La Fédération Tunisienne d'Athlétisme (FTA) a recruté, depuis le mois d'août dernier, un entraîneur national des épreuves combinées et du saut à la perche, Wilfried Krantz. Assez jeune (né le 10 août 1980), Krantz a, cependant, une dizaine d'années d'entraînement dans son escarcelle. C'est qu'il a investi ce champ dès l'âge de 19 ans. L'ancien décathlonien du Stade Bordelais s'est spécialisé dans la formation des jeunes, surtout après que sa carrière a été stoppée suite à une blessure sur une chute. Dès son arrivée en Tunisie, il a gagné rapidement l'estime des responsables de la FTA, de ses collègues et des athlètes qui sont à sa charge. Il nous livre dans ce qui suit un aperçu sur sa mission et ses projets à la tête de l'élite nationale des épreuves combinées et du saut à la perche. Qui est Wilfried Krantz ? En fait, j'ai un parcours un peu atypique. J'étais élève de l'INSEPT en région parisienne, où j'ai fait mes années collège et lycée, avant de rejoindre Bordeaux pour intégrer le Stade Bordelais, un des meilleurs clubs français d'athlétisme, un club centenaire. Je me suis investi pendant dix ans dans ce club à la fois en tant qu'athlète et entraîneur. J'ai passé mes premiers diplômes d'entraîneur à l'âge de 19 ans afin de pouvoir entraîner et m'entraîner en même temps. Au début, je me suis occupé des jeunes minimes et cadets, avec qui j'ai réussi. Je les initiais à de multiples épreuves en leur faisant découvrir l'athlétisme, au sens large du terme. Par la suite, je les envoyais dans différents groupes de spécialisation dans les catégories juniors, espoirs et seniors. En tant que décathlonien, j'ai été international et mon record était de 7200 points. J'ai essayé d'atteindre la barre des 7500 points, mais une vilaine chute dans une épreuve de saut à la perche a compromis ma carrière. Après quoi, je me suis consacré à ma carrière d'entraîneur. Pour ce qui est de ma venue en Tunisie, j'ai assuré une formation à l'ISSEP de Sfax, et c'est là où le contact avait commencé. Le travail commence Pourriez-vous nous dresser l'état des lieux de l'athlétisme tunisien tel que vous l'avez trouvé ? J'ai commencé par contacter Hamdi Dhouibi et comme je savais qu'il avait un objectif pour les championnats d'Afrique de Nairobi, nous nous sommes mis à préparer ce rendez-vous. Egalement, j'ai dû mener une enquête auprès des différents décathloniens et athlètes des épreuves combinées, notamment, ceux croisés lors des championnats scolaires. Je me suis rendu compte que la plupart des athlètes des épreuves combinées n'étaient pas spécialement préparés pour faire des épreuves multiples. Ils travaillent, souvent, des spécialités plus que d'autres. J'ai, immédiatement pris les meilleurs athlètes et je les ai incité à s'installer à Tunis. Bien entendu, je demeure en contact permanent avec ceux qui n'ont pas pu se déplacer dans la capitale et nous organiserons des regroupements et des stages destinés aux athlètes de Sousse, Sfax et de Bizerte. Au niveau de la perche, j'avoue que ça a été plus facile, parce qu'il y a des groupes d'entraînement assez solides un peu partout. En revanche, le problème consiste au manque de matériel et des équipements, notamment le nombre de perches. Il y avait un savoir-faire au niveau de la perche, mais il fallait coordonner les actions et fusionner toutes les forces. C'est ce que j'ai réussi à faire avec Jamel Ben Mohamed, entraîneur de la Garde nationale qui effectue un travail extraordinaire sur le terrain. On peut dire qu'on est pratiquement deux en tant qu'entraîneurs nationaux. On verra ce statut plus tard, mais pour l'instant nous avons un fonctionnement à deux qui semble porter ses fruits. Nous avons organisé, récemment, à Nabeul, une formation destinée aux entraîneurs de perche et nous aurons un deuxième volet au mois d'avril 2011 avec l'arrivée, notamment, de Thierry Vigneron, ancien recordman du monde, qui pourra proposer des planifications d'athlètes de perche de haut niveau. Pour résumer, mon action consiste à rendre les athlètes autonomes, à parvenir à faire de l'initiation au saut à la perche et à les hisser au plus haut niveau. En collaborant avec des