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Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 08 - 2017

En vue du renvoi du projet de loi organique n°60-2016 relatif aux violences faites aux femmes dans ses dispositions traitant des relations sexuelles avec des mineurs
Par Hatem KOTRANE*
L'Assemblée des représentants du peuple (ARP) a adopté, mercredi 26 juillet 2017 en plénière, le projet de loi organique n°60-2016 relatif aux violences faites aux femmes, et ce, à l'unanimité des 146 députés présents.
Un engagement constitutionnel tenu
La plupart des députés, mais également des militant(e)s des droits humains, ont salué, à juste titre, ce projet de loi qui, surmontant les divergences politiques et idéologiques, représente, véritablement, une "révolution législative", en permettant de donner effet à l'engagement de l'Etat, inscrit à l'article 46, alinéa 4 de la Constitution, de prendre « ...les mesures nécessaires en vue d'éliminer la violence contre la femme » et de préserver, ainsi, la dignité humaine de la femme, de l'enfant, de la famille et de la société tunisienne dans son ensemble de toutes les formes de violence.
L'auteur de ces lignes ne peut que s'associer à cet acquis national et l'approche globale adoptée qui va de la prévention de la violence aux poursuites pénales, sans omettre la protection et l'assistance des victimes. Adopté à la suite de discussions houleuses, le projet de loi a dû être réexaminé après une première adoption, à la demande du gouvernement, en vue de réviser ses dispositions relatives à la protection des enfants contre les violences sexuelles, notamment celles portant révision des articles 227 et 227 bis du Code pénal, le premier relatif au viol, le second aux atteintes sexuelles sur un enfant de sexe féminin.
Un objectif louable
Le point de départ, convient-il de le rappeler, était lié à l'émotion suscitée dans notre pays à la suite de la décision du Tribunal du Kef d'arrêter les poursuites engagées contre un homme ayant fait subir l'acte sexuel à une fille de 13 ans, enceinte de trois mois, et de l'autoriser à épouser sa victime. On découvrait alors avec indignation que la violation des droits de l'enfant était autorisée par la loi pénale elle-même, en l'occurrence l'article 227 bis du Code pénal, qui punit d'emprisonnement pendant six ans celui qui fait subir, sans violence, l'acte sexuel à un enfant de sexe féminin âgé de moins de quinze ans accomplis, en ajoutant toutefois que « le mariage du coupable avec la victime...arrête les poursuites ou les effets de la condamnation ...».
Le projet de loi discuté par l'ARP avait donc pour apport principal de réviser ces dispositions de l'article 227 bis du Code pénal, ainsi que celles de l'article 239 du même Code, traitant de l'infraction de détournement ou d'enlèvement commise sans fraude et qui ajoutait lui-même à la confusion en disposant que « le mariage de l'auteur de l'infraction avec la fille qu'il a enlevée a pour effet la suspension des poursuites, du jugement ou de l'exécution de la peine ».
La révision, dans sa première mouture, était pertinente et portait, notamment, abrogation des dispositions des articles 227 bis et 239 du Code pénal autorisant les agresseurs à laver leurs crimes dans le propre sang de leurs victimes. En même temps, le projet de loi élargissait utilement l'infraction d'abus sexuel aux enfants de sexe masculin donnant ainsi effet aux observations finales du Comité des Nations unies des droits de l'enfant, faites à l'issue de l'examen, le 4 juin 2010, du troisième rapport périodique de la Tunisie sur l'application de la Convention des droits de l'enfant, où ledit Comité « ... note avec préoccupation que l'article 227 bis du Code pénal, qui interdit de faire subir − même sans violence − l'acte sexuel à un enfant...ne fait référence qu'aux enfants de sexe féminin et ne protège donc pas expressément les garçons contre pareil acte ». Le Comité, en conséquence, « ...recommande à l'Etat partie...d'amender l'article 227 bis du Code pénal afin d'interdire expressément de faire subir − même sans violences − l'acte sexuel aussi bien aux filles qu'aux garçons ... » (CRC/C/TUN/CO/3, 16 juin 2010, Paras. 61-62).
Mais le projet de loi soumis à l'ARP suggérait plus ! Une révision des dispositions de l'article 227 du Code pénal était, en même temps, proposée en vue de redéfinir le crime de viol, puni de mort en l'état actuel lorsqu'il est commis avec violence, usage ou menace d'usage d'arme ou lorsque la victime est une personne âgée de moins de 10 ans accomplis, et d'emprisonnement à vie, lorsque le crime de viol est commis en dehors des cas précédents.
