Par Jalel Mestiri Pendant de longues années, la Tunisie a investi dans des politiques et des infrastructures sportives sans grand intérêt. Encore moins un véritable fondement. Même pas une quelconque raison d'être. La logique peu inspirée et rarement ouverte au diapason des nouvelles technologies sportives a fait que beaucoup de sportifs, de clubs et de sélections n'en ont aucunement profité. Plusieurs équipes se trouvent aujourd'hui sans…"stade fixe'' et sont obligées d'évoluer comme si elles jouaient en déplacement. Pour la première fois dans l'histoire du football tunisien, le derby de la capitale a eu lieu en dehors de ses bases. L'absence de moyens est souvent l'argument le plus évoqué pour parler du problème des infrastructures sportives. En quelque sorte, il y a une part de vérité dans ce genre d'argumentation. Mais il n'y a pas que cela. Ce sont encore et toujours les idées qui manquent. Les initiatives et les stratégies aussi. Les volontés, les bonnes, assurément… Une infrastructure sportive n'est justifiée et envisageable que si elle répond à un besoin et vient remplir une fonction. La vocation liée à l'infrastructure sportive dépend souvent de la rentabilité. Il est facile de comprendre, et par conséquent de déduire, que sans infrastructures sportives en bon état, il est difficile d'enclencher une vraie dynamique sportive… Même chose pour les études récurrentes et alternatives, ainsi que les démarches d'identification. Quelles sont les régions les mieux équipées ? Y a-t-il une corrélation entre besoin et réalité? A quoi devraient servir les infrastructures quand elles sont détachées de leur milieu, de leurs réalités sociales, de leur réalité sportive ? Celles qui voient le jour ne s'ajoutent-elles pas à celles déjà inadaptées ? Le gazon artificiel (reconnu par la Fifa) ne peut-il pas être une solution alternative d'autant qu'il s'adapte aux conditions climatiques, qu'il supporte la fréquence d'utilisation et surtout revient beaucoup moins cher ? La question de fond tourne essentiellement autour du bien-fondé de certains investissements et de l'échec d'une politique souvent inadaptée. L'état des terrains et les conditions d'une compétition professionnelle suscitent des interrogations quant à la pertinence de la politique sportive en matière d'infrastructures. Le problème de l'entretien et de la subsistance est au fond à l'origine de la dégradation de l'état de l'infrastructure sportive en Tunisie. Les municipalités ne parviennent pas, ou ne parviennent plus, à s'acquitter du rôle qui leur est imparti en matière d'entretien. La modestie de leurs ressources humaines, financières et matérielles ne leur permet point de procéder outre mesure. Résultat : un abaissement et une déchéance plus que jamais inquiétants. Dans leur majorité écrasante, les municipalités ne maîtrisent pas les normes techniques d'entretien et de protection du gazon naturel. Privés de discernement, et surtout de visibilité, les responsables de l'infrastructure ont pris l'habitude de céder à la facilité. Le réflexe « acquis » les replonge dans un certain laisser-aller. C'est une grande frustration pour un pays comme la Tunisie, qui a ses traditions, ses coutumes, ses mythes et ses légendes aussi, que de n'avoir pas de politique ni de stratégie en matière d'infrastructure sportive. Ni assez de résolution pour évoluer. C'est toute l'impertinence dans sa version de tous les jours, de tous les maux. Les défaillances de l'infrastructure sportive trouvent aussi leur origine dans le déficit d'autorité. L'incapacité à faire respecter les règles est liée au refus d'incarner une autorité associée à un ordre bien défini. Oui pour l'entente, l'alliance, la concorde. Non, cependant, pour la persistance de l'impunité Sur fond de soupçons de corruption, l'environnement dans lequel évolue le sport souffre d'un changement artificiel. Ce qui a été entrepris jusque-là en demi-mesures s'est avéré inadapté, dénué, incomplet et dans les meilleurs des cas un palliatif. Nous sommes conscients du fait que le sport est aussi fait d'erreurs et de maladresses, parfois inévitables, mais il y a des défaillances qui ne peuvent constituer une excuse aux dérapages. Il n'est plus difficile de comprendre que cela met à nu l'inaptitude à se relancer. Il est temps de questionner les échecs qui ont accompagné la réalisation des différentes infrastructures. De tenter d'en comprendre les ressorts internes. Mais surtout quelles ressources à mobiliser pour l'avenir? Quel financement? Quelle spécificité? Quels interlocuteurs? Quel environnement? Chacun doit être placé devant sa responsabilité.