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«Je n'ai pas d'alignement idéologique figé et j'assume mes choix»
Entretien avec: Mahdi Ben Gharbia, Ministre CHARGE des Relations avec les Instances constitutionnelles, la Société civile et Des Droits de l'Homme
Publié dans La Presse de Tunisie le 21 - 05 - 2017

Tout un socle législatif est à lancer cet été, à l'instar des lois portant création des instances constitutionnelles et de leur socle commun, ainsi que d'une nouvelle loi organique pour les associations, et une autre suivra pour les partis politiques. Recadrer le débat public est une nécessité pour dépasser les petites querelles politiques et résoudre les vraies problématiques, c'est ce que préconise Mahdi Ben Gharbia pour pouvoir avancer davantage sur les plans social, économique et politique. Lui qui est l'un des sapeurs-pompiers du gouvernement d'union nationale croit en une autre chance pour que les politiques tunisiens redressent la barre du débat public... Il nous a accordé cette interview
Pour ce qui est des grands chantiers de votre département, les instances constitutionnelles en sont une grande partie. Où en est-on actuellement ?
Quand il a été décidé au gouvernement d'union nationale de garder le ministère chargé des relations avec les instances constitutionnelles, la société civile et des droits de l'Homme, c'était un message clair, à savoir qu'en cette période de transition, on a besoin d'un ministère pareil. Un ministère politique qui va installer et asseoir les instances constitutionnelles qui ont été imaginées dans la Constitution comme un contre-pouvoir; un contre-pouvoir qui est dans l'Etat, inhérent à l'Etat. C'est un contre pouvoir pour la pérennité du processus démocratique et pour éviter de faire machine arrière. Ce ministère gère ces relations mais aussi il est là pour créer ces instances et faire le suivi de ce processus. Aujourd'hui, il y a une loi sur le socle commun qui a été déposé à l'Assemblée des représentants du peuple, qui est une loi sur le texte juridique initial et commun à toutes les instances et qui va être bientôt examiné par la commission concernée. Aussi, il y a la loi sur l'instance des droits de l'Homme qui est également déposée à l'ARP. Peut-être bien que dès qu'on finit avec la loi sur la lutte contre la violence envers les femmes, elle sera examinée. Et on a la loi sur l'instance de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, qui a été validée par la commission et qui va passer en plénière. Cette loi dote l'instance de mécanismes importants à même de lui permettre d'entretenir des travaux tels que l'investigation, la mise en examen et la saisie en tout ce qui est affaires de corruption, et ce grâce à des prérogatives d'une police judiciaire. De même, on va doter le conseil de l'instance et son président des mêmes prérogatives sans aucune autorisation judiciaire préalable et en cela on s'est basé sur une jurisprudence à partir de la Constitution ainsi que la volonté du gouvernement et à sa tête le chef du gouvernement, Youssef Chahed, de lutter contre la corruption.
Nous espérons que d'ici les vacances parlementaires, ces trois lois seront votées à l'ARP. Aussi, on a la loi sur la Haute autorité indépendante de la communication et de l'audiovisuel, la Haica, qui nécessitera un Conseil ministériel restreint à la fin du mois. Et il y a une dernière instance sur laquelle nous travaillons qui est celle du développement durable et des droits des prochaines générations.
Le ministère a été créé pour asseoir tout ce socle et on le fait avec une approche participative, ce qui est stipulé dans la Constitution qui impose un régime démocratique participatif. On est aussi facilitateur du travail de l'ensemble des instances, qu'elles soient constitutionnelles ou pas, avec lesquelles on a un contact permanent à l'instar de l'instance de prévention de la torture...
Pour rester dans ce volet participatif, il y a le deuxième volet du travail du ministère; les relations avec la société civile. Aujourd'hui, la société civile n'est plus celle qui était fustigée, soit dans l'opposition, soit asservie. Désormais, elle a un rôle important et primordial dans la philosophie même de l'après-Révolution. L'instauration de la deuxième République repose sur sa participation. Elle ne doit pas s'arrêter à un rôle de proposition ou de critique mais plutôt une participation dans la création de la richesse et de l'opinion publique en tant que contre-pouvoir réel qui n'est pas dans la contestation mais dans la proposition et la participation. D'ailleurs, quand les politiques en Tunisie n'étaient pas sur une même longueur d'onde en 2013, c'était un peu la société civile qui a géré ce différend. Donc cette relation avec la société civile est importante. C'est un volet de communication, d'interaction, de participation, mais aussi on est en train de travailler sur le cadre légal de cette vie publique. Ainsi et à part le travail sur les instances constitutionnelles, on travaille sur une nouvelle loi sur les associations qui va remplacer le décret-loi 88, même s'il y a une opposition de la société civile au changement de ce décret-loi en ayant comme seul prétexte que dans ce dernier, il y a beaucoup de liberté. Il existe ainsi une appréhension, une suspicion et une crainte de cette loi organique, qui est nécessaire puisque la Constitution a imposé que les lois régissant les associations et les partis politiques soient des lois organiques.
