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Eparpillement et statu quo
Qui est Ben Ali ? ( 9e partie)
Publié dans La Presse de Tunisie le 13 - 02 - 2011

L'éparpillement des partis empêchait la création d'un pôle d'opposition face au RCD. Les raisons de cet échec sont souvent idéologiques (la difficulté de s'entendre sur une position commune vis-à-vis des islamistes). Elles tiennent aussi de considérations de leadership. Le pouvoir en a largement profité pour garder le statu quo
A côté des huit partis légaux déjà présentés, la Tunisie compte plusieurs partis dit «illégaux», car non autorisés par le gouvernement, mais qui disposent d'une certaine audience parmi la population. C'est le cas, notamment, du Parti ouvrier communiste tunisien (Poct, extrême-gauche révolutionnaire), actif dans les milieux universitaire et syndical, le Congrès pour la République (CPR, libéral démocrate), fondé par Dr Moncef Marzouki, ancien président de la Ltdh, Tunisie verte (TV, écologiste de gauche) et surtout, le parti Ennahdha (Renaissance), héritier du Mouvement de la tendance islamiste(MTI). Fondé en 1981, ce parti a adopté son nom actuel en 1989. Dirigé par Rached Ghannouchi, proche des Frères musulmans égyptiens, Ennahdha a fait beaucoup de concessions dans l'espoir de se voir accepter par les autres forces politiques, mais ses demandes successives de légalisation ont toutes été refusées, la loi ne reconnaissant pas de partis fondés sur une base religieuse. Les législatives de 1989, qui ont vu la participation de listes indépendantes soutenues par Ennahdha, ont permis au mouvement de remporter près de 15% des suffrages. Cette démonstration de force semble avoir alerté le régime sur les capacités de mobilisation de ce mouvement très ancré parmi les classes populaires et moyennes. Le régime n'a pas tardé à sévir. Certains dirigeants du mouvement ont donc dû fuir à l'étranger, comme Ghannouchi, exilé à Londres depuis la fin des années 1980. Ceux d'entre eux qui n'ont pu fuir à temps ont tous été arrêtés et condamnés à de lourdes peines de prison pour complot contre l'Etat. Tous ou presque, ont été libérés après avoir purgé leurs peines, mais ils restent soumis aux procédures de contrôle administratif, s'ils ne sont pas assignés à résidence. Mais, malgré la surveillance étroite dont font l'objet ses membres, Ennahdha est loin d'avoir été démantelé. On peut même affirmer qu'il a repris ses activités plus ou moins clandestinement, en se positionnant de nouveau dans les structures estudiantine, syndicale et associative, en espérant reprendre bientôt sa place sur l'échiquier politique. La Tunisie est donc aujourd'hui, avec la Syrie et la Libye, l'un des rares pays de la région à renier encore aux islamistes le droit de créer un parti et de participer à la vie politique. Cette position intransigeante, adoptée depuis 1991 et jamais abandonnée depuis, n'a pourtant pas mis fin au fondamentalisme religieux. Au contraire, certains analystes pensent même qu'elle a dopé le mouvement islamiste et renforcé son influence sur une jeunesse aux prises avec une grave crise d'identité.
Au jour le jour
Car, malgré les efforts de l'Etat pour combattre l'islamisme politique, assécher ses sources, réduire la pauvreté qui en fait souvent le lit, assurer un contrôle strict des 4 000 mosquées que compte le pays, encadrer les imams et harmoniser les contenus de leurs prêches, intégrer les écoles coraniques dans le système éducatif national, purger les programmes d'enseignement des scories obscurantistes, encourager l'esprit rationaliste, bref moderniser la pratique de l'Islam, beaucoup de Tunisiens se montrent encore attentifs aux prêches des prédicateurs extrémistes d'Egypte, d'Arabie Saoudite et d'ailleurs. De même, beaucoup de Tunisiennes choisissent de porter le foulard (hijab), à la manière de leurs consœurs du Machreq, alors que les autorités veillent au grain, appliquant scrupuleusement la circulaire n° 108 de 1981 interdisant le port du foulard dans les écoles et les lieux publics. Nombre des leaders d'Ennahdha, qui ont été libérés sous caution, en plusieurs vagues successives, depuis 2003, après avoir purgé l'essentiel de leur peine, ont commencé à réapparaître, mais encore timidement, sur la scène publique. Pour autant, ils ne sont pas devenus libres de leurs mouvements. La plupart d'entre eux doivent pointer tous les jours au commissariat de police de leur quartier. Traumatisés par la répression subie, les islamistes vivent encore dans la peur et au jour le jour. Ils savent qu'ils peuvent retourner en prison à tout moment, à la faveur d'un nouveau procès. Cela ne les empêche pas de sortir peu à peu au grand jour et faire exister leur mouvement. En s'affichant dans les réunions publiques et en s'exprimant dans les médias étrangers et sur le réseau Internet, ils cherchent à se présenter sous un profil différent, celui d'islamistes démocrates, à l'instar des chrétiens démocrates européens. Ils parlent désormais de liberté individuelle et de droits de l'Homme et clament leur acceptation du Code du statut personnel, promulgué par Bourguiba en 1956, qui interdit la polygamie et accorde aux femmes le droit de divorcer. Ils ont même ébauché un dialogue, à défaut d'une véritable alliance, avec certains mouvements de l'opposition laïque, libérale et de gauche, qui avaient pourtant soutenu, par le passé, la politique répressive à leur égard du régime de Ben Ali. Ainsi, l'un des membres du mouvement a pris part à la grève de la faim observée par huit personnalités politiques, en octobre et novembre 2005, pour protester contre l'absence