Par Jalel Mestiri Il est toujours bon de rappeler qu'il y a, comme dans beaucoup d'autres activités liées au football, un turnover chez les techniciens parachutés dans le métier. Ils continuent à s'intéresser au football sans en avoir le profil. Ils ont conscience du privilège, mais ils ne le méritent pas. Par quelque dimension que l'on saisisse, ils se montrent encore incapables de renouveler leur centre d'intérêt au-delà de ce qui existe. Bref, de répondre à tout ce que la passion pour le football exige comme connaissances, formation et recyclage. Mais il est important aussi de reconnaître qu'il y a de ces entraîneurs qui sont entrés dans une phase de défiance directe. Ils sont conscients du fait que les différentes contraintes et obligations du métier sont de plus en plus tirées vers le haut. Ceux qui arrivent à s'y faire une place, à l'instar de Khaled Ben Yahia et son deuxième titre avec l'EST, le 28e du club, savent parfaitement que les dispositifs liés au travail technique, tactique et physique ont changé. Ils n'ont plus la même signification. Ou presque. Revenu dans le bain de la compétition, il a su ajuster ses convictions, ses connaissances et son vécu en fonction des nouvelles évolutions. Certains entraîneurs, appartenant comme lui à une nouvelle génération montante, s'étaient heurtés à un environnement fortement marqué par un changement artificiel. Ce qu'ils ont entrepris jusque-là en demi-mesure s'est avéré congru, incomplet et dans le meilleur des cas palliatif. Les bons constats amènent souvent les grands changements. Et si on n'est pas prêt à changer, c'est qu'on ne veut pas progresser. A sa façon bien particulière, Ben Yahia continue à tracer son chemin. Il a de plus en plus le profil de passer au-devant de la scène. En dépit d'une longue absence, l'on se rend compte qu'il est suffisamment formaté pour la compétition et ses exigences actuelles. Il est revenu au bon moment, alors que l'heure semble avoir bel et bien sonné pour beaucoup d'autres... Ce qu'on sait aujourd'hui, c'est que l'entraîneur «sang et or» a les qualités requises pour aller loin avec l'Espérance. Au-delà des résultats, c'est la manière de jouer de l'équipe qui est finalement remise à sa place. Par conséquent valorisée. Avec du retard, ou à temps ? La question n'est pas là. L'important, c'est le nouveau rôle et les nouvelles prérogatives des joueurs qui prennent place et qui passent aux commandes. Il n'est pas difficile de le deviner : Ben Yahia s'est parfaitement investi dans les choix stratégiques et les équilibres sportifs. Il a visiblement une bonne idée de ce que représente le football à l'EST, ou le football tout court. Ce qui doit s'y concevoir, ce qui doit être visé. La force d'un entraîneur de football est de se former et se construire en permanence et dans la durée. Il ne doit pas vivre seulement avec les victoires. Dans la tenue globale de l'équipe, dans ses vertus collectives, dans l'œuvre des joueurs et dans tout le reste, il y a tant de promesses pour que l'Espérance continue à galoper au maximum de ses moyens. Sans faire de parallèle, nous pensons que sous la conduite de Ben Yahia, l'EST emmagasine de la confiance pour la suite des épreuves et installe un mode et un modèle qui prennent de la consistance, de réussir la transition susceptible de lui permettre de se démarquer de l'esprit conformiste et d'oser tous les genres. Une palette plus large pour dérouler un football multiforme, à géométrie variable.