La révision de l'article 227 introduite par le projet de loi est, globalement, pertinente :
- Le crime de viol est défini comme étant tout acte entraînant la pénétration sexuelle, quelle que soit sa nature et la méthode utilisée contre un mâle ou une femelle sans son consentement ;
- Le crime de viol est, ainsi, utilement étendu aux victimes de sexe masculin;
- La peine de mort est remplacée par une peine de réclusion de 20 ans et est portée à la réclusion à perpétuité dans les cas les plus graves, à savoir quand le crime de viol est commis avec violence, usage ou menace d'usage d'arme, avec utilisation de produits ou comprimés ou médicaments dopants, ou lorsqu'il est commis même sans usage des moyens précités sur une personne âgée de moins de 10 ans accomplis ou encore — innovation utile — en cas d'inceste.
La dérive
Elle provient du fait que le projet de loi, alors qu'il faisait consensus entre les différents groupes parlementaires, a dû être repris à la demande du gouvernement, après adoption, sous la pression de nombre d'ONG lui reprochant d'avoir maintenu, en même temps, une disposition jugée « scandaleuse » du même article 227, celle aux termes de laquelle « le consentement est considéré comme inexistant lorsque l'âge de la victime est au-dessous de treize ans accomplis.». On oubliait, au passage, que cette disposition de l'article 227 ne visait nullement à définir un « âge de consentement sexuel », une « majorité sexuelle » à partir de laquelle un mineur civil peut entretenir une relation sexuelle avec un adulte n'ayant pas autorité sur lui, mais bien un « âge de non-consentement sexuel » en deçà duquel toute relation sexuelle avec un mineur est non seulement réprimée, mais sera considérée comme relevant du crime de viol, ainsi défini par l'âge de la victime, indépendamment des moyens utilisés et autres circonstances de la cause.
Le même article 227 aurait pu être libellé de la façon suivante et n'aurait alors, probablement, pas suscité autant d'indignation : « Le viol est considéré dans tous les cas comme établi lorsque l'âge de la victime est au-dessous de treize ans accomplis ». C'est le sens des paliers d'âge différents, ainsi souvent utilisés en droit comparé, où les peines encourues en cas d'infraction sont ainsi graduées en fonction de l'âge de la victime. Le texte de l'article 227 lui-même, finalement adopté par le projet de loi, considère ainsi, à juste titre, l'âge inférieur à 10 ans comme circonstance particulièrement aggravante portant la peine encourue par l'agresseur sexuel à la réclusion à perpétuité.
Au final, dans la confusion totale ajoutant à la précipitation, « l'âge de non-consentement sexuel » est élevé à 16 ans, avec une double conséquence :
- Toute relation sexuelle avec un enfant de moins de 16 ans est présumée – de manière irréfragable – comme étant un viol au sens de l'article 227 (nouveau) du Code pénal, tel que finalement adopté par le projet de loi, et ce, alors même que la victime est consentante, son consentement étant désormais considéré comme inexistant dans tous les cas ;
- L'article 227 bis (nouveau) est lui-même repris par le projet de loi et ne couvre plus, dès lors, au titre de l'interdiction des relations sexuelles avec un mineur, que le cas de celui qui fait subir, sans violence, l'acte sexuel à un enfant âgé de moins de dix-huit ans et de plus de seize ans accomplis.
Première confusion : tous violeurs, tous violés !
Que le projet de loi ait maintenu l'interdiction de toute relation sexuelle avec un mineur (moins de 18 ans), la chose en soi peut trouver quelque explication ! On aura retenu ainsi que la « majorité sexuelle » en Tunisie, avant comme après le projet de loi adopté par l'ARP, est fixée à l'âge de la majorité civile, fixée désormais à 18 ans, depuis la loi n° 39-2010 du 26 juillet 2010 portant uniformisation de l'âge de la majorité civile.
La confusion provient essentiellement du fait qu'en relevant «l'âge de non-consentement sexuel», entendu comme présomption irréfragable constitutive du crime de viol à 16 ans accomplis, le projet de loi va bien plus loin qu'une simple interdiction de relations sexuelles avec des mineurs, en qualifiant désormais de telles relations entretenues avec les moins de 16 ans comme étant constitutives de viol, de sorte que toutes les personnes, y compris les enfants mineurs eux-mêmes — on y reviendra ci-dessous — , ayant eu de telles relations sont désignées comme « violeurs » et tous les enfants de moins de 16 ans comme « violés », alors même que l'enfant lui-même peut avoir donné son consentement à l'acte sexuel ! Le défenseur des droits de l'enfant que je prétends modestement être depuis plus de trente ans, de surcroît le plus ancien membre du comité des Nations unies des droits de l'enfant, trouve une telle option comme étant manifestement exagérée et, contrairement à ce qui a été avancé, elle n'est nulle part consacrée en droit international et en droit comparé, où la loi fixe habituellement des paliers d'âge différents et distingue nettement entre l'absence de « majorité sexuelle » et « l'âge de non-consentement sexuel » qui constitue une des circonstances aggravantes et où l'âge de la victime est généralement fixé à un niveau assez bas et, en toute hypothèse, inférieur à l'âge de la majorité sexuelle.