Certaines associations ont formulé des craintes par rapport à la nouvelle loi. Et en parlant d'associations, le problème du financement étranger est source de plusieurs critiques, alors que la transparence n'est pas encore au point et le contrôle fait défaut. Qu'en pensez-vous ?
Ce que je peux dire, c'est que nous sommes dans une démarche participative et nous faisons beaucoup de dialogue mais on sait qu'on doit avoir une nouvelle loi sur les associations. Premièrement, c'est une nécessité constitutionnelle, deuxièmement, il faut permettre par la loi des formes juridiques nouvelles telles que les fondations. C'est permettre aussi aux ONG et à l'associatif international de s'installer en Tunisie en ayant des représentations dans un cadre légal souple.
Tout cela va permettre de faire de la Tunisie une petite plateforme de l'associatif et de créer de la richesse. Troisièmement, on peut ainsi diminuer les tracas administratifs et c'est pour cela qu'on est en train de réfléchir, et ce sera une première, à inclure dans cette loi une plateforme électronique qui gérera tout l'associatif. Aujourd'hui, on parle de dix-huit mille associations, un chiffre en dessous de ce qui devrait être. Pour renforcer l'associatif, on ne peut pas compter sur les instances actuelles avec toute la bureaucratie administrative lourde existante. Pour cela, nous imaginons de faire une plateforme électronique inscrite dans la loi à travers laquelle on enregistre son association, dépose ses documents, l'administration y répond, les instances de contrôle y trouvent les documents et rapports financiers nécessaires... Pour ce qui est du financement étranger des associations, cela fera l'objet d'un débat qu'on va ouvrir autour de la loi sur les associations. Et tout ce chantier devra être entamé d'ici peu. Le problème n'est pas le financement étranger en lui-même, puisqu'on est dans une ère d'ouverture à l'international et on veut que les gens aident la société civile. Il faut connaître les sources de ces financements dans une transparence totale, avec un système de contrôle bien défini.
Cette plateforme devra être un espace ouvert au public à travers lequel le public et la société civile font un autocontrôle. C'est sur cette perspective qu'on est en train d'avancer.
Les partis politiques sur la même lancée !
Même chose pour les partis politiques. C'est que pour effectuer un renouvellement de la vie publique, il faudrait avoir un nouveau cadre sur la vie associative mais aussi il y a un décret-loi portant sur les partis politiques qui doit être changé puisque la Constitution y impose une loi organique. Dans ce sens, nous avons commencé à communiquer avec tous les partis politiques. Désormais, on compte 206 partis politiques et le nombre est beaucoup moindre pour ceux qui respectent la communication de leurs rapports et bilans financiers ainsi que les mises à jour demandées.
Aujourd'hui, il faut revoir tout le paysage politique en Tunisie. On va commencer un dialogue avec les partis politiques et on va travailler sur un nouveau cadre juridique et une nouvelle loi sur les partis politiques. Une loi qui va améliorer le décret-loi et qui va demander aux partis de respecter la Constitution et ses acquis, notamment dans leurs statuts. Aussi va-t-elle renforcer les critères de transparence sur le financement public. Là-dessus, nous avons communiqué avec le ministère des Finances pour activer les critères financiers inscrits dans le décret-loi et qui n'ont jamais été respectés. On a demandé à tous les partis politiques de déposer leurs bilans certifiés conformes à la Cour des comptes et à la présidence du gouvernement.
On est en train d'activer la commission mixte entre la Cour des comptes, le tribunal administratif et l'Ordre des experts-comptables, afin de préparer les rapports pour les rendre publics par la suite.
Quatrièmement, on va discuter le financement public des partis politiques. On ne peut pas parler de partis politiques, qui sont un pilier de la vie publique, sans un financement public. Aujourd'hui, il y a un financement des campagnes électorales et non pas un financement public !
Nouveau code de la presse à débattre !
Nous travaillons sur d'autres lois qui gèrent l'espace public dont un nouveau code de la presse et une nouvelle loi sur l'audiovisuel. Ce code et cette loi sont aussi importants que les autres lois.