entraîneurs et formateurs de renommée mondiale, j'ai pour objectif d'instaurer une approche d'excellence et d'expertise. Qu'avez-vous planifié jusqu'à maintenant pour votre mission à la tête de l'élite nationale ? Pour l'instant, on prévoit un stage du saut à la perche, du 20 au 28 décembre, à Sousse. Ce stage réunira nos meilleurs perchistes en vue de préparer la saison hivernale. Ensuite, on se retrouvera, à Clermont Ferrand (Centre de la France), au mois de février 2011, avec 4 athlètes d'épreuves combinées, 4 sauteurs à la perche et un sauteur en longueur, pour parfaire la préparation de la saison hivernale, qui comportera des championnats régionaux, inter-régionaux, avec la possibilité de participer aux championnats nationaux de France, et pourquoi pas se rapprocher des podiums. Suite à çela, et toujours au cours de la saison hivernale, j'ai proposé aux perchistes d'effectuer un stage d'une semaine à Talence (dans la région de Bordeaux), sous la houlette de Thierry Vigneron qui est en mesure de les amener à franchir les 5 mètres pour les garçons et les fameux 4 mètres pour les filles. Un programme spécifique pour Dhouibi A quelques mois des Championnats du monde d'Athlétisme en Corée du Sud, quels sont les objectifs et les chances des athlètes tunisiens, tout particulièrement Hamdi Dhouibi et Alaeddine Ben Hassine ? Pour Hamdi Dhouibi, on peut dire que l'objectif demeure pour l'instant, s'il n'est pas, bien sûr, blessé, de rentrer dans le top 8 aux Championnats du monde, ce qui exige un programme assez riche. Il avait une douleur au dos, depuis quelques mois et il a fallu un grand travail avec le corps médical tunisien. Il était passé tout près du billard, d'ailleurs les médecins français voulaient l'opérer. On s'est rendu compte ici en Tunisie qu'on avait la possibilité avec un travail de gainage et d'équilibre des chaînes musculaires d'éviter l'intervention chirurgicale et gagner ainsi du temps. Pour cela, je tire le chapeau devant les compétences tunisiennes. Actuellement, il effectue un travail de renforcement des chaînes musculaires. Ensuite, il ira passer deux mois au Qatar pour un stage sous la direction de Ramil Ganeiev, un entraîneur de décathlon mondialement reconnu et un ancien grand décathlonien. Ensuite, il viendra à Tunis pour y passer trois semaines sous mes directives avant d'enchaîner avec les perchistes au mois de mars lors d'un autre stage sous la houlette de Thierry Vigneron. L'objectif étant de sauter plus de 5 mètres, saut qui lui permettra de glaner pas mal de points au décathlon. Il effectuera, ensuite, un stage de quatre semaines en Afrique du Sud. Sa première épreuve sera du 13 au 15 mai à Descenzano en Italie avec pour objectif de se rapprocher le plus possible des minima qualificatifs aux championnats du monde. Suite à quoi, il participera au plus grand décathlon au monde, à Gotzis en Autriche, avant de prendre part à un meeting à Kladno en République Tchèque. Nous poursuivrons après le travail en fonction des performances de la première partie de la saison. Pour ce qui est de Alaeddine Ben Hassine, c'est pareil, c'est un athlète que j'ai récupéré blessé en début de saison, avec une douleur assez importante au pied. Nous nous sommes rendus compte qu'il a quelques problèmes osseux au niveau du calcanéum, mais qu'il n'a pas besoin d'une intervention chirurgicale. Nous menons, en ce moment, un travail remarquable de podologie pour qu'il ait des appuis plus solides. Ensuite, il fera la saison hivernale avec un objectif de sauter 7m50. Cette performance sera un grand pas dans la quête des 8 mètres, qualificatifs, normalement, à la Corée du Sud, même si on n'a pas encore les minima. L'objectif demeure, aussi, de battre le record de Tunisie, détenu par Hamdi Dhouibi (7m 92) et de prendre des repères pour la saison estivale. Il y a, aussi, Aymen Ben Mohamed avec qui on a dû effectuer un grand travail au début de la saison. Il était aussi blessé et avait des problèmes au niveau des adducteurs. D'ailleurs, il n'est pas passé loin d'une pubalgie. Il lui reste à accomplir un gros travail en termes de renforcement des chaînes musculaires au niveau du bassin.