A une semaine du dépôt des candidatures, la voie aux municipales 2018 n'est pas encore balisée. Combien de préalables nécessaires à un pouvoir local juste et effectif manquent, jusque-là, de précision ? Et même si des partis prétendus favoris semblent naviguer à vue, d'autres, ménageant la chèvre et le chou, n'ont qu'une idée derrière la tête : un siège aux conseils municipaux. L'électeur, quant à lui, se trouvant à la croisée des chemins, ne sait plus à quel saint se vouer. Aussi, ces élections, tant attendues, auront-elles un impact sur la transition démocratique dans le pays? En clair, qu'est-ce qui va changer ? Lors d'une conférence de presse, tenue hier à son siège à Tunis, le Centre d'étude sur l'islam et la démocratie (Csid) a tenté d'éclairer les lanternes, engageant le débat que tout le monde attend. Sans trop s'attarder sur le rôle des municipales dans la démocratie locale, son président, M. Radhouane Masmoudi, a donné la parole à trois partis décidés à s'y porter candidats. M. Abdelkrim Harouni, président du conseil de la choura d'Ennahdha, s'est étalé sur les vertus de la démocratie, appelant à se rendre massivement aux urnes pour que chacun puisse faire le choix qui lui convient. Mais la démocratie n'est pas uniquement faite d'élections. Elle est, à ses yeux, une culture en soi, voire une manière de gouverner, sans exclusion aucune, tout en respectant la volonté du peuple. « Le dernier mot revient, donc, aux urnes », dit-il, soulignant son attachement à ce que ces élections soient tenues dans les délais impartis (le 6 mai prochain). Car, indique-t-il, la situation dans les régions ne peut plus attendre. Et d'ajouter, en ces termes, « qu'on envoie aux citoyens des signaux positifs, afin de relever les défis sociaux et économiques... ». Tant il est vrai qu'il y a, certes, un accord sur la date du 6 mai, mais rien n'est traduit dans les faits. Dans ce sens, le dirigeant nahdhaoui pointe du doigt certaines tentatives de mette en échec les prochaines élections. Conflits de positions ! Et d'expliquer que cela se comprend pour se donner encore du temps, car les partis sont, aujourd'hui, mis à rude épreuve. Soit 350 communes, avec des milliers de sièges auxquels postulent tous les partis ou presque. L'enjeu, certes, est de taille, et chacun doit connaître son poids. « Ennahdha, comme tous les partis, a arrêté ses listes. Il sera représenté dans toutes les circonscriptions », affirme M. Harouni. Si certains partis se montrent encore indisposés, fait-il remarquer, c'est qu'ils préfèrent se figer dans la centralisation. Pour conclure, il a loué le projet du code des collectivités locales, en cours d'examen, soulignant que le principe de la parité est une sorte de révolution juridique. « Un pas positif dans la modernisation de la société », juge-t-il. Quant au parti de l'ancien président de la République, Moncef Marzouki, « Harak Tounes Al irada », il a sa propre lecture de la situation. Membre du bureau, M. Tarek Kahlaoui s'est, dans son analyse, limité à deux points. Le premier a trait au pouvoir local qui constitue le caractère spécifique des municipales. Il y a, là, deux points de vue qu'il a formulés autour du processus démocratique. L'un considère la démocratie participative comme planche de salut, l'autre disant que la révolution elle-même est un pas en arrière. Deux avis qui, jusqu'ici, campent sur leur position. Quatre fondamentaux Autre son de cloche qui voit dans le pouvoir local une division du territoire national. Pour lui, la démocratie participative demeure celle la plus moderne, de par sa représentativité élargie :« Voilà qu'il y a encore des conflits sur la transition démocratique », témoigne-t-il. Que le meilleur gagne n'est nullement un défi pour lui. L'essentiel étant comment arriver à 2019. La loi électorale, il l'a qualifiée de contraignante, ce qui pourrait, quand même, nuire aux élections, et puis au pouvoir local. Pourquoi ? Parce que, prévient-il, faute de répondre aux conditions exigées, on va trouver des circonscriptions avec zéro liste. Telle la condition de la parité que le jeune Mosâab Ben Ammar, membre du bureau politique du parti « Al Bina Al watani », considère comme une vraie difficulté. « Je suis pour la participation de la femme, mais contre la façon avec laquelle s'impose la parité », s'exprime-t-il. Et d'arguer que le terrain n'est pas encore favorable à sa concrétisation. De son avis, le pouvoir local revêt un sens plus profond que les élections. « Nous allons plaider fort en sa faveur, faisant de notre mieux pour que les élections soient dans les délais », insiste-t-il. Nombreuses sont les conditions pour y arriver. Il les résume ainsi : décentralisation, démocratie participative, mise en place des instances constitutionnelles et stabilité sociale. Mais, que va-t-il changer dans les régions, si les élections sont réussies? Avant d'ouvrir le débat à l'auditoire, le président du Csid a repris la parole pour inciter à davantage de sensibilisation. «Il faut que les élections réussissent, on n'a pas d'autre choix. Sinon, nous allons, tous, perdre...».