« Il s'agit de proposer des créations théâtrales originales et des activités socioculturelles qui prennent en compte les spécificités des publics ciblés». La Caravane Nomade des deux rives est parmi nous. Après une préparation qui a duré plus de trois ans, le convoi artistique et errant est parti de Belgique fin mars, et arrivé en Tunisie le 6 avril. Cinq villes jusque-là ont été visitées : Sbeïtla, Gafsa, Sfax, Kairouan et Tunis ,du 11 au 13 mai. Reste Bizerte, la dernière escale. La Caravane a présenté un programme riche et varié, fait de spectacles de théâtre, de danse, de musique, d'expositions, ainsi que diverses autres animations pour enfants ont été organisées. Le public a suivi et apprécié « cet esprit de théâtre forain ». Les chiffres en témoignent : Sbeïtla : 12 225 spectateurs; Gafsa: 4 920 ; Sfax : 6 680. Mais encore 107 représentations de spectacles avec 28 concerts; 79 représentations de théâtre ou de performances artistiques; 24 animations et ateliers dispensés dans les écoles, les collèges et sous les chapiteaux; 295 artistes tunisiens et belges, amateurs et professionnels et plus de 60 techniciens tunisiens et belges. « Vu que tu es Noir » La programmation est commune aux six villes d'implantation. A celle-ci s'est ajoutée la programmation de spectacles locaux propres à chaque station. La Compagnie des Nouveaux Disparus a proposé, elle, «Le Mariage de Lila ». Une pièce de théâtre bilingue qui aborde la question du mariage mixte et de la diversité culturelle au sein d'un quartier multiculturel. Parmi les spectacles locaux présentés, les troubadours de Nabeul, 50 jeunes, enfants et animateurs sur scène ont interprété « les Fables de La Fontaine ». La troupe des bergers et Voix de Semmama ont présenté « Quand les Montagnes chantent », des chants d'amour et de résistance des montagnards. Le spectacle de Gafsa a été animé par Aymed Saad qui a présenté « Vu que tu es Noir », un spectacle humoriste d'un jeune qui raconte sa vie, mélangeant humour, dérision et vérité, en traitant la question de sa couleur de peau noire. DJ Achref a présenté, lui, un show musical dans un mélange de musique électronique et occidentale comprenant un rappeur et quatre danseurs. Diversité culturelle Christian Saelens, délégué Wallonie Bruxelles, se charge de mettre en contexte pour nous toute l'opération : «La délégation Wallonie-Bruxelles est une mission diplomatique qui anime la coopération bilatérale avec la Tunisie. Nous sommes présents en Tunisie depuis 30 ans. Notre mission a pour objet de coordonner notre programmation de coopération qui est un exercice qui se négocie avec le gouvernement tunisien ; le ministère des Affaires étrangères et plusieurs autres ministères sectoriels, dont celui de la Culture. Nous sommes également en contact avec d'autres acteurs privés. C'est en réponse à l'appel à projet que la compagnie de théâtre itinérante belge « Les Nouveaux Disparus », et l'association socioculturelle « We Love Sousse » tunisienne ont soumissionné de part et d'autre, afin de mener l'action de la Caravane des deux rives ». Jamal Youssfi, directeur artistique de la Compagnie des Nouveaux Disparus, précise, pour sa part, que : « Depuis sa création, la Compagnie cherche à établir des liens forts avec les pays du Maghreb. Une approche interculturelle sous-tend chacun de ses projets. Et bien plus que la diversité cultuelle, il s'agit de proposer des créations théâtrales originales et des activités socioculturelles qui respectent et prennent en compte les spécificités des publics ciblés en favorisant l'accessibilité culturelle comme vecteur de développement et d'égalité, ainsi que la diversité culturelle comme richesse à valoriser» . De beaux souvenirs Parmi les participants tunisiens, Thameur, coordinateur du projet, et Myriam, comédienne, sont partis en formation en Belgique et ont pris part à l'opération depuis le début. Tous les deux en parlent les yeux brillants, tous les deux ont appris des choses et tous les deux ont «aimé cette nouvelle expérience très enrichissante ». La caravane a favorisé, en effet ,la mobilité nationale des artistes tunisiens, invités à la suivre tout au long de son périple. «Comment ont été choisies les villes ? ». « En fonction de la réactivité des partenaires locaux», précise M.Youssfi, et d'ajouter : «Quand on arrive chez eux, on voit bien s'ils sont des travailleurs de terrain investis sur leur territoire ou non, si c'est une association opérationnelle ou seulement de vitrine». La station finale sera faite à Bizerte, du 19 au 22 mai. La caravane des deux rives rentrera ensuite chez elle, emportant de beaux souvenirs et quelques regrets. Des artistes, qui se sont liés d'amitié avec cette « aventurière » nomade, se sentiront comme abandonnés. Tout comme cette partie du public qui a assisté grâce à la caravane au premier spectacle de sa vie...