Une enquête conduite par le groupe Tawhida Ben Cheïkh a révélé une exposition élevée des jeunes à plusieurs facteurs de risque : sexualité non protégée, consommation de drogues... L'enquête que vient de mener le Groupe Tawhida Ben Cheïkh (Gtbc) sur les connaissances, attitudes et comportements en matière de santé sexuelle et reproductive ciblée sur la sexualité et l'avortement a révélé, avant-hier, à la faveur d'une conférence de presse, l'absence dangereuse de l'Etat duquel des mesures d'urgence sont demandées pour orienter les jeunes et leur offrir les services et l'information qui pourraient amoindrir leur vulnérabilité à ce sujet. «C'est une étude transversale pour évaluer les besoins, particulièrement pour pallier le manque d'information sur les connaissances et l'accès à l'avortement pour les jeunes», annonce Hédia Belhaj, présidente de l'association Gtbc. «Le sujet de cette enquête traite les difficultés des jeunes et surtout ceux des quartiers populaires à trouver des réponses à ce sujet. Nous avons pris pas moins de 8 mois pour réaliser ce questionnaire que nous avons beaucoup travaillé. C'est un travail de collaboration et de partenariat qui nous a beaucoup apporté en termes d'expérience, de contact et d'échange», commente Salma Hajri, SG de l'association. Le Groupe Tawhida Ben Cheikh (Gtbc) vient ainsi de financer, en puisant dans ses propres fonds, cette «enquête chez les jeunes sur les connaissances, attitudes et comportements en matière de santé sexuelle et reproductive ciblée sur la sexualité et l'avortement» auprès d'un échantillon de 1.062 jeunes de 15 à 24 ans issus du Grand-Tunis (cité Ettadhamen/Douar Hicher, Radès, cité Ennasser/El Menzah, avec 350 jeunes par quartier). Tabac, alcool et zatla aussi L'enquête, qui s'est faite à travers un questionnaire auto-administré en utilisant des tablettes iPad et qui a assuré les conditions idéales permettant la confidentialité, a fait ressortir neuf constats principaux : – Une vulnérabilité inquiétante. L'enquête s'est attachée à définir les facteurs de risque qui sont la cause de la grande vulnérabilité de ces jeunes dont particulièrement la consommation de tabac, d'alcool et de drogues (zatla en particulier). Elle a montré que la consommation de tabac touche les jeunes, surtout les garçons, dès l'âge de 15 ans et culmine pour la tranche d'âge de 23-24 ans, révélant que 9,4% des garçons enquêtés consomment la zatla d'une manière régulière et que 18,3% la consomment de temps en temps. – Un manque de connaissances alarmant en matière de santé sexuelle et reproductive. – Des lacunes importantes dans les connaissances en matière de SR (organes génitaux, contraception), la pilule étant assez bien connue mais plus de 60% ne connaissent pas la pilule du lendemain. – Une dominance des sources d'information non structurées (parents, internet dans plus de 70% des cas) alors que l'éducation sexuelle est quasiment absente. – Une pratique de la sexualité qui transcende les différences socio-économiques. – L'existence d'une sexualité qui commence dès l'adolescence malgré les tabous et interdits, et se manifeste d'abord par la libération du discours chez les jeunes (taux de réponse de plus 85%). L'enquête note un écart important dans les pratiques sexuelles entre les filles (21%) et les garçons (63%) mais sans différences notables liées au niveau socioéconomique et éducationnel et entre les différents quartiers. – Les différences dans les pratiques sexuelles sont significatives entre les différentes tranches d'âge. – Une méconnaissance des droits sexuels et reproductifs – Concernant l'avortement, de grandes lacunes dans la connaissance de l'efficacité et de l'innocuité des méthodes disponibles, auxquelles s'ajoute une connaissance très faible des droits reproductifs, en particulier des lois et du droit à l'avortement. Autant de constats qui sont rendus encore plus critiques par les conclusions de l'association Gtbc qui insistent sur l'absence de l'Etat par ses institutions à tous les niveaux dans l'éducation sexuelle et la prise en charge des jeunes. Gtbc appelle ainsi à la nécessité de mesures d'urgence pour orienter les jeunes et leur offrir les services et l'information adéquats, le programme d'éducation sexuelle restant aux yeux de l'association une priorité qu'il est urgent de mettre en place.