L'interconnectivité entre les différentes archives constitue un projet de grande envergure sur lequel se penche le ministère. Il s'agit de coordonner entre les archives des Domaines de l'Etat évaluées à 1.000 kilomètres linéaires, les archives nationales à 13 mille kilomètres linéaires et les archives foncières à plus de 26 mille kilomètres linéaires La récupération des domaines de l'Etat constitue actuellement un des principaux objectifs du ministère des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières, étant donné que la période post-2011 a connu plusieurs tentatives de saisie de terres et de biens immobiliers appartenant à l'Etat. Le rôle des archives foncières dans cet effort est colossal puisqu'elles permettent de prouver l'appartenance de ces propriétés à l'Etat. Un rôle qui se renforce davantage, surtout avec les difficultés que rencontre le ministère à identifier les propriétés et à les protéger. Ce rôle a été largement débattu, lors du séminaire annuel organisé par le ministère des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières, à l'occasion de la Journée nationale des archives. Le ministre Mabrouk Korchid a indiqué, à l'ouverture de la manifestation, que la situation foncière de la Tunisie reste encore complexe, vu qu'il existe plusieurs dossiers qui ne sont pas réglés, à l'instar des "Hbous". Il a affirmé que les propriétés de l'Etat doivent contribuer au développement économique du pays, surtout dans cette conjoncture difficile. "Nous avons lancé une série de réformes pour régler la situation foncière et récupérer ces propriétés. Le premier axe est la préparation du Code des domaines de l'Etat, qui s'achève aujourd'hui et sera présenté au Conseil des ministres. Le deuxième axe est la réforme du Code des droits réels afin de protéger les titres fonciers de la falsification qui s'est intensifiée ces dernières années. Le troisième axe est l'intégration des propriétés foncières que nous avons pu récupérer dans le cycle économique afin de permettre aux jeunes de les exploiter et contribuer au développement économique", explique M. Korchid. Le ministre souligne que le ministère a pu récupérer 22 mille hectares de propriétés agricoles fertiles dans toutes les régions du pays. D'ailleurs, cet effort de protection a été bien formulé, selon Samira Tounakti, sous-directeur au ministère des Domaines de l'Etat et de la Propriété foncière, par la mise en place de commissions d'investigation sur les propriétés de l'Etat pour couvrir toutes les régions du pays, et ce, depuis le début des années 90. Elle souligne qu'il y a eu de grandes difficultés au début pour l'identification de ces propriétés ; ce qui a poussé le ministère à faire appel aux archives pour avoir les informations exactes et pouvoir récupérer des centaines de propriétés dans chaque gouvernorat du pays. Elle indique que toute propriété qui a été récupérée est enregistrée par le Tribunal foncier pour la protéger. Effort de régularisation Pour Jamel Ayari, conservateur de la Propriété foncière, les archives foncières comportent plus de 26 mille kilomètres linéaires, avec des documents qui datent des années 1840 et 1860. Il affirme l'effort entrepris par le ministère pour protéger ces archives afin d'évaluer ce qui a précédé. Il évoque le système des « Hbous », qui a été aboli depuis 1956, mais plusieurs dossiers sont encore en attente de régularisation. Il ajoute que le ministère a pour objectif de régulariser la situation de 500 mille Tunisiens qui se sont installés de façon anarchique sur des terrains qui appartiennent à l'Etat. « Si nous n'avons pas d'archives sûres, gérées de façon juridique et scientifique, nous risquons de tomber dans des irrégularités et des injustices. Les archives mettent à la disposition de l'administration et des experts tout un socle pour régulariser cette situation », affirme-t-il. M. Ayari signale également qu'une commission spéciale constituée pour traiter des dossiers complexes se réunit deux fois par mois. Il ajoute qu'il y a un effort pour régulariser les terres datant de la période 1925-1970, et qui englobent les terres agricoles les plus fertiles de la Tunisie sur la rive de l'Oued Mejerda, soit 240 mille hectares, allant de Bejà, Jendouba, Medjez El Bab jusqu'au delta de la Mejerda. Il note que la libéralisation de ces terres aura certainement un impact économique très important pour les populations de ces régions. A ce niveau, Skander Ounaies, Professeur universitaire, a indiqué que cet impact se mesure par le degré de protection des domaines de l'Etat, la protection et la garantie de l'investissement dans le cadre de la politique de développement régional et aussi la protection de la mémoire collective. De même, M. Ayari indique que l'interconnectivité entre les différentes archives constitue un projet de grande envergure sur lequel se penche le ministère. Il s'agit de coordonner entre les archives des Domaines de l'Etat évaluées à 1.000 kilomètres linéaires, les archives nationales à 13 mille kilomètres linéaires et les archives foncières à plus de 26 mille kilomètres linéaires. Actuellement, on étudie la possibilité de s'ouvrir sur d'autres archives telles que les archives du ministère des Finances. « La connexion entre les archives pourra limiter les tentatives d'altération et permet le recoupement et d'éviter les erreurs », précise-t-il. Concernant le projet du nouveau Code des Domaines de l'Etat, Raja Medini, directrice des études juridiques à la direction de la propriété foncière, a expliqué que l'objectif est de compenser les insuffisances constatées dans les lois en vigueur. Ces insuffisances relèvent de l'ancienneté de ces lois, leur dispersion.