de libertés politiques et d'expression. Cette grève de la faim, qui a eu un large écho à l'étranger, a donné naissance au Mouvement du 18 octobre pour les droits et les libertés, une plateforme démocratique, où cohabitent des militants de gauche, d'extrême gauche et des islamistes d'Ennahdha. Les autorités ont certes ébauché, elles aussi, en novembre 2004, un dialogue avec Ennahdha, lorsque l'un des dirigeants du mouvement en Europe a été reçu par l'ambassadeur de Tunisie à Berne en Suisse, un énième rendez-vous (sciemment) manqué et dont le pouvoir n'attendait visiblement ni l'esquisse de dialogue ni l'amorce d'une réconciliation. C'était une simple manœuvre de diversion qui visait à susciter des divergences au sein du mouvement islamiste.Quoi qu'il en soit, la rencontre de Berne, qui n'a jamais été annoncée officiellement à Tunis, n'a pas eu de suite. Elle a eu pour conséquences de renforcer l'aile dure du régime, de radicaliser une frange de l'opposition, qui a lancé le Mouvement du 18 octobre et relancé le débat parmi les islamistes sur l'intérêt d'une reprise du dialogue avec un régime qui refuse toujours de légaliser leur mouvement. Débat qui a eu pour seul résultat, à ce jour, de diviser davantage la nébuleuse islamiste en plusieurs factions exprimant des positions parfois contradictoires. Après avoir pris langue avec les islamistes, en diverses occasions, comme démontré ci-haut, les autorités critiquent aujourd'hui vivement le rapprochement entre la gauche et ces mêmes islamistes, qu'elles qualifient d'«alliance contre nature entre l'extrémisme religieux et l'extrême-gauche». «L'histoire et l'expérience nous ont appris qu'à chaque fois que les gauchistes se sont alliés aux fondamentalistes religieux, ils ont toujours fini par être avalés par eux», disent-elles, en allusion à la révolution iranienne de 1979, confisquée par les mollahs.
Alliance gauche-Ennahdha
Ce rapprochement a également suscité des remous au sein de la gauche elle-même. Ses partisans soutiennent qu'Ennahdha doit pouvoir jouir du droit à l'existence et à l'expression libre dans la légalité démocratique, au même titre que les autres composantes de l'opposition. Ils soulignent aussi que l'unité d'action avec les islamistes est non seulement souhaitable mais nécessaire. Car, l'éparpillement de l'opposition n'a profité jusque-là qu'au régime et n'a servi qu'au maintien du statu quo. De même, la gauche ne peut pas compter sur ses forces propres pour provoquer, dans un temps prévisible, une libéralisation qui se fait attendre depuis des décennies. Elle a donc besoin de l'apport des islamistes, les seuls capables de mobiliser le plus grand nombre de gens. Les partisans du rapprochement avec les islamistes avancent un autre argument : toutes les forces politiques seront appelées, un jour, à cohabiter avec les islamistes. Il conviendrait donc de s'accorder dès maintenant sur les «règles fondamentales de cette cohabitation», dans le cadre d'un «pacte» délimitant les fondements intangibles de la société démocratique (égalité des sexes, liberté de conscience, bannissement des châtiments corporels, rapport de l'Islam avec l'Etat, protection des minorités, etc.)Le plus fervent partisan de cette démarche, Me Néjib Chebbi, a justifié sa position ainsi‑: «En Tunisie, l'expérience démocratique, démarrée vers la fin des années quatre-vingts, aurait pu faire de notre pays un modèle sur les plans aussi bien économique que politique. Mais elle a tourné court à cause, notamment, de la politique d'éradication, qui a fait avorter cette expérience sans arriver à son but de venir à bout de l'islam politique». Il ajoute : «S'il y a, vis-à-vis des islamistes, une politique commune à l'ensemble de la région, elle devrait être celle du Maroc, qui cherche à intégrer ce phénomène et non à l'exclure. Car la démocratie est inclusive et non exclusive.» Pour le leader du PDP, la solution réside donc dans «l'intégration des intégristes». Et ceci est d'autant plus possible, à ses yeux, que «l'islamisme a beaucoup évolué et qu'il intègre désormais la culture démocratique. On ne peut parler d'Ennahdhacomme on parlerait des talibans ou des salafistes  jihadistes. Ce sont deux phénomènes totalement différents.»Les adversaires de cette démarche rejettent en bloc l'idée d'une «alliance à tout prix» avec les islamistes, tant que ces derniers continuent de vouer aux gémonies les démocrates et les «ilmaniyîn» (laïcs) et de réaffirmer leur fidélité aux pères fondateurs du fondamentalisme. Pas d'alliance avec les islamistes tant que ces derniers n'ont pas abandonné leur idéologie obscurantiste et renoncé publiquement à leur «programme d'islamisation de l'Etat et de la société», par l'application de la charia (loi islamique).La relance de ce vieux débat n'est pas pour déplaire au régime, qui n'est pas mécontent devoir l'opposition donner d'elle-même l'image d'«une nébuleuse chaotique et rongée par lesluttes intestines», selon l'expression du même Chebbi. C'est cet éparpillement qui empêche la création d'un important pôle d'opposition face à l'Etat-parti du RCD. Les raisons de cet échecsont souvent idéologiques (la difficulté de s'entendre sur une position commune vis-à-vis des islamistes). Elles tiennent aussi de considérations de leadership. La plupart des dirigeants, quiont soixante ans et plus, semblent pressés de cueillir les fruits de décennies de combat. Or, lepouvoir n'est pas à prêt à céder et prive ses adversaires de tout espace d'expression, nelaissant aucun espoir pour une alternance prochaine.
A suivre


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