«Au suivant» est une immersion musico-théâtrale dans le Tunis des années 60. Cette comédie musicale, signée Lahbib Belhedi et Lassaâd Ben Abdallah, mêle 4e art, danse, vidéo et patrimoine musical tunisien. Bel hommage à une Tunisie, qui peut actuellement être étrangère, voire inaccessible, précisément aux plus jeunes. Déjà présentée en avant-première lors de la dernière édition du Festival international d'Hammamet, l'équipe d'«El Maghroum yijaded» (titre de la pièce en arabe) a entamé un cycle de représentations d'une durée de 3 jours successifs, chaque semaine, à la salle «Le Rio» les vendredi, samedi à 19h00, et dimanche à 17h00. Fethi Msalmani, Jamel Madani, Farhat Jedid, Kaisela Nafti, Meriem Sayah, Hatem Lajmi, et le jeune Wajdi Borgi ont endossé les rôles d'une variété de personnages, tout droit sortis d'un café chantant, situé en plein cœur de Bab Souika en 1967/68. Un huit clos scénique, réalisé à travers un décor minimaliste, composé d'éléments à la fois simplistes et disparates : illustrations de graffiti en arrière-plan, chaises, échelle et une projection –vidéo imposante de Bourguiba et de sa Tunisie post–Indépendance. La création nous téléporte dans le temps, dans un «Café Chanta» géré par Mehrez, un propriétaire aux prises à une crise financière, ayant du mal à retenir ses employés, qu'il n'arrive plus à payer. Les protagonistes, aux prises à des déboires financiers, se retrouvent dans une situation tout aussi critique et grinçante que leur gérant, par qui les malheurs arrivent juste après le départ précipité de son épouse et de sa belle-famille, tous de confession juive, peu après la Guerre des six jours. Malgré les conditions économiques critiques, il parvient à retenir son équipe pour la programmation de ramadan 1967/1968. S'ensuit une série rocambolesque d'intrigues légères, ponctuées de performances musicales : danse orientale, mais surtout de chant traditionnel de Salah Khémissi. Méconnu de la jeune génération, considérablement présent lors de l'avant- première et bien après, ce dernier était l'un des rares artistes incarcérés sous Habib Bourguiba, pour avoir osé modifier les paroles d'une chanson, dédiée à l'ancien régent. «Au suivant» est un voyage historique, qui dévoile les aléas d'une époque «bourguibiste» pas si clémente qu'on le clame. Entre humour et art, le spectateur voyage, suit l'intrigue, et découvre un patrimoine musical inconnu, le tout soutenu par un jargon tunisien tantôt décalé et parfois totalement inaccessible, où anciens proverbes et jeux de mots fusionnent, grâce à l'interprétation remarquable d'une partie des 7 acteurs, notamment celle de Maryem Sayeh et du jeune Wajdi Borgi. Bel hommage à une Tunisie d'antan, accompli grâce à la collaboration du Centre culturel international de Hammamet et de la «Compagnie Founoun».