Pour le décret-loi 115 relatif à la liberté de la presse, on a commencé, dans une approche participative, par un brouillon fait par le Syndicat national des journalistes tunisiens. Avec le syndicat des directeurs de journaux, on s'est dit que ce brouillon pourrait être un commencement sur lequel on va travailler. On est réceptifs à l'idée du Conseil de la presse, et d'ailleurs je recevrai bientôt les membres de son conseil. On est réceptifs pour le mettre dans le cadre de la loi mais aussi on est en train d'entamer un dialogue sur son rôle. Est-ce qu'il sera uniquement dans la déontologie, ou bien il sera dans l'autorégulation, ou encore aura-t-il un jour un pouvoir de régulation? On va dialoguer autour de tout cela. Certes la liberté d'expression et de la presse est un acquis, et on est d'accord pour la reconduction du 115 dans sa partie stipulant qu'il ne pourrait pas avoir de peine d'emprisonnement. Cependant, il faudrait qu'il y ait des sanctions pour ceux qui commettent des dépassements graves et qui en usent à des fins loin de tout professionnalisme ou autres. C'est à débattre avec les syndicats.
Les instances, notamment constitutionnelles, vivent des moments de crise. Est-ce qu'elles doivent dépendre des personnes pour bien fonctionner ?
Les instances constitutionnelles, on les a imaginées dans la Constitution avec des prérogatives réelles de peur de faire marche arrière parce que l'Etat n'est pas fort et n'a pas encore de traditions de démocratie. Si on avait ces traditions de démocratie, on n'aurait pas besoin d'instance pour les élections! Pour nous, ce n'est pas le cas et il y a un manque de confiance en l'Etat ou l'exécutif. Ces instances ou «institutions» ne dépendent, normalement, de personne... Mais dans les premières périodes elles dépendent un peu de leurs figures emblématiques.
Je suis navré pour ce qui s'est passé au niveau de l'Isie parce que ce n'est pas le bon moment pour un tel différend. Je trouve que quels que soient l'importance du différend et les raisons, ceux-ci sont vraiment secondaires par rapport à l'importance de cette instance. Et malheureusement, tout cela porte le discrédit sur cette instance-là, alors que le crédit est important pour nous. Aujourd'hui, le processus est le plus important et je reste navré pour ce qui s'est passé et qu'il soit une leçon pour nous tous.
La Haica permanente
Pour la Haica, l'actuelle est provisoire et désignée, et la prochaine sera élue par l'ARP. Il y avait une crainte de part et d'autre. Nous avons proposé une solution médiane avec neuf candidats dont trois proposés par les trois syndicats de la profession, deux juges proposés par le Haut conseil de la magistrature, et quatre candidatures libres. C'est le Conseil constitutionnel qui les choisit parmi les multiples candidatures dont quatre proposées par les syndicats et qui ne doivent pas être de leurs structures. Le conseil de la magistrature propose huit candidats pour les deux postes de juges. Le vote à l'ARP serait par majorité renforcée.
De même, il y aura une loi sur l'audiovisuel qui permettra un paysage audiovisuel pluriel et transparent. Cependant, une radio ou une chaîne de télévision qui ne gagne pas d'argent est suspecte ! Il faut donc donner des moyens à l'audiovisuel pour faire de l'intégration et de la croissance. Le paysage audiovisuel est en train, aujourd'hui, de changer de support vers le Net ! Il y a un code électronique qui est en cours de préparation. En termes de régulation du secteur de l'audiovisuel, il faudrait intégrer ces paramètres qui vont changer le paysage d'ici dix ou quinze ans...
Le respect de certains droits et la préservation des droits des minorités font encore l'objet de critiques. Quels sont les mécanismes et les procédures entamés pour améliorer cette situations entachée d'abus, notamment commis par l'appareil exécutif et qui nourrit bien des craintes ?
Pour les droits de l'Homme, une bonne partie de la société civile travaille sur ce volet et s'en félicite. On a la Constitution qui préserve tous les droits et on a signé et ratifié la plupart des conventions des droits de l'Homme. Là-dessus, il y a un grand travail à faire ! Il y a eu une révolution dans le régime politique mais la vraie révolution est celle de la culture de la citoyenneté.
Droits de l'Homme, harmoniser les textes
La Constitution repose sur les valeurs de citoyenneté, d'équité, de respect des différences en tous genres, etc. Pour moi, en matière de citoyenneté, il y a tout un héritage culturel et une mémoire collective qui doivent être relus au diapason de la Constitution mais aussi des conventions internationales qu'on a signées.
Là, il y a tout un travail d'harmonisation, ce que nous avons engagé par la voie d'un comité interministériel. Une harmonisation de toutes les lois avec les deux dernières références constitutionnelles et les conventions internationales et on a créé aussi un comité global d'harmonisation pour sensibiliser les ministères qui doivent commencer à faire cette harmonisation, notamment en revisitant les lois.
