Encore un séminaire sur les porteurs de handicap ? Non, car cette fois, l'Atddph s'est manifestement lancée dans une campagne sur les nuances sur la base d'une étude de terrain dont les données et les recommandations appellent à aller au bout de la logique d'intégration qui doit aboutir à considérer la scolarité de ces enfants à la seule lumière de l'inclusion. Comment l'élève porteur de handicap peut-il réussir à recevoir une éducation digne de ce nom ? Sommes-nous vraiment capables d'aller au bout de la logique d'intégration si tous les Tunisiens ne parviennent pas à se projeter vers le «Nous» unificateur et ne mettent pas fin à ce «Nous et Eux» qui est actuellement une faille dans la perception de la situation des personnes portant des handicaps ? Tel est le fond du problème débattu avant-hier (23 mars) dans le séminaire national sur «l'inclusion scolaire des enfants porteurs de handicap» organisé par l'Association tunisienne de défense des droits des personnes handicapées (Atddph) en partenariat avec le ministère de l'Education, le ministère des Affaires sociales et le Programme Soyons Actifs/Actives. Une frange de 16% des Tunisiens Selon Yosri Mazati, président de l'Association tunisienne de défense des droits des personnes handicapées, «C'est un sujet capital que celui de l'inclusion scolaire alors qu'une frange de 16% des Tunisiens est porteuse de handicap. L'éducation est une garantie sur l'avenir et le travail de terrain au sein des écoles est un effort qui doit se poursuivre sur des décennies. Pour y réussir, nous avons le devoir d'organiser leur inclusion». Ilhem Romdhani, directrice de l'enseignement au sein du ministère de l'Education, affiche le partage évident des convictions de l'association : «Nous espérons sortir de ce séminaire par des recommandations pratiques qui nous fassent avancer. Au sein du ministère, nous parlons désormais d'inclusion, et tout élève a le droit d'apprendre de la même manière dans toutes les institutions tunisiennes. Nous tenons à dire que les enfants handicapés sont considérés comme tous les autres». Quant à Anouar Héni, chef de projet au sein de l'association, il va encore dans la même optique en signifiant que l'étude que vient de réaliser l'Atddph poursuit le but de trouver des voies d'inclusion et la création d'un noyau pour véhiculer ce processus, en s'appuyant sur plusieurs références législatives aussi bien dans la Constitution tunisienne que dans les décrets mais aussi auprès des institutions internationales. Un plan d'action et un référentiel Toutes les parties présentes au séminaire semblent s'accorder parfaitement sur cette nuance entre l'intégration qui décrit les modes d'attachement de l'individu à un groupe, et l'inclusion qui caractérise les rapports entre l'individu et les systèmes sociaux. En d'autres termes, ils soutiennent l'inclusion parce qu'elle s'enfonce plus profondément dans les strates sociales. C'est ce que démontre l'étude en question. Selon Vanessa Adouani, l'un des auteurs, l'inclusion scolaire doit se baser sur le droit à une éducation pour tous, mais elle doit également être efficace pour ne pas diminuer la motivation des enseignants et l'auto-estime des enfants en situation de handicap. Un propos étayé par cette étude de terrain dont les cas pourraient servir d'étalon : «Diagnostic sur la scolarisation des élèves en situation de handicap dans les écoles ordinaires dans les gouvernorats de La Manouba, Médenine et Gafsa». La lecture de ses recommandations fait ressortir les éléments d'un Plan d'action et d'un référentiel visant à améliorer et à renforcer les écoles dans une inclusion scolaire de qualité des ESH (élèves en situations de handicap), en plus de favoriser la planification de l'insertion scolaire, son opérationnalisation et son évaluation. Les recommandations aux décideurs de la politique publique proposent de reconnaître la complexité des cas et leur multiplicité, prendre en compte la réalité du terrain, veiller à la formation et à l'inspection, engager des professionnels, veiller à l'accessibilité des établissements, homogénéiser les chiffres, utiliser les ressources en ligne... Les recommandations aux directeurs des établissements conseillent de les former, placer l'élève au cœur de l'intégration, valoriser et favoriser la relation pédagogique, limiter le nombre dans les classes, généraliser la mise en place du PEI (projet éducatif individuel), prévoir un temps pour les rencontres, rendre les infrastructures accessibles, mettre en place une adaptation pédagogique et une adaptation relationnelle, favoriser l'écoute des enfants...