En France, par exemple, la majorité sexuelle est déduite de l'article 227-25 du Code pénal qui la fixe à 15 ans. Ce sont les plus de 18 ans seuls qui sont concernés par l'interdiction des relations sexuelles avec des moins de 15 ans et, en cas d'infraction à cette règle, ils sont punis de cinq ans d'emprisonnement maximum, sans que cela autorise à qualifier de telles relations de viol. L'«âge de non-consentement sexuel» est fixé en pratique au-dessous de 12 ans par les tribunaux correctionnels français, qui invoquent la notion d'« absence de consentement éclairé » et utilisent l'argument de la « surprise » contenu dans le Code pénal afin de pouvoir qualifier l'agression.
La majorité civile dans les autres pays européens est, également, généralement fixée à un âge inférieur à l'âge de la majorité civile (14 ans en Albanie, Autriche, Bulgarie, Allemagne, Italie, etc.), (15 ans en Croatie, République tchèque, Danemark, Grèce, Monaco, Suède, etc.), (16 ans en Belgique, Espagne, Finlande, les Pays-Bas, Norvège, Suisse, le Royaume-Uni, etc.). Seuls Malte, la Turquie et le Vatican la fixent à 18 ans! Dans tous ces pays, l'«âge de non-consentement sexuel» est par contre fixé à un niveau plus bas. En Belgique, par exemple, l'âge de majorité sexuelle étant fixé à 16 ans pour tout acte sexuel, les actes sexuels avec les adolescents de 14 ou 15 ans sont illégaux, avec cette précision que les relations sexuelles sont considérées comme viol si elles interviennent avec des enfants âgés de moins de 14 ans. Les peines encourues en cas d'infraction sont ainsi graduées en fonction de l'âge de la victime, selon des paliers fixés à 10, 14 et 16 ans. Dans les pays du Maghreb et de l'Afrique du Nord, la majorité sexuelle est fixée à 18 ans au Maroc et en Egypte, à 16 ans en Algérie et en Mauritanie, tandis que la plupart des pays du Golfe interdisent toute relation sexuelle hors mariage.
Une solution singulière et extrême
La singularité de la solution tunisienne, encore une fois, n'est pas ainsi d'avoir fixé la majorité sexuelle à 18 ans, mais bien d'avoir qualifié toute relation avec un mineur de moins de 16 ans comme un cas de viol ! Solution unique et extrême qui ne nous semble pas de nature à prévenir les atteintes aux droits de l'enfant, sachant que l'enfant lui-même ainsi reconnu par une décision pénale comme ayant été « violé » risque d'entretenir des stigmates et autres séquelles psychologiques durables qui ne servent pas forcément ses intérêts ! Convient-il de rappeler, à cet égard, que dans ce domaine comme dans bien d'autres, « seules sont exemplaires les peines proportionnelles à la gravité des délits, parce que les justiciables savent qu'étant équitablement établies, elles seront prononcées et exécutées, tandis que les peines qui ne sont pas en rapport avec la faute, loin de produire l'effet d'intimidation recherché, demeurent à l'état de ridicules épouvantails et énervent la répression » (M. Patin, Revue de science criminelle, 1949, p. 218.)!
Deuxième confusion :
les enfants « agresseurs sexuels » ?