Sur un autre plan, il y a la rédaction et le suivi des rapports de l'Etat tunisien envers le Conseil des droits de l'Homme et envers les conventions signées. En septembre, on avait présenté le rapport sur les droits socioéconomiques et on vient de présenter, en mai, le troisième rapport universel de l'Etat tunisien. Pour ce, nous avons créé un comité interministériel de rédaction et de suivi des recommandations et des rapports onusiens afin de les répercuter sur le volet juridique, mais aussi au niveau de l'activité de ministères, leurs procédures et autres. Cela touche les diverses conventions que nous avons signées contre la torture, les droits de l'enfant, le sida, etc. C'est un travail perpétuel. Actuellement, on est en train de travailler sur le rapport des droits civils et politiques, ainsi que celui des droits de l'enfant et l'an prochain celui portant sur le sida. Parmi d'autres avancées en matière de droits de l'enfant, la Tunisie s'est classée 9e mondial sur 163 nations signataires de la Convention onusienne des droits de l'enfant avec un très respectable score de 0,867 et ce lors du dernier « The Kids Rights Index » 2017 (dixième en 2016). Un classement qui reflète les efforts fournis par notre pays en matière de renforcement des droits de nos enfants.
Loi contre la discrimination raciale
Notre ministère doit être quelque part la conscience de ce gouvernement en matière de droits de l'Homme et on intervient à chaque fois qu'il faut intervenir. C'est le cas dans certains abus, tout en restant interactifs avec les organisations nationales et internationales à l'instar d'Amnesty et autres. De même, on a eu des séances avec le ministère de l'Intérieur. Nous pensons qu'en Tunisie, il y a une véritable volonté politique de ce gouvernement et du chef du gouvernement, et tous les rapports des ONG nationales qu'internationales nous intéressent et nous les voyons d'un bon oeil car ils nous aident à changer. On ouvre des enquêtes et on traduit en justice des gens s'ils sont impliqués dans des actes d'abus. Et on change les lois et on met les procédures adéquates pour que ces abus ne se reproduisent plus. Nous sommes intervenus dans certains cas d'agression dont celles des étudiants africains et là, en début de semaine, on propose au gouvernement une loi contre la discrimination raciale qui sera adoptée durant ce mois par le Conseil des ministres.
La réconciliation, est-ce un processus global, ou va-t-on la segmenter en une réconciliation administrative et une autre économique ? Et qu'en est-il du processus de décentralisation ?
En Tunisie, on a dégagé un consensus sur la réconciliation et le but même de l'IVD est d'y parvenir. C'est que le principe est qu'on fasse notre reddition des comptes, qu'on avoue les abus, qu'on se réconcilie et qu'on demande pardon... C'est le processus ! On a vécu des dépassements auparavant. Moi personnellement, j'étais emprisonné quand j'étais jeune. Mais il faudrait que nous discutions de tout cela et par la suite, il faut faire le deuil aussi !
Le processus de réconciliation, on est tous d'accord sur le principe. L'IVD, par exemple, dispose d'un mandat et elle a des milliers de dossiers entre les mains. Il faut imaginer ce qu'on doit faire. Le président de la République a formulé cette proposition, qui était d'ailleurs une de ses promesses électorales. Il a vu en cette loi une solution. Puis, il l'a passée à l'ARP, ce qui relève de ses prérogatives. Puis la question est devenue un débat public mais ça doit rester dans la perspective du but principal de la réconciliation. Mais l'affaire a été instrumentalisée politiquement pour de petites batailles politiciennes ! C'est le même cas de ce qui a été fait de l'IVD. A mon avis, il faudrait parler clairement de cela d'une manière franche et sans tabou, qu'on soit avec ou contre... Indépendamment des petits calculs politiques, c'est un processus dont on a besoin. Moi j'ai voté l'IVD, je suis pour la réconciliation et je suis pour qu'on discute de cette loi dans son cadre mais qu'on n'en fasse pas un cheval de bataille !
Pour le reste et les détails de cette réconciliation, cela doit être dégagé du débat à engager autour d'elle.
Décentralisation, un processus progressif
Pour ce qui est de la décentralisation, aujourd'hui, il y a le code des collectivités locales qui sera examiné par l'Assemblée des représentants du peuple sur le principe de l'organisation des élections municipales en décembre 2017. Bien sûr, nous devons entreprendre le processus de décentralisation parce qu'il a démontré son efficience partout dans le monde, mais c'est un processus qui est lent aussi ! L'Etat, qui est de nature très conservateur et centralisateur, va déléguer progressivement des prérogatives. Cela doit être fait en commençant par l'adoption du code des collectivités locales, puis il y aura, d'ici les législatives, les élections des conseils régionaux, et c'est là que les régions et les communes vont réellement administrer les affaires régionales. Cela va permettre une meilleure efficience dans le développement des régions, la formulation des priorités, la gestion des ressources, etc.
