Par M'hamed JAIBI La rencontre, avant-hier, entre le président de la République et les députes du groupe parlementaire nidaïste, Sofiene Toubel en tête, est un tournant dans la crise qui affecte Nida Tounès et divise même, depuis quelques semaines, son groupe à l'Assemblée. Même si certains députés du groupe ont, pour différentes raisons, fait défaut, la grande majorité a répondu à l'appel, dont ceux qui ont entamé une scission du groupe et affirment soutenir Youssef Chahed. Cela représente une belle victoire du président qui pourrait lui donner des idées. Mais le nom de Youssef Chahed n'a pas été prononcé. Le chef de l'Etat a préféré centrer ses propos sur l'intérêt national, l'importance de l'unité de Nida Tounès et de son groupe parlementaire à l'effet de sauver le pays. Cette réunion de sauvetage de Nida Tounès à l'initiative de BCE ne semble donc pas devoir être la dernière, puisqu'elle n'a pas vraiment posé la problématique de la mise en minorité du gouvernement Chahed qui habite désormais le chef de l'Etat. Et la réunion d'avant-hier a montré à quel point tous les groupes ou clans nidaïste reconnaissent le leadership du président d'honneur du parti, Béji Caïd Essebsi, et sa capacité de changer les rapports de force en leur sein. Y compris, sans doute, ceux qui portent d'autres noms comme Machrou Tounès ou Tounès Awalen... Ce dernier n'a-t-il pas vu son président et fondateur, Ridha Belhaj, le quitter brusquement après avoir rencontré BCE, puis annoncer son retour à Nida Tounès. Il est important de rappeler ici qu'en fait tous les députes nidaistes historiques éprouvent sans faute une profonde considération pour Béji Caïd Essebsi qui frise la vénération pour son leadership charismatique exemplaire, qui a permis en moins de deux ans de renverser la vapeur à la tête de l'Etat « révolutionnaire » en rééquilibrant l'échiquier politique et en ramenant le projet de constitution de l'Assemblée nationale constituante qui était théocratique et islamiste en juin 2014, vers une configuration moderniste et civile conforme aux standards internationaux. De ce fait, personne ne peut douter de l'ascendant qu'exerce incontestablement le président Caïd Essebsi sur tous les nidaistes et l'ensemble des modernistes tunisiens. Et le chef de l'Etat, en convoquant « son » groupe parlementaire, compte sur ce pouvoir de séduction pour convaincre et ramener au bercail tous les députés du groupe parlementaire. En attendant, peut-être, de pousser la reconquête au-delà, d'abord en direction du groupe dit National et d'Al Horra puis, pourquoi pas, Afek Tounès , l'UPL et même des députes centristes de divers groupes, ainsi que tenter de s'assurer l'appui des groupes du Front populaire et des Abbou à un éventuel retrait de confiance au chef du gouvernement. Mais toutes les éventualités restent à envisager et certains parmi les députés du groupe nidaiste pourraient saisir l'occasion de ce face-à-face avec leur leader suprême pour critiquer certaines attitudes ou même proposer un changement radical qui convaincrait BCE. Qui sait ?