devrait leur permettre de pouvoir mieux gérer l'apparition et le développement d'enjeux financiers devenus aujourd'hui déterminants, de favoriser une meilleure place à l'économique et de se rapprocher du modèle d'entreprise, avec toutefois les spécificités sportives que tout cela exige. La problématique consiste cependant à s'interroger sur les conséquences de cette mutation juridique, sur son développement économique et sa rentabilité. Il s'agit au fait de définir l'intérêt et les limites d'une transposition du cadre juridique de l'entreprise vers le secteur du football professionnel. La modification du code du sport et les nouvelles tendances de management permettront certainement plus de flexibilité aux clubs pour prendre la forme de sociétés anonymes. L'objectif qui devrait être fixé n'est autre que l'adaptation à une économie de marché susceptible d'attirer les investisseurs, la maximalisation du profit, l'investissement extérieur et même la cotation en Bourse. Il faut dire qu'à travers la notoriété sportive, un club de football peut-être, s'il obtient de bons résultats, un excellent vecteur pour l'image de marque d'une société. Pour cette raison, et pour tant d'autres, le passage des clubs au statut d'association, l'intégration du football professionnel dans l'économie du marché et la ressemblance de plus en plus forte aux entreprises induisent la nécessité de procéder à une étude des éventuelles évolutions et transformations des lois sportives qui gèrent actuellement le football tunisien. Il ne faut pas, en effet, oublier que certains acteurs, poursuivant un objectif de notoriété ou d'amélioration de leur image de marque, ont mis en difficulté des clubs qui n'étaient pas endettés auparavant. L'arrivée de ces hommes d'affaires, et de fonds presque illimités, essentiellement sur le marché des transferts, a eu pour effet une forte augmentation des prix et des salaires des joueurs. L'inflation des indemnités plombe de plus en plus les comptes de résultat de chaque année. Il y a justement des clubs qui dépensent lamentablement et en une saison plus que le budget annuel de plusieurs clubs réunis pour la même période. D'autres responsables, et ils sont minoritaires, n'ont pas toutefois cédé à cette folie dépensière. Mais la vision paternaliste n'a pas disparu. Le désir d'acquérir une plus forte notoriété fait que les acteurs financiers soient présents dans la majeure partie des postes de responsabilités dans les clubs tunisiens. La plupart d'entre eux ont fortement investi dans le football, mais avec une vision hautaine, au point même d'agir sur la stratégie sportive. Devant le dépassement du seuil financier traditionnel, qui n'est pas du reste défini par la loi, nous osons dire que les clubs sont aujourd'hui dans l'obligation de créer des sociétés anonymes sportives professionnelles, un modèle qui a fait ses preuves en Europe et en Amérique du Sud depuis de longues années, tout en conservant la vocation de clubs à statut renforcé.