À partir d'aujourd'hui, la circulation chamboulée sur l'avenue Taïeb Mhiri pour six mois    Où et quand suivre Tunisie–Mauritanie, le match amical de ce mercredi ?    Drones en Tunisie : des mesures pour encadrer leur usage    Non-allaitement: Un silence couteux que la Tunisie ne peut plus se permettre    Ooredoo Tunisie s'associe à Dora Chamli pour promouvoir le padel et le talent tunisien sur la scène mondiale    La SNIT met en vente de nouveaux logements à Sidi Hassine dès aujourd'hui    1 Tunisien sur 6 touché par le diabète : un appel urgent à la sensibilisation    Météo en Tunisie : temps partiellement nuageux, températures en légère hausse    La BTE franchit une étape stratégique: migration réussie vers le standard international SWIFT ISO 20022    Nouvelle taxe sur la richesse : ce que les Tunisiens doivent savoir    Tougaï quitte le rassemblement des Fennecs    Démographie: Radioscopie d'une Tunisie en profonde mutation    Ooredoo Tunisie s'associe à Dora Chamli pour promouvoir le padel et le talent tunisien sur la scène mondiale    Une première intervention de chirurgie robotique en Tunisie réalisée avec succès à l'hôpital Charles-Nicolle de Tunis    Marathon COMAR de Tunis-Carthage dans une 38e édition : Courons pour une Tunisie plus verte    Hikma Tunisie ouvre sa troisième unité de production à Tunis : Hikma Pharmaceuticals renforce sa présence en Tunisie    Hafida Ben Rejeb Latta ce vendredi à Al Kitab Mutuelleville pour présenter son livre « Une fille de Kairouan »    QNB Tunisia inaugure la première agence QNB First à Sfax    Tunis, prépare-toi : les matchs amicaux des Aigles se jouent plus tôt    Tunisie : 2000 bâtiments menacent la vie des habitants !    Quand Mohamed Salah Mzali encourageait Aly Ben Ayed    Météo du mardi : douceur et ciel partiellement voilé sur la Tunisie    La pièce Les Fugueuses de Wafa Taboubi remporte le Prix de la meilleure oeuvre de la 3e édition du Festival National du Théâtre Tunisien    Amina Srarfi : Fadl Shaker absent des festivals tunisiens    Dhafer L'Abidine à la Foire du Livre de Sharjah : Les histoires doivent transcender les frontières    Météo en Tunisie : averses isolées au nord    Sarkozy fixé ce soir sur sa libération    Tunisie: Financement de projets d'excellence scientifique    Décès du Pr Abdellatif Khemakhem    Match EST vs CA : où regarder le derby tunisien du dimanche 09 novembre 2025?    La Fête de l'arbre: Un investissement stratégique dans la durabilité de la vie sur terre    Nouvelles directives de Washington : votre état de santé pourrait vous priver du visa américain    Justice tunisienne : 1 600 millions pour lancer les bracelets électroniques    Tunisie : Le budget de la Culture progresse de 8 % en 2026    L'Université de la Manouba organise la 12è édition du symposium interdisciplinaire "Nature/Culture"    Qui est Ghazala Hashmi, la musulmane qui défie l'Amérique ?    Qui est le nouvel ambassadeur de Palestine en Tunisie, Rami Farouk Qaddoumi    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    Suspension du Bureau tunisien de l'OMCT pour un mois : les activités à l'arrêt    Elyes Ghariani: Comment la résolution sur le Sahara occidental peut débloquer l'avenir de la région    Mondher Khaled: Le paradigme de la post-vérité sous la présidence de Donald Trump    Congrès mondial de la JCI : la Poste Tunisienne émet un timbre poste à l'occasion    Attirant plus de 250 000 visiteurs par an, la bibliothèque régionale d'Ariana fait peau neuve    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    Ligue 1 – 11e Journée – EST-CAB (2-0) : L'Espérance domine et gagne    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Lettre manuscrite de l'Emir du Koweït au président Kaïs Saïed    Taekwondo : la Tunisie s'impose parmi les quatre meilleures nations    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La ruée vers le centre
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 10 - 09 - 2012


Par Hédi BEN ABBES
Nous apprenons qu'en physique il y a deux mouvements fondamentaux, le mouvement centripète et le mouvement centrifuge, le premier consiste à drainer des éléments disparates vers le centre de gravité alors que le deuxième tend à expulser tout corps étranger pour cause de non adhérence. Il en va de la physique comme de la politique, les deux mouvements s'appliquent de la même manière à des formations politiques qui aspirent à s'agglutiner vers le Centre dans un mouvement contre nature alors que le mouvement centrifuge finira par les expulser vers les périphéries dont ils sont originaires. Précisons qu'il n'y a aucune connotation péjorative à la notion de périphérie, il s'agit tout simplement de l'endroit dont l'objet est originaire et comme disent les Anglo-Saxons «its station in life !
Si l'on reconnaît à la nature des règles immuables qui assurent un savant équilibre qui nous renvoie à des spéculations métaphysiques, il n'est pas exclu que l'on reconnaisse à la science politique des règles qui régissent un ordonnancement sans lequel l'anarchie s'emparerait