Quelque 287,700 tonnes de dattes promettent l'approvisionnement du marché national et des marchés internationaux, conventionnels soient-ils ou nouveaux, en « deglet ennour ». Les palmeraies n'ont pas failli à leur mission ! Certes, la récolte des dattes propre à l'année 2018/ 2019, ayant démarré en octobre dernier, a été marquée par une sensible régression. Cela dit, ces chiffres en baisse n'ont pas intrigué les professionnels de cette filière. En effet, et selon les données fournies par Mme Rim Dridi, sous-directrice chargée du suivi des filières et des recherches appliquées au Groupement interprofessionnel des fruits (GIF), la production de la présente année est de l'ordre de 287, 700 tonnes, contre 305 mille enregistrées en 2017/ 2018 ; soit une baisse de – 5,7%. «L'année 2017/ 2018 a connu un pic de production. La récolte de la présente année obéit, donc, aux normes quantitatives et n'incite aucunement à l'inquiétude», explique-t-elle. Sur les 287,700 tonnes de dattes produites cette année, on compte 228,400 tonnes des «doigts de lumière» ou des dattes appelées communément «deglet ennour». Cette dernière s'affiche comme étant la principale variété produite en Tunisie et dont la renommée dépasse les frontières par sa qualité inégalée. Néanmoins, sa production a, elle aussi, chuté un tant soit peu. Elle s'élevait, en 2017/ 2018, à 241 mille tonnes ; soit une baisse de l'ordre de -5,4%. Une baisse qui n'intrigue point ! La répartition géographique traduit une régression quasi généralisée, à l'exception de Gafsa qui a su maintenir sa production annuelle à dix mille tonnes. En effet, Kébili a produit, cette année, quelque 194 mille tonnes de dattes contre 200 mille tonnes l'an passé ; soit une baisse de -3%. Tozeur avait produit 65 mille tonnes de dattes en 2017/ 2018. Cette année, elle n'a pu garantir que 58,700 tonnes, enregistrant ainsi une baisse de -10%. Quant à Gabès, les oasis ont produit 25 mille tonnes, contre 30 mille l'an dernier, soit une diminution de -16,6%. Cette évolution négative revient, selon la responsable, à des facteurs d'ordre climatique. «La production des dattes dépend étroitement des facteurs climatiques, dont certains lui sont favorables et d'autres défavorables. Pour la présente saison, les conditions climatiques n'ont pas servi la pollinisation des palmiers dattiers. Faute d'une pollinisation optimale, l'on a eu droit au phénomène de « sich » ou de dattiers non pollinisés, d'où la baisse de la production», explique la responsable. Par ailleurs, et outre «deglet ennour», d'autres variétés tout aussi succulentes mais de renommée moins prépondérante, ont contribué à hisser la production de quelques milliers de tonnes. C'est le cas de « Alig », « Khouet », « Kenta », « Rochdy » et autres, lesquelles ont garanti quelque 59,300 tonnes contre 64 mille produites en 2017/ 2018 ; soit une baisse de l'ordre de -7,2%. « Ces variétés constituent des variétés précoces en comparaison à « deglet ennour ». Elles sont destinées essentiellement à la consommation autochtone, c'est-à-dire aux consommateurs des régions mêmes de leur production », renchérit Mme Dridi. «Deglet ennour» : la mono-variété Ainsi, seule « deglet ennour » détient la part de lion en matière de production, et ce, pour sa rentabilité certifiée aussi bien au niveau de la commercialisation nationale que sur le marché international. Elle représente, selon Mme Dridi, la variété sur laquelle parie la filière et ce, depuis les années 80. Aussi, constitue-t-elle, depuis, la « mono-variété » de ce domaine d'activité. S'agissant de la commercialisation des dattes, la responsable ne peut s'empêcher de revenir sur la campagne-phare de 2017/ 2018, laquelle — et grâce au pic de production — avait permis d'enregistrer le chiffre record de 130 mille tonnes de dattes commercialisées, contre seulement 110 mille en 2016/ 2017. La commercialisation des 130 mille tonnes de dattes avait permis d'étoffer