Par Jalel MESTIRI Au-delà des salaires élevés et de la place grandissante occupée par l'argent dans le sport, les footballeurs doivent rester associés aux valeurs de plaisir, de dépassement de soi et de partage. Les chiffres font tourner la tête. Des salaires déconnectés de la réalité du marché suscitent la polémique et alimentent la controverse. Les interrogations sur les salaires des footballeurs sont d'une actualité qui accompagne chaque période des transferts. Des interrogations liées tout particulièrement à l'utilité sociale. Celle à laquelle s'identifie le footballeur est-elle plus appropriée et plus digne que celle d'autres activités? Pour répondre à ces questions, des précisions s'imposent. D'abord, l'utilité d'un salarié se mesure par ce qu'il rapporte financièrement, mais aussi par ce qu'il rapporte socialement. Cela, on n'arrive plus à le mesurer. L'utilité sociale est devenue négligeable. Notre société a dévié vers une valeur du travail purement basée sur un critère financier. Ensuite, tous les sportifs ne gagnent pas des sommes mirobolantes. Le déséquilibre est plus qu'évident. L'inflation des salaires des sportifs contribue à accroître les inégalités de revenus. Selon les chiffres de «France Football» parus le 28 mars 2017, Cristiano Ronaldo est le footballeur le mieux payé en 2016-2017 avec 87,5 millions d'euros, devant son grand rival, l'Argentin Messi, 76,5 millions d'euros. Aussi, les sports ne sont pas tous logés à la même enseigne: un athlète ne gagne pas autant qu'un handballeur. Ce dernier n'est pas mieux loti par rapport au footballeur: les salaires des footballeurs sont sans commune mesure avec ceux des autres disciplines. Cependant, il ne s'agit point d'émergence, ni d'accentuation, mais plutôt de la consécration d'un dualisme sur le marché entre deux catégories de joueurs. Celle des stars et celle des joueurs ordinaires. Le football génère de plus en plus d'argent, mais les footballeurs doivent en profiter avec des limites et selon certaines conditions. La politique salariale mise en place dans la scène sportive, ces dernières années, n'est pas vraiment égalitaire. Certains clubs ont déclenché une dimension et une pointure que peu d'autres peuvent réellement suivre, et encore moins atteindre. Les salaires de beaucoup de joueurs ne supportent pas la comparaison. Ils peuvent atteindre dans certains cas dix fois celui d'un joueur ordinaire. Enfin, la carrière d'un footballeur est courte, (10 à 12 ans). Beaucoup vivent aujourd'hui sous le seuil de la pauvreté malgré les titres et les consécrations. En l'absence de récompense et de reconnaissance, ils sont victimes de grands problèmes financiers. Des carrières brèves et une dure reconversion. Au-delà des salaires élevés et de la place grandissante occupée par l'argent dans le sport, les footballeurs doivent rester associés aux valeurs de plaisir, de dépassement de soi et de partage. On le sait et on en est de plus en plus convaincu : le footballeur fait vendre, il représente le rêve, le plaisir, la performance sportive. Mais aussi, et surtout, un modèle à suivre pour la société. Il est donc nécessaire aujourd'hui de mettre un terme aux dépenses démesurées des clubs, notamment dans l'achat de joueurs. Il est aussi temps de fixer des plafonds salariaux aux clubs en fonction de leurs revenus et les contraindre à plus de transparence quant aux dépenses. Les revenus des clubs détermineront les plafonds des salaires. Les plus dépensiers pourront par exemple investir à hauteur proportionnelle dans la formation de jeunes joueurs.