Aujourd'hui, l'on ne compte que 50 jardins d'enfants municipaux, alors qu'ils étaient, dans les années 80, au nombre de 350 établissements. L'encadrement de la prime enfance représente un enjeu capital dans, notamment, un contexte marqué par la prolifération des établissements préscolaires anarchiques et autres à finalité dogmatique. En 2016, le ministère de la Femme et de la Famille a fermé les portes de quelque 600 jardins d'enfants clandestins pour non-conformité aux règles exigées dans le cahier des charges. Parallèlement, un travail de longue haleine est mené depuis 2015 visant la réinstauration et la réhabilitation des institutions publiques de prime enfance ; lesquelles ont été considérées, des décennies durant, comme étant des références confirmées en matière d'éducation et d'encadrement des enfants. En effet, dans les années 80, l'on comptait pas moins de 350 jardins d'enfants municipaux, implantés dans toutes les régions, ce qui assurait une bonne couverture et non des moindres. «Ce nombre s'est émoussé peu à peu. Certains établissements ont été fermés, faute de moyens. D'autres ont vu leurs structures se dégrader au point qu'ils n'étaient plus adaptés pour accueillir les enfants. D'autres encore ont été convertis en des espaces privés. Aussi, le nombre de jardins d'enfants municipaux a-t-il chuté pour ne compter qu'une cinquantaine d'établissements tout au plus», indique Mme Alyssa Khouaja, chef de service des institutions préscolaires au ministère de la Femme et de la Famille. Pour une meilleure couverture préscolaire Le recul au niveau des institutions préscolaires publiques a été propice à l'émergence des structures privées. Le secteur privé est devenu, en effet, l'ultime recours pour les parents qui se trouvent dans l'obligation de confier leurs progénitures à des jardins d'enfants à but plus lucratif qu'éducatif. Le bien-être de l'enfant se transforme en un objet de marchandage : celui qui paie plus bénéficie d'un meilleur panier de prestations et de plus d'attention. D'un autre côté, les parents à moyens revenus n'ont, souvent, d'autres alternatives que de recourir aux jardins d'enfants privés les moins chers et, par conséquent, les moins fiables car anarchiques. «En Tunisie, nous comptons 4.300 jardins d'enfants. Paradoxalement, seulement 35% de la population infantile ont accès à ces services. Ainsi, près de 70% des enfants sont exclus de ce système, pourtant élémentaire pour leur bien-être et leur développement. D'où l'impératif de réfléchir sur les moyens et les mécanismes susceptibles de combler cette lacune immense et de permettre aux enfants de bénéficier des services de qualité, garantis par un personnel qualifié et dans le respect aussi bien du cahier des charges que du principe de l'égalité des chances», renchérit Mme Khouaja. 2017 : réouverture de treize jardins d'enfants municipaux Pour faire face à ce phénomène et doter l'enfant tunisien de son droit à l'encadrement, à l'éducation préscolaire et aux multiples facteurs favorables à son développement psycho-affectif et moteur, la direction générale de l'enfance s'active afin de redonner vie aux institutions préscolaires étatiques et de reprendre les choses en main afin de contrecarrer ce phénomène en perpétuelle évolution. «Ce programme est mené en collaboration avec le ministère de l'Intérieur. Nous aspirons à rouvrir tous les jardins d'enfants municipaux, et qui étaient au nombre de 350. En 2015/ 2016, nous avons réussi à en reprendre sept, relevant des gouvernorats de Nabeul, de Monastir, de Mahdia et de Kairouan. Cette année, nous misons sur la réhabilitation de 13 institutions relevant du Grand-Tunis, du Kef, de Bir Lahfay, de Gabès et de Siliana», souligne la responsable. Encore faut-il noter que les gouvernorats de Kairouan, de Kasserine et de Sidi Bouzid, lesquels se caractérisent par les plus faibles taux de couverture en éducation préscolaire, représentent les régions prioritaires en matière de réhabilitation des jardins d'enfants municipaux. Parallèlement, les manches se retroussent dans l'optique de réviser les programmes et de la formation des animateurs de l'enfance et de l'encadrement préscolaire spécifique à la tranche d'âge 3/6 ans.