Mahdi Ben Gharbia, en député ou en ministre, est très actif et est considéré comme l'un des sapeurs-pompiers du gouvernement d'Union nationale. Comment voyez-vous ce « statut » et quelles sont les questions d'urgence à intégrer dans le débat public en cette période ?
L'action politique, je l'ai commencée trop jeune. J'ai appartenu à un parti islamiste que j'ai quitté parce que je ne croyais plus à son assise politique mais cela fait vingt-quatre ans ! J'étais rattrapé par mon passé et j'étais emprisonné. Quand je suis sorti, j'ai vécu ce que mon pays a vécu, par contre je n'ai pas pleurniché. J'ai travaillé et j'ai gagné ma vie. Et ça c'est ma réussite personnelle dont je suis fier.
J'ai toujours travaillé en pensant à refaire de la politique parce que c'est un engagement que j'ai envers mon pays et que je porte en tant que responsabilité personnelle afin de le préserver comme mes parents l'avaient fait auparavant. L'action politique c'est ma vocation depuis toujours. Aussi, j'ai réussi ma vie professionnelle, même si cela n'était pas facile, et cela démontre qu'on peut réussir dans notre pays en étant «clean» et je crie cela depuis des années. Même si j'étais diffamé auparavant, je garde mes valeurs et mes positions. Je n'ai pas d'alignement idéologique figé et j'assume mes choix. Je n'ai pas le complexe du «RCD» car je n'ai jamais appartenu à ce parti ni à son système. Ces gens-là m'avaient emprisonné et pourtant je n'ai pas de rancune... Aussi, je n'ai pas de complexe du côté d'Ennahdha. J'ai milité contre ce mouvement alors qu'il était au pouvoir, parce qu'on devait changer mais une fois qu'on a fait des compromis, j'étais contre l'exclusion, et je le suis depuis toujours. Après les diverses crises, on est parvenu à ce compromis historique autour d'un gouvernement d'union nationale, car le pari, actuellement, est de savoir vivre tous ensemble. Les gens du RCD doivent comprendre que la démocratie est une nécessité et qu'ils peuvent mieux vivre avec une démocratie. De même, les islamistes ont à comprendre que la Tunisie ne peut qu'être démocratique et pluraliste. Tout cela ne peut qu'amener la Tunisie dans une politique centriste.
Recadrer le débat public
On a perdu quelques années sur un débat sociétal mais qui est important. Comme gouvernement d'Union nationale et à sa tête le chef du gouvernement, Youssef Chahed, on a réussi en huit mois à mener le débat public qu'il faut pour cette période, autour de questions primordiales dont la croissance, l'emploi, les réformes, les caisses sociales, etc. Cela n'était pas le cas auparavant. Malheureusement, il y a des gens qui, aujourd'hui, veulent ramener le débat vers des sujets qu'ils utilisent pour des fins électorales, comme « où est le pétrole ?», « on est encore colonisé », « non à la réconciliation car elle est un retour du régime déchu », etc. Or le danger pour le pays n'est pas ça ; c'est les six cent mille chômeurs, les deux millions d'exclus vivant en dehors du système. C'est ça l'enjeu réel ! Je pense que ce gouvernement d'Union nationale est parti au-delà des clivages et traite des véritables problèmes des Tunisiens en proposant des solutions. Oui, on est quelque part des sapeurs-pompiers, car il faut apaiser la situation sociale car nous comprenons la frustration des gens qui voudraient en parler. Nous trouvons des solutions qui ne doivent en aucun cas prendre en otage tout l'avenir du pays et donner ce que nous n'avons pas, car cela enflammerait d'autres régions. Avant, il y avait une croissance aux alentours de 5 %, mais elle était mal répartie. Les dernières années, on ne créait plus de richesse ! Il faudrait trouver un véritable plan pour les régions défavorisées. Il faudrait être créatif. Et là dessus on travaille pour que ce soit l'effort de tout le monde.
Actuellement, nous travaillons pour installer une croissance pérenne dont les richesses seront réparties équitablement. Pour cela, on a besoin de stabilité et de réformes que nous avons entamées. On a besoin d'une certaine maturité politique et que nos politiques dépassent les petites querelles et voient plus grand l'avenir du pays


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