Le secteur privé ne peut se contenter d'un rôle consultatif en tant que société civile, d'où la mise en place de cette plateforme qui se veut le porte-parole du secteur privé dans ces négociations. Le processus de négociation doit être un processus ouvert et le secteur privé doit avoir une place centrale dans l'organe de gouvernance des négociations. Une nouvelle plateforme du secteur privé sur le processus des négociations autour de l'Accord de libre échange complet et approfondi (Aleca) a été lancée récemment par plusieurs organisations professionnelles pour peser sur ce processus et faire entendre leurs voix. Conscientes de l'importance du défi que représente cet accord pour l'économie tunisienne, ces organisations regroupant l'Iace (l'Institut arabe des chefs d'entreprises), l'Utica (l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce, et de l'artisanat), la Conect (la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie), l'Utap ( l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche), le Synagri (le syndicat des agriculteurs de Tunisie ), le CJD ( le Centre des jeunes dirigeants), l'Aptbef (l'Association professionnelle des banques et des établissements financiers), l'AIB ( l'Association des intermédiaires en bourse), l'OIT (l'Ordre des ingénieurs tunisiens), l'OPT ( l'Ordre des pharmaciens tunisiens), l'Onat (l'Ordre national des avocats tunisiens), le Cnom (le Conseil national de l'ordre des médecins), l'Oect (l'Ordre des experts comptables de Tunisie), la Ftusa ( la Fédération tunisienne des sociétés d'assurances), et la FTH (Fédération tunisienne de l'hôtellerie), représentant le secteur privé, sont les premiers concernés par l'impact de ces négociations. Processus ouvert Ainsi, « le secteur privé ne peut se contenter d'un rôle consultatif en tant que société civile, d'où la mise en place de cette plateforme qui se veut le porte-parole du secteur privé dans ces négociations. Le processus de négociation doit être un processus ouvert et le secteur privé doit avoir une place centrale dans l'organe de gouvernance des négociations». Cette plateforme reste ouverte à toute force vive du secteur privé pour enrichir la réflexion. Elle sera chargée de renforcer le rôle du secteur privé dans les négociations autour de cet accord. Cette nouvelle plateforme est présidée par l'Utica, et l'Iace en assure le secrétariat général. Ces organisations qui constituent la plateforme seront appelées « à engager des discussions avec le gouvernement et le négociateur en chef pour s'accorder sur la place et le rôle du secteur privé dans les divers organes de gouvernance et de gestion des négociations avec l'Union européenne». Ce rassemblement des organisations professionnelles du secteur privé «se veut à la hauteur des opportunités et défis que représente cet accord en cours de négociation et le secteur privé se devait de montrer sa capacité d'engagement dans la défense des intérêts des entreprises tunisiennes dans la perspective de cet accord». Instrument à la carte Rappelons que la Tunisie a décidé, en effet, et de façon souveraine, d'entamer avec l'Union européenne les négociations d'un accord de libre-échange complet et approfondi dès le mois d'octobre 2015 dans le cadre d'un partenariat privilégié agréé le 19 novembre 2012, et qui fixe les axes prioritaires pour renforcer les relations bilatérales. L'objectif de l'Aleca est l'intégration progressive de l'économie tunisienne dans le marché unique de l'Union européenne afin d'augmenter et de diversifier les exportations du pays, améliorer son climat d'investissement et faciliter les réformes économiques engagées par la Tunisie. Une priorité particulière est accordée aux mesures qui permettraient de favoriser les investissements européens et internationaux, d'améliorer la gouvernance économique, de lutter contre la corruption, et de renforcer l'intégration économique régionale entre la Tunisie et ses voisins de la rive sud de la Méditerranée. L'Aleca s'appuiera sur les engagements existant dans le cadre de l'Accord d'association euro-méditerranéen conclu entre la Tunisie et l'UE en 1995, et sera un accord complet sur les relations commerciales et économiques entre les parties couvrant une gamme complète des domaines d'accès au marché et réglementaires d'intérêt commun. «L'Aleca est donc l'instrument au service du rapprochement entre la Tunisie et l'UE et «non pas une fin en soi. Il est un instrument parmi d'autres dans le cadre d'un partenariat privilégié signé en 2012, qui accompagne la Tunisie dans sa démarche vers le progrès et la modernité et qui comprend la participation au programme de recherche d'ici 2020, les négociations sur le partenariat pour la mobilité et le renforcement de la coopération bilatérale depuis la révolution», précise Ghazi Ben Ahmed, president du Think Thank Mediterannean Developpemnt Initiative ( MDI). Rien n'est imposé Et d'ajouter que «rien n'est jamais joué d'avance sans examiner les intérêts offensifs et défensifs, et si on ne prend pas en compte l'état de l'économie tunisienne qui, des années après la révolution, n'a pas réussi à redémarrer sur une nouvelle base». Depuis 2015, il y a eu très peu de choses qui ont été faites. La Tunisie «n'a pas donné officiellement sa réponse. Certains disent que l'UE a imposé des mesures. Au contraire, pour l'instant rien n'a été imposé, ni négocié, ni décidé». L'importance de cet accord est claire, «si on tient compte des données des échanges commerciaux entre les deux parties, qui montrent que l'UE a absorbé les 3/4 du total des exportations de la Tunisie et est la source de plus de la moitié de ses importations». La Tunisie, qui a besoin d'exporter et d'IDE pour créer de la croissance et créer des emplois, doit effectuer un certain nombre de réformes coûteuses pour être plus compétitive. «Elle n'a d'autres solutions que de se rapprocher de l'UE et de s'intégrer à son marché. L'Aleca est désormais un instrument à la carte. Nous pouvons en faire ce que l'on veut pour arriver à nos fins et réaliser notre vision. Le contexte socioéconomique délicat que connaît la Tunisie ces dernières années nécessite une facilitation qui ne peut venir que de l'UE principalement». L'Aleca vient compléter l'ouverture existante par une intégration plus poussée de la Tunisie dans l'économie européenne, en réduisant les obstacles non tarifaires, simplifiant et facilitant les procédures douanières, libéralisant le commerce des services, en assurant la protection de l'investissement et harmonisant les réglementations dans plusieurs domaines de l'environnement commercial et économique.