La loi 2005-96 du 18 octobre 2005 relative au renforcement de la sécurité des relations financière a constitué la thématique centrale débattue lors d'une conférence organisée, le 21 octobre, à l'initiative du Centre tunisien de gouvernance d'entreprise (Ctge) au siège de l'Institut arabe des chefs d'entreprise. Les participants ont tenté de dresser un bilan de l'état des lieux après cinq années d'application de cette loi. A cette occasion, M. Moncef Bouden, secrétaire d'Etat auprès du ministre des Finances, chargé de la Fiscalité, a précisé, que la responsabilité, la transparence et la juste appréciation des risques sont l'objectif du dispositif réglementaire tunisien. En effet, au moment de la promulgation de ladite loi, le législateur ambitionnait de favoriser un saut qualitatif en matière de transparence et de gouvernance des entreprises. L'histoire a montré, et ne cesse de le faire, que la falsification des informations financières est génératrice de lourdes conséquences. D'ailleurs, les crashs boursiers et les crises économiques consécutives justifient largement ce constat. Dans le but de prémunir le tissu économique national contre de telles issues néfastes, plusieurs dispositions ont été mises en place dans le cadre de cette loi, notamment l'obligation d'avoir recours à un commissaire aux comptes pour les entreprises commerciales, le renforcement de l'indépendance des experts commissaires par le biais de la rotation et le recoupement des rapports, l'obligation de signer une lettre d'affirmation attestant les conditions de la bonne marche des travaux des commissaires aux comptes, la nécessité de constituer des comités d'audit et la formation d'une base de données par le traitement des informations du registre du commerce. Le bilan des réalisations lors de ces cinq années est plutôt satisfaisant. On apprend que 89,5% des entreprises ont fait appel à des commissaires aux comptes, membres de l'Ordre des experts comptables, et que toutes les entreprises éligibles à la rotation ont respecté leurs engagements. Quant à la communication et la divulgation des états financiers intermédiaires, 100% des entreprises cotées en Bourse ont communiqué, à temps, leurs indicateurs trimestriels, relatifs au quatrième trimestre de 2009. Durant cette période, la scène financière a montré une dynamique exemplaire. Le bilan affiche la création de plusieurs entreprises de gestion de portefeuille de valeurs mobilières. Dans l'exercice de leurs activités, ces unités sont tenues de respecter les normes les plus évoluées et pratiquées dans les plus grandes places financières. Tous ces travaux ont débouché en décembre 2009 sur l'adhésion du Conseil du marché financier tunisien au protocole international d'échange de données, organe de l'Organisation mondiale des conseils des marchés financiers. Les experts de cette institution ont mis l'accent sur la convergence de la réglementation tunisienne aux normes internationales. C'est un jalon de plus sur la voie de la modernisation de la réglementation financière, a souligné M. Faycel Derbel, vice-président de l'Ordre des experts comptables (OEC). Les conférenciers ont indiqué que les incidents majeurs et leurs conséquences dramatiques dans la sphère économique avaient pour cause principale l'absence ou la déformation de l'information. En effet, les dirigeants, face à un environnement marqué par l'incertitude, éprouvent un besoin de plus en plus grandissant en information de qualité entre autre financière. Dans ce sens, les experts ont insisté sur le fait que des réformes permanentes sont nécessaires pour garantir la qualité de l'information financière. La majorité des participants ont signalé que le dispositif national manque d'institutions habilitées au suivi de l'application des lois en vigueur, comme c'est le cas dans plusieurs pays avancés. Par ailleurs, M. Derbel a appelé à dynamiser le processus d'appréciation de l'impact de la réglementation. Durant le panel, M. Mohmed Mansour, président de l'OEC, a déclaré que cette loi est perfectible et qu' elle mérite des améliorations pour mieux converger vers les standards internationaux. Force est de constater, que sur le terrain, cette loi a montré également quelques difficultés de mise en application au niveau du co-commissariat. En effet, certaines entreprises sont dans l'obligation de faire appel à deux CAC pour réaliser le même travail, et cette procédure aboutit vraisemblablement à des rapports divergents. A cet égard, les experts ont plaidé pour une réforme réglementaire préconisant le partage synergique de la tâche et non le double travail. Représentant les professionnels, M. Hechmi Jilani, P.-d.g. de Hannibal lease a mentionné que les mesures qui découlent de cette loi ont constitué, dans un premier temps, une contrainte pour son entreprise. Dans un deuxième temps, la multitude des contrôles et la fréquence de préparation des indicateurs d'activité ont fait tirer son exploitation vers le haut. D'ailleurs, ces pratiques fournissent un diagnostic permanent qui reflète l'image fidèle de l'entreprise. Ainsi, le décideur sera mieux armé pour prendre les bonnes décisions. Toutefois, il est à rappeler que seules les entreprises ayant atteint une certaine envergure peuvent se permettre d'investir de gros moyens financiers, humains et technologiques pour gagner en transparence.