L'autre confusion ainsi introduite par l'article 227 (nouveau) du projet de loi, tel que repris et finalement adopté par l'ARP, résulte du fait que l'enfant lui-même peut être reconnu comme « agresseur sexuel » et puni pour viol lorsque son partenaire sexuel est âgé de moins de 16 ans! Contrairement à l'article 227 bis (nouveau) traitant dans des termes tout autant confus – on y reviendra ci-dessous – de relations sexuelles illicites exercées, sans violence, sur un mineur âgé entre 16 et 18 ans et où un régime spécial a été aménagé lorsque l'infraction est commise par un enfant, aucune règle spéciale n'est aménagée par l'article 227 (nouveau) du projet de loi pour le cas où l'acte sexuel est commis sur un enfant de moins de 16 ans par un enfant lui-même mineur civil, voire un mineur de moins de 16 ans, alors que l'acte sexuel en question peut avoir été entretenu entre mineurs civils consentants ! L'alinéa 2 de l'article 227 (nouveau), aux termes duquel « le consentement est considéré comme inexistant lorsque l'âge de la victime est au-dessous de seize ans accomplis» s'exprime en des termes si généraux qu'il ne semble autoriser aucune exception ! Les enfants impliqués dans des actes sexuels consentis seront ainsi jugés pour viol et punis par les peines lourdes prévues par l'article 227 (nouveau) si l'un des partenaires au moins est âgé de moins de 16 ans ! Certes, l'enfant pourra toujours bénéficier de l'allégement généralisé des peines encourues par les adultes, par application des dispositions de l'article 43 du Code pénal (interdiction de leur condamnation à l'emprisonnement à vie et son remplacement par un emprisonnement de dix ans et réduction de moitié des autres peines d'emprisonnement encourues, sans que la peine prononcée ne dépasse cinq ans), mais le projet de loi aurait dû lever toute équivoque en prévoyant, à l'instar de la plupart des systèmes de référence en droit comparé, une exception de minorité mettant les enfants à l'abri de l'application des peines ainsi encourues, ce qui ne signifie pas, pour autant, que les mineurs devraient échapper à toute poursuite dans tous les cas : la notion de violence commise et prouvée permet de couvrir les cas où il est évident qu'un enfant profite du fait que l'autre enfant est vulnérable, fait usage ou menace d'usage d'arme, recourt à des produits ou comprimés ou médicaments dopants, ou lorsque l'acte est commis même sans usage des moyens précités sur un enfant âgé de moins de 10 ans accomplis ou encore en cas d'inceste. Pour tout le reste, lorsque l'acte sexuel est fait sans violence entre deux enfants mineurs, la loi aurait gagné à dépénaliser expressément l'acte sexuel entretenu entre enfants consentants, sauf si l'un des deux enfants est âgé de moins de treize ans !
Troisième confusion :quel rapport avec l'enfant en danger ?
Contrairement à l'article 227 (nouveau) traitant du viol et qui ne fait aucune place à la situation de minorité, l'article 227 bis (nouveau) traitant des relations sexuelles illicites exercées, sans violence, sur un mineur âgé entre 16 et 18 ans, dispose que « lorsque l'infraction est commise par un enfant, le tribunal appliquera les dispositions de l'article 59 du Code de protection de l'enfant » ! La confusion est, en l'occurrence, totale ! Quel rapport l'entretien de relations sexuelles illicites peut-il avoir avec ledit article 59 du Code de protection de l'enfant inséré sous le titre I dudit Code traitant de la protection de l'enfant en danger et appelant le juge de la famille à prononcer, dans le cas où l'enfant se trouve dans l'une des situations difficiles menaçant sa santé ou son intégrité physique ou morale, l'une des mesures destinées à le maintenir auprès de sa famille et autres mesures adéquates et adaptées à sa situation. Le projet de loi a, certes, entendu limiter l'infraction de relations sexuelles illicites entretenues, sans violence, avec un mineur âgé entre 16 et 18 ans aux adultes ! Mais en l'occurrence, le projet de loi va plus loin en élargissant, dans un texte du code pénal, la notion d'enfance en danger et les mesures prises en ce domaine par le juge de la famille !
Conclusion : L'auteur de ces lignes regrette la précipitation et la confusion ayant marqué l'adoption du dernier Projet de loi organique n°60-2016 relatif aux violences faites aux femmes dans ses dispositions traitant des relations sexuelles avec des mineurs. Une plus large consultation des experts rompus à ces questions aurait pu permettre d'éviter les confusions ci-dessus relevées et de hisser ce projet de loi organique, véritablement, au rang des réformes pionnières, comme le fut et l'est encore le Code de protection de l'enfant, adopté en 1995 et qui constitue, encore aujourd'hui, une référence historique de ce qu'un pays peut faire de mieux en matière de protection des droits de l'enfant.
Puissions-nous espérer, dans ces conditions, que le président de la République pourra utiliser les possibilités de renvoi du projet de loi en vue de son amendement par l'ARP. Revenir à l'article 227 (nouveau) et 227 bis (nouveau) tels que formulés par le projet de loi dans sa version initiale adoptée par l'ARP, concernant « l'âge de non-consentement sexuel » en le maintenant à 13 ans tout en levant la référence inutile par l'article 227 bis (nouveau) à l'article 59 du Code de protection de l'enfant qui nous paraît de nature à redonner au Projet de loi relatif aux violences faites aux femmes toute sa place ! Tout le reste est de nature à peser lourd sur la balance au point de la fausser!
*(Membre du comité des Nations unies des droits de l'enfant ,
professeur à la faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis)


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