La belle station balnéaire de Yasmine-Hammamet est devenue, depuis mercredi dernier, la capitale mondiale du sport de la planche à voile, compétition maritime de réputation internationale à laquelle participent pas moins de 40 voiliers venus de nombreux pays des cinq continents. Le plus remarquable et réconfortant est que ce «great event» universel appelé «la route du jasmin» revient à Hammamet après trois ans d'absence, consécutivement aux tragiques attentats terroristes de 2015 qui avaient frappé l'hôtel Imperial de Sousse et le musée du Bardo. Bien évidemment, le come-back en fanfare de ce rendez-vous international qui fait la joie des mordus des jeux de la mer est à marquer d'une pierre blanche et a de quoi combler d'aise et de fierté toute une région (le gouvernorat de Nabeul) qui constitue l'un des fers de lance du tourisme tunisien. D'ailleurs, l'événement de Yasmine-Hammamet coïncide avec le retour en force, cet été, des touristes dans la région, comme en témoignent les chiffres suivants arrêtés au 20 juillet dernier : 431.000 arrivées en 2018, contre 350.000 en 2017, 1.800.000 de nuitées en 2018 contre 1.300.000 en 2017 soit respectivement une progression de 23% et de 41%. Ces hausses ont été engendrées par un retour fracassant des marchés russe et anglais, le premier étant à créditer d'une progression (arrivées et nuitées cumulées) de l'ordre de 49%, alors que le second a fait beaucoup mieux, en atteignant le taux inespéré de, tenez-vous bien, 1583 %! Un joli record qui relevait, jusque-là, de l'utopie et qui ira, sans doute, crescendo, en tenant compte des autres performances attendues entre le 20 juillet, date de ce bilan, et le reste de la haute saison estivale d'ici le 31 août. A quoi est dû ce bond spectaculaire, jugé d'une ampleur sans précédent par les hôteliers du Cap Bon? «C'est très simple» répond, visiblement radieuse, Mme Salwa Khiari, gouverneure de Nabeul qui impute cela aux préparatifs intensifs entamés depuis le mois de janvier dernier, en prévision de l'été 2018. «Nous avions, explique-t-elle, multiplié, depuis, les réunions aussi bien avec les professionnels du secteur qu'avec les trois commissariats régionaux au tourisme que compte le gouvernorat. Rien n'a été laissé au hasard et tout a été pris en considération jusqu'aux moindres détails, particulièrement au double niveau de la sécurité et des prestations de services à l'intérieur des établissements hôteliers. C'est que nous étions, toutes parties concernées, fermement décidés à mettre au service du tourisme tunisien tous les atouts dont se targue le gouvernorat de Nabeul, dont notamment 180 km de côtes, un grand nombre d'unités hôtelières, la proximité de l'aéroport Tunis-Carthage et du port de La Goulette ainsi que la richesse du patrimoine culturel de la région et le développement continu du créneau des circuits touristiques. Bref, nous avons mis le paquet et, Dieu merci, les performances ont été bien au-delà de nos attentes». Encore du pain sur la planche Si ledit gouvernorat peut donc s'enorgueillir d'avoir réalisé des résultats si flatteurs sur le plan touristique, si habitants et observateurs avertis s'accordent aussi à affirmer que la région a connu, au cours des derniers mois, un essor multidimensionnel réellement exceptionnel par rapport au passé récent, il n'en demeure pas moins vrai qu'il y a encore des ombres à ce tableau lumineux. Mme Khiari est la première à ne pas oser dire le contraire. «Certes, avoue-t-elle, nous sommes grosso-modo satisfaits de nos acquis. Mais taire les points noirs qu'on compte encore, c'est tout simplement bluffer». Et la gouverneure, réaliste, n'hésite pas à dénombrer les lacunes : - Fragilité de l'infrastructure de base, avec, notamment plusieurs des 26 municipalités du gouvernorat souffrant de plans d'aménagement dépassés et donc à actualiser, alors que d'autres en sont carrément privées. - Persistance du phénomène des constructions anarchiques - Insuffisances des ressources en eaux à cause de la sécheresse et de l'inexistence de barrages - Incapacité des décharges publiques d'absorber les tonnes d'ordures ménagères et autres détritus, les dépotoirs existants ayant été malheureusement conçus techniquement pour satisfaire les besoins de 800 mille habitants, sans avoir tenu compte, lors de l'étude du marché précédent l'exécution du projet, d'une prévision déterminante, à savoir que cette population passe au double chaque été que Dieu fait. «A ces quatre facteurs, poursuit la gouverneure, on peut ajouter les insuffisances dont souffre encore le plan directeur d'assainissement (eaux pluviales et eaux usées) qui n'a pas pris en considération l'extension galopante et l'explosion démographique qu'a connues la région. Tout cela sans compter que des projets de développement tardent à se concrétiser, faute de disponibilité de sources de financement, au moment où d'autres n'ont pu démarrer pour des raisons foncières et juridiques». Du rôle du citoyen Apparemment, toutes ces lacunes et carences, en dépit de leur gravité, ne semblent pas décourager outre mesure la gouverneure de Nabeul qui assure, avec assurance, que «nous sommes ici tous prêts à agir, main dans la main, pour relever ces défis. Et nous y parviendrons, inchallah, à la faveur de cette union sacrée que je ferai personnellement tout pour préserver, voire renforcer. Toutefois, je voudrais m'adresser aux habitants pour les sensibiliser et les responsabiliser davantage quant à la nécessité de s'impliquer plus profondément dans notre œuvre de développement qui se veut collective, et cela en faisant preuve de plus de compréhension, de civisme et de sens de citoyenneté. Car, c'est avec eux que notre gouvernorat pourra avancer».