l'économie nationale de 766MD contre seulement 570MD en 2016/ 2017. Quant à la présente campagne de commercialisation, elle suit son cours depuis le premier octobre 2018. Depuis cette date et jusqu'au 12 février 2019, quelque 53,700 tonnes de dattes ont été exportées, d'une valeur de 377MD contre 51,500 tonnes, en 2017/ 2018, soit 314 MD et pour la même période. «C'est dire qu'il est toujours possible de pallier sur la baisse de la production via l'évolution des quantités vouées à l'exportation », commente Mme Dridi. Le Maroc : premier marché de «deglet ennour» Il est bon à savoir que l'exportation de « deglet ennour » est à dominante recrudescente grâce, entre autres, à la diversification des marchés internationaux et à la conquête de nouveaux marchés. Les délices des oasis de la Tunisie envahissent 85 marchés à travers le monde. Ceux conventionnels demeurent, indéniablement, le Maroc, mais aussi ceux de l'Union européenne. L'Italie en a importé 5 mille tonnes depuis le premier octobre 2018 et jusqu'au 12 février 2019, contre 5,3 mille tonnes durant la même période en 2017/ 2018. L'Espagne vient d'importer 4,500 tonnes contre 3,800 tonnes pour les périodes précitées. Mais le premier marché international en matière d'importation des dattes tunisiennes demeure, incontestablement, le Maroc avec 35 mille tonnes, exportées en 2017/ 2018. La conquête des marchés nord-américains et sud-asiatiques Pour résister à la concurrence marquant les marchés conventionnels, la Tunisie mise davantage sur la conquête de nouveaux marchés. La Malaisie, l'Indonésie, Singapour, l'Inde, mais aussi l'Amérique du nord, notamment les USA et le Canada, constituent, depuis près de cinq ans, les nouvelles pistes d'exportation des dattes tunisiennes. En effet, les USA ont importé 3,300 tonnes depuis le premier octobre 2018 et jusqu'au 12 février 2019, contre 2,700 tonnes pour la même période l'an dernier. Cela dit, l'Italie et l'Espagne chapeautent encore la liste des marchés importateurs de « deglet ennour », devancés néanmoins par le Maroc. La concurrence algérienne a eu, certes, droit de la primauté des dattes tunisiennes en France. Mais la conquête de nouveaux marchés avance, tout de même, à pas lents et sûrs. D'ailleurs, l'Indonésie a importé, cette année, 4.000 tonnes de dattes tunisiennes. Toutefois, les résultats demeurent en deçà des estimations escomptées pour le marché indien. «Deglet ennour» peine à développer sa part du marché en Inde malgré que ce pays accapare, à lui seul, 70% des exportations mondiales de dattes. Cela dit, nos dattes continuent à être fort prisées par d'autres marchés, soit par d'autres consommateurs plus sélectifs. Le marché américain, à titre d'exemple, exige des dattes dénoyautées. La Malaisie exprime, quant à elle, son intérêt pour ce produit de terroir puisqu'elle en a importé 2,800 tonnes cette année contre 2.000 l'an dernier pour la même période », indique Mme Dridi. L'évolution continue… En dépit de la rude concurrence, des soubresauts de la production et des conditions climatiques, la courbe des exportations suit une trajectoire croissante. Il suffit d'ailleurs de réexaminer les chiffres relatifs à 2008/ 2009 pour constater l'évolution. En ce temps-là, les quantités de dattes destinées à l'exportation se limitaient à 70 mille tonnes. Elles ont presque doublé en une décennie, puisqu'elles ont atteint les 130 mille tonnes en 2017/ 2018. Ce progrès revient au travail fourni dans l'optique d'optimiser la qualité des dattes et en particulier de « deglet ennour », de sa valorisation et de sa promotion à l'échelle mondiale. Il revient à la persévérance de près de 60 mille producteurs et de 210 exportateurs, dont 105 stations de conditionnement regrées et 105 sociétés de commerce international. Ceci dit, le travail se poursuit afin de booster cette filière. Le GIF vient, en effet, de fignoler la stratégie de développement des dattes pour la décennie 2020/ 2030.