Une vingtaine d'articles pourraient transformer totalement l'entrepreneuriat et l'investissement en Tunisie. Le Startup Act ambitionne de créer une nouvelle dynamique économique capable de générer d'énormes profits. Les startupers demandent aux élus de leur faire confiance Souvent monotones, parfois ennuyeuses, les journées d'études organisées par l'académie parlementaire ont été marquées hier par un vent de fraîcheur apporté par une centaine de jeunes entrepreneurs de talent et de responsables d'incubateurs, venus apporter leurs témoignages, mais aussi et surtout leur soutien au Startup Act. Un projet qu'ils ont contribué à mettre en place. Mohamed Ali Kilani, Amine Chouaib, Walid Soltane, Bayrem Belhaj Amor, Amel Saidane sont des noms qui ne vous disent peut-être rien, mais dans le domaine de l'innovation et dans le monde encore méconnu des startup, leurs noms sont synonymes de success stories mondiales. Tous sont venus avec un seul message aux élus : «Libérez les énergies des compétences tunisiennes !». Ayant travaillé au sein d'une taskforce pilotée par le ministère des Technologies de l'information et de l'Economie numérique pour l'élaboration de ce projet clé en main, ils demandent aux élus d'intervenir le minimum possible sur le texte, de le voter le plus rapidement, et de le mettre en application dans les quatre mois qui suivront son adoption. «Oubliez tout ce que vous savez sur l'économie en examinant ce projet, une startup c'est autre chose», conseille ainsi Noômane Fehri, patron d'un incubateur de startup, à ses anciens collègues. «Bien que ce projet de loi soit une révolution, il faut savoir qu'il s'agit d'un cadre de rattrapage et nous n'avons plus de temps à perdre !», prévient Amel Saidane, présidente de l'Association «Tunisian Startups». L'échec n'existe pas Selon le ministre des Technologies de l'information et de l'Economie numérique, Anouar Maârouf, le projet de loi qui, pour la première fois, reconnaît le statut particulier des startup, bénéficiera à 500 startup par an. «Pour le contribuable, cela coûtera deux fois rien, par contre, les startup créées peuvent réaliser des chiffres d'affaires astronomiques, il n'y a pas de limites !», explique Anouar Maârouf. Selon lui, la diaspora tunisienne innovante attend avec impatience la mise en place de ce cadre légal pour retourner au bercail et laisser s'épanouir leur potentiel. Visiblement émerveillé par ces jeunes, bouillonnant d'idées, le président de l'ARP, Mohamed Ennaceur, a souligné que c'est cette Tunisie qui innove et qui crée, qui doit être mise en avant. «Même en cas d'échec, ce projet permet au startuper de retenter sa chance jusqu'à parvenir au succès», note-t-il. Et c'est justement là où réside «la révolution» promise par les auteurs du projet. «En Tunisie, aujourd'hui, si quelqu'un échoue dans son premier projet, sa vie est quasiment fichue, il ne peut plus accéder aux sources de financement pour retenter sa chance», résume Amine Chouaib, fondateur d'une startup spécialisée dans l'Internet des objets. Faire vite En créant un statut particulier pour les startup, le projet de loi protège ainsi les jeunes créateurs des aléas de la vie et du business. Outre les incitations fiscales et les prises en charge par l'Etat d'un certain nombre de frais (dont les frais relatifs à l'enregistrement d'un brevet), le projet de loi permet aux innovateurs, salariés dans le public ou dans le privé, de bénéficier d'un congé sans solde, d'une année renouvelable, en vue de créer leur startup. Dans son article 18, le projet de loi crée un fonds de garantie pour les startup. Grâce à lui, les startup, avec un capital détenu par des fonds d'investissement et qui ne parviennent pas à faire survivre leur modèle économique, peuvent décider d'une liquidation et récupérer 30% de l'investissement initial. Seule condition requise : que la liquidation se fasse à l'amiable. Le ministère des Technologies de l'information et de l'Economie numérique souhaite que le projet de loi entre en vigueur dès son adoption. D'ailleurs, il semble bien que les décrets d'application soient prêts. La balle est désormais dans le camp des élus. Qu'est-ce qu'une startup ? «Un startuper, c'est quelqu'un qui se jette du haut d'une falaise et, durant sa chute, doit concevoir un avion pour pouvoir atterrir». C'est par cette métaphore empruntée que Bayrem Ben Amor, jeune entrepreneur, définit une startup. Mais plus concrètement, Haythem Mahouachi, directeur général d'une Sicar, la définit comme étant une jeune entreprise (moins de 8 ans d'existence), innovante et capable de croître très rapidement. Le projet de loi qui sera débattu au sein de la Commission de l'industrie, de l'énergie, des ressources naturelles, de l'infrastructure et de l'environnement à partir de jeudi, propose de délivrer un label aux startup. L'article 3 du projet exige cinq critères pour obtenir ce label : L'entreprise devra être âgée de 8 ans tout au plus Que le nombre de salariés, les actifs et le chiffre d'affaires ne dépassent pas un plafond qui sera fixé par décret Que plus des deux tiers de son capital soit détenu par des individus, groupes d'investissement ou des startup étrangères Que son modèle économique soit basé sur l'innovation, surtout dans le domaine technologique Que son potentiel de croissance soit important. Afin de faire en sorte que ces critères soient respectés, une commission au sein du ministère des Technologies sera créée afin de délivrer le label.