L'acte de protestation a évolué rapidement et de plusieurs manières pour concerner toutes les régions et montrer, ultérieurement, l'incapacité du mouvement à aller de l'avant selon ses méthodes, ses moyens, ses mécanismes et ses objectifs, puisqu'il a été infiltré par plusieurs parties et de manière organisée et étudiée. Selon le rapport du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (Ftdes), le mois de janvier dernier a connu des débuts difficiles, puisque quelques jours seulement après avoir célébré la nouvelle année administrative, des protestations ont éclaté dans tous les gouvernorats. Le fait nouveau et important cette fois-ci est que les manifestations ont été initiées par le mouvement «fech nestanaou», campagne qui a, semble-t-il, organisé ses mouvements de manière nocturne essentiellement dans l'avenue Habib Bourguiba et aux alentours. La nouvelle méthode peut être une révélation du mouvement de protestation que l'Iran a connue au cours de la récente période, qui reposait principalement sur des manifestations de nuit. Si des raisons objectives justifient cette approche dans plusieurs villes iraniennes à cause de la situation sécuritaire, la réalité des libertés ainsi que l'acte protestataire, il semble le contraire en Tunisie, au motif que la protestation ne pose plus les mêmes problèmes qu'avant la révolution. Manifestation pacifique La protestation nocturne est motivée par, notamment, l'anonymat lors des affrontements avec les autorités et la capacité de se démarquer, ce qui instaure une similitude avec les mouvements en Iran dont le but était de manifester en se protégeant par la nuit. L'acte de protestation a évolué rapidement et de plusieurs manières pour concerner toutes les régions et montrer, ultérieurement, l'incapacité du mouvement à aller de l'avant selon ses méthodes, ses moyens, ses mécanismes et ses objectifs, puisqu'il a été infiltré par plusieurs parties et de manière organisée et étudiée. La manifestation pacifique s'est transformée rapidement en manifestations chaotiques et violentes avec pillage, vol et mise à sac des propriétés privées et publiques pour faire dévier le mouvement lui-même de l'objectif de base pour lequel il a été lancé. Les organismes officiels ont jeté des accusations à un parti politique en le désignant responsable de ces événements. Les médias, à leur tour, ont largement couvert ces incidents en mettant en avant le chaos, le pillage et le vol. D'autres parties politiques ont demandé d'imposer un couvre-feu. La principale cause en était la loi de finances, qui a été annoncée il y a trois mois environ, qui a fait l'objet d'une levée de boucliers mais a été approuvée par l'Assemblée des représentants du peuple, malgré les réserves et les nombreux problèmes et la pression de plusieurs parties. Protestation des parties influentes L'apparition des manifestations n'avait rien d'étonnant pour les raisons suivantes : – A travers ce que le Ftdes a relevé et révélé les mois précédents dans ses rapports mensuels, le mois de janvier s'annonçait comme inhabituel ; – Après l'annonce du projet de budget pour l'année 2018, une attention particulière a été accordée aux positions et protestations des parties influentes à capacité de pression et les nombreux exemples de révisions de certaines dispositions de ladite loi de finances en sont la preuve ; – Les parties institutionnelles sont devenues insensibles aux problèmes de l'opinion publique et ceci s'explique principalement par la rupture importante entre les partis politiques et leurs bases. Les partis au pouvoir se sont-ils réunis avec leurs bases pour étudier le projet de budget et avaient-ils pris le pouls de la rue ? Cela n'a pas du tout eu lieu mais s'est passé au siège des partis et à huis clos, pas dans les régions et n'a pas impliqué les secteurs concernés par les augmentations, ni les jeunes, les citoyens dans les diverses discussions sur la loi ; – Ce sujet a été traité, de manière importante, à travers divers médias, mais cela ne suffisait pas, les partis au pouvoir ont traité le sujet comme étant des parties-cadres et non comme partis populaires ; – La hausse des prix est devenue une préoccupation majeure pour divers groupes sociaux et constitue le sujet les plu fréquent dans diverses discussions individuelles et collectives ; – Il n'y avait aucune volonté réelle d'améliorer la situation sociale, mais le désir était d'améliorer la situation économique, la méthodologie est différente en termes d'attentes de chaque côté ; – Les chiffres et les indicateurs sur la pauvreté en Tunisie ne reflètent pas la réalité du phénomène étant timorés et réducteurs. Les organismes officiels traitent toujours le sujet selon la même approche technique qui ne reflète aucune relation avec les réalités sociales ; – Le grand nombre de manifestations qui a été relevé au cours de l'année précédente n'a pas connu de traitement efficace, mais ces mouvements sociaux ont été pris en charge avec un ensemble de caractéristiques qui entrent dans le cadre des solutions temporaires ; – Absence d‘encadrement sur le terrain des manifestations ; – De nombreux signes de violence ont été des indicateurs clés de l'aggravation des conditions sociales.