«Municipales 2018, que préparent les partis pour le pouvoir local ? », telle est la question posée hier, en conférence à Tunis, par le Centre d'études sur l'islam et la démocratie (Csid), à l'adresse des quatre partis présents, à savoir Ennahdha, Nida Tounès, le Courant démocratique et Al Harak. A quelques semaines des élections municipales, le scrutin reste ballotté entre les craintes des uns et les encouragements des autres En mot d'introduction, le président du Csid, M. Radhouane Masmoudi, a, d'emblée, donné un aperçu général sur la marche électorale et la configuration partisane qui en a découlée, à l'aune des résultats des candidatures obtenues dans chacune des 350 circonscriptions. Il a fait valoir qu'il y a une assez large représentativité des jeunes (52%), leur participation à la prise des décisions étant, pour lui, d'une importance capitale. Un Etat, pour être fort, aura besoin de partis aussi forts, de par l'expérience qu'ils capitalisent et leurs programmes à concrétiser dans chaque région. Finalement, M. Masmoudi a appelé à une campagne de sensibilisation quant à l'utilisation de l'encre électorale dans l'opération de vote, le jour du scrutin. A raison de 15 mn pour chacun, les représentants des partis ont pris la parole, à tour de rôle. Président du bureau politique d'Ennahdha, M. Noureddine Arbaoui a évoqué les préparatifs de son parti, sans entrer dans les détails. Dans son passage d'idées, il s'en tient à l'essentiel : tout d'abord, la concrétisation du chapitre 7 de la Constitution portant organisation du pouvoir local. Il est intéressant de ne plus gérer la commune selon la loi 1975, qui, dit-il, a laissé la région crouler, 60 ans durant, sous l'emprise d'une centralisation exagérée. «La mettre sur la voie du pouvoir local constitue, d'ailleurs, le socle de notre programme électoral», résume-t-il. De même, poursuit-il, améliorer le vécu du citoyen, maître de soi dans son milieu immédiat relève également des orientations générales du Mouvement. La seconde idée consiste à faire, vaille que vaille, aboutir le processus électoral. Seule la démocratie de proximité compte, insiste-il encore. Le rôle de premier plan confié à la municipalité dans l'œuvre de développement est l'essence de sa troisième idée. Tout dépend, néanmoins, du nouveau statut que lui réserve le Code des collectivités locales (CCL), bientôt adopté par l'ARP. A défaut de ressources humaines et financières, la région de demain ne gagnera jamais les enjeux du développement local. Les craintes de Nida Ce tableau des généralités tel que brossé par le dirigeant nahdhaoui est perçu par M. Borhène Bsaies, chargé des affaires politiques au sein de Nida, comme une langue de bois, et qu'il est inutile de le répéter. Réputé pour son franc parler, M. Bsaies s'est abstenu procéder à la lecture du programme de son parti élaboré en 50 points. Entrant dans le vif du sujet, il s'est contenté de passer en revue quatre grandes priorités : prestation des services et bonne gouvernance, amélioration de l'infrastructure de base, cadre de vie décent pour tous les habitants, ainsi que développement local en mesure d'augmenter l'attractivité des municipalités. A cela s'ajoutent les plans d'action locaux qui seront, d'après lui, établis selon les spécificités de chaque région. Mais, « cela n'est qu'un aspect technique du jeu, car l'échéance n'est pas politique par excellence », s'exprime-t-il. Cela étant, l'enjeu demeure plutôt local. Parallèlement, prévient-il, il y a, quand même, certaines craintes d'ordre politique liées aux municipales 2018. S'il devait y avoir un nouveau gouvernement, les municipales auraient-elles quand même lieu ? Et M. Bsaies de poursuivre : pourquoi Nida Tounès est-il, toujours, pointé du doigt, accusé d'être le parti bloquant des élections et contre le pouvoir local ? « On doit, pourtant, reconnaître qu'il s'agit d'une expérience aux conséquences inconnues », ajoute-t-il ainsi. D'autant plus que la décentralisation de la décision, s'inquiète-t-il encore, risque de menacer l'unité de l'Etat. A l'en croire, le CCL est un texte de loi trop excessif qui aura, certainement, un impact sur le principe participatif. Et d'arguer, dans ce sens, que presque 120 municipalités seront alors partagées entre Ennahdha et Nida. Somme toute, il y aura, selon lui, de nouveaux équilibres régionaux. Al Harak et le Courant démocratique, en avant toute Si optimiste soit-il, le dirigeant-fondateur du Courant démocratique, M. Mohamed Abbou a démenti, en bloc, les soucis exprimés par M. Bsaies. « Nous serons présents au prochain rendez-vous par nos propres 69 listes et trois autres coalisées », relève-t-il. Toutefois, avoue-t-il, il y aura, certes, des difficultés de gestion, le choc serait d'ordre financier. Il faut que les municipalités exercent un pouvoir effectif. De surcroît, la lutte anti-corruption, la bonne gouvernance, la transparence sont les défis majeurs du pouvoir local. Quant à M. Amor Sifaoui, de « Harak Tounes Al Irada », il n'a pas mâché ses mots, soulignant l'apport de la décentralisation. Quoique cette dernière avance timidement, elle est indispensable. De même pour la démocratie de proximité, a-t-il conclu.