KABOUL (Reuters) — Robert Gates a mis en garde hier à Kaboul contre un excès d'optimisme dans la lutte contre les talibans, tout en croyant détecter «quelques parcelles de bonnes nouvelles» dans l'offensive américaine dans le sud du pays. Le secrétaire américain à la Défense s'est rendu en Afghanistan pour faire le point avec le Président Hamid Karzaï et les généraux américains sur la lutte contre la guérilla, qui monte en puissance avec l'arrivée progressive des renforts ordonnés par Barack Obama. Quelques heures après l'arrivée du responsable américain, les talibans ont fait la démonstration de leur capacité grandissante à frapper en attaquant un bâtiment administratif à Khost, dans le sud-est du pays, près de la frontière pakistanaise. «Des jours très difficiles» sont encore à venir, a averti d'emblée Robert Gates. «Je ne crois pas qu'il faille extrapoler les développements positifs qu'on peut lire», a-t-il souligné, jugeant prématuré de parler de tournant dans ce conflit qui est entré en novembre dans sa neuvième année. «Les premiers signes sont encourageants, mais je crains que les gens ne fassent preuve d'une impatience excessive et embellissent le tableau. Des jours difficiles nous attendent encore», a averti le secrétaire à la Défense. Robert Gates, qui effectue sa première visite à Kaboul depuis l'annonce de la nouvelle stratégie américaine, centrée sur l'envoi de 30.000 soldats supplémentaires, s'est félicité des succès de l'offensive entamée à la mi-février dans la province méridionale d'Helmand, où la ville de Marjah a été reprise aux talibans. Il a indiqué qu'il recevrait du général Stanley McChrystal, chef des forces alliées en Afghanistan, un rapport actualisé sur l'évolution de l'offensive. Pas de jour «J» à Kandahar Le cas de Kandahar, berceau de la milice islamiste, sera également au menu de ses discussions. Un membre de l'administration Obama a fait savoir le mois dernier que l'armée américaine avait l'intention d'en prendre le contrôle total à brève échéance et les observateurs annoncent déjà une étape décisive dans le conflit. Le général McChrystal a récemment fait savoir que des unités alliées seraient progressivement déployées dans les mois qui viennent à Kandahar, mais qu'il n'envisageait pas une attaque frontale comparable à celle de Marjah. «Il n'y aura pas de Jour J (...) ce sera une montée en puissance progressive des mesures de sécurité», a-t-il précisé, en soulignant qu'un gros travail de «gouvernance» était nécessaire en amont. Le numéro un du Pentagone a en outre fait savoir à l'Iran, dont le Président est attendu en Afghanistan cette semaine, que Washington ne tolérerait aucune atteinte à son effort de guerre de la part de Téhéran, bien que rien ne laisse entrevoir une telle évolution pour le moment. La communication en direction d'une opinion de plus en plus sensible au bilan de cette guerre sera une arme décisive pour les Etats-Unis et leurs alliés, dont le temps est compté. Barack Obama a promis d'entamer le rapatriement du corps expéditionnaire américain en juillet 2011. Au sein de son gouvernement, on estime toutefois que la présence militaire américaine ira très au-delà de cette échéance. Le secrétaire à la Défense évoquera en outre avec Hamid Karzaï le processus de réconciliation proposé aux talibans. S'il espère des défections aux niveaux subalternes, Robert Gates ne cache pas son scepticisme quant au succès de l'entreprise auprès des cadres du mouvement tant qu'une victoire militaire leur semble possible. «Mon opinion est qu'il n'en sont pas là pour le moment. Je pense qu'il faut en faire davantage. Après tout, nous n'avons encore que 6.000 des 30.000 hommes attendus en renfort en Afghanistan», a-t-il observé.