Bien plus que le traitement réservé à l'arbitre, bien plus que la triste mais implacable généralisation des comportements éloignés du sacro-saint «fair-play», c'est avant tout le sentiment d'incompréhension et plus encore l'éloignement progressif entre les joueurs et l'arbitre qui frappent. Mais pourquoi donc le fossé s'est-il creusé entre arbitres professionnels et acteurs? Pourquoi pour beaucoup de jeunes footballeurs effrontés, l'incompréhension et le semblant d'incohérence de l'arbitrage sont souvent évidents ? Franchement, il ne s'agit pas ici de dédouaner les arbitres des erreurs qu'ils peuvent commettre, mais bel et bien de souligner que, finalement, la seule incompétence de certains arbitres n'est peut-être pas l'explication unique de toutes les rébellions sur le terrain. Ce faisant, et forcément, nous nous inscrivons en faux par rapport à la thèse de l'arbitre maison, de l'asservissement et du sifflet tendancieux. Nous sommes contre le désagréable courant général de l'arbitre-suspect-coupable. Il ne faut pas se voiler la face car l'enlisement pourrait mener à l'anarchie sur le terrain. Le joueur n'est pas un affranchi sur le rectangle vert et l'arbitre n'est pas un élément extérieur et imprévisible. L'impunité des joueurs devant soi-disant une décision injuste d'un élément exogène est une aberration ! Bien plus que le traitement réservé à l'arbitre, bien plus que la triste mais implacable généralisation des comportements éloignés du sacro-saint «fair-play», c'est avant tout le sentiment d'incompréhension et plus encore l'éloignement progressif entre les joueurs et l'arbitre qui frappent. L'incompréhension au sens large ! Dès lors, il est légitime de se poser la question : pourquoi l'incompréhension s'accentue-t-elle entre le corps arbitral et les joueurs ? La première raison est l'incompréhension au sens large. Au cours de la dernière décennie, deux phénomènes puissants on dû s'affronter : d'un côté la nécessaire pédagogie pesant sur le corps arbitral (le sentiment de justice ne naît que de la compréhension de la faute), et de l'autre la perpétuelle complexification ou modification de la règle. Les conséquences de cette opposition sont alors simples: aux joueurs de s'adapter, à l'arbitre de justifier l'application de la règle ! L'apparition des oreillettes, l'instauration progressive des questions de la part des joueurs ou des entraîneurs auprès d'un arbitrage parfois complexe avant, pendant ou après un match, la nécessité de pédagogie et des explications. Tout devient alors presque légitime ! Ne pas comprendre, c'est se faire voler. Ne pas comprendre c'est être floué. Ne pas comprendre c'est la porte ouverte à la malhonnêteté, volontaire ou non, de l'arbitre ! Pire : quand l'arbitre refuse d'expliquer, notamment en cas de multiplication des contestations dissimulées à travers les questions d'un capitaine candide, c'est qu'il abuse de ses prérogatives ! Le vilain ! Seulement voilà, quand la règle change tous les ans, quand l'interprétation évolue d'un match à l'autre, et parfois même d'une mi-temps à l'autre, l'explication n'est que trop rarement satisfaisante. La compréhension est alors non seulement malaisée mais parfois totalement impossible. Il faut comprendre que l'application de la règle peut alors se faire contre l'esprit même du jeu et s'avère problématique dans la compréhension. Et qui dit compréhension induit acceptation ! L'arbitre est alors pris dans le terrible dilemme : sanctionner au nom de la règle ou laisser passer au nom du jeu ! Parmi les autres facteurs de la possible incompréhension, nous soulignerons ici un facteur marginal mais réel : la mondialisation du football, déjà sport-roi par excellence. Cela se traduit par l'augmentation du nombre de joueurs continentaux évoluant dans nos contrées ne parlant pas encore l'arabe bien que le français pour la plupart soit à la rescousse. Mais c'est bien tous ces facteurs qui conduisent à l'incompréhension la plus importante : le changement régulier de la règle et la difficulté intellectuelle à comprendre que l'arbitrage est soumis à l'interprétation continuelle. Les clichés ont la peau dure Nos joueurs doivent comprendre une bonne fois pour toutes que nos arbitres ne sont pas des «vendus» ! Il doivent éviter de cogiter sur des clichés du style: comment croire en la compétence ou, pire, en l'honnêteté d'hommes (par nature faillibles) qui n'appliquent pas expressément de la même manière des règles pourtant uniformes (règle de l'avantage, tolérance envers le jeu musclé...) Et c'est ici que la notion d'interprétation de la règle prend sa pleine mesure. Ce qu'il faut d'abord bien avoir à l'esprit, c'est que l'application de la règle, pourtant identique, ne peut se faire que par le prisme de l'interprétation. Ainsi, de par la douce complexité des lois du jeu, on peut aussi aboutir à des sanctions opposées suite à une même situation ! C'est en ayant cela à l'esprit que nos joueurs pourront à terme s'affranchir de la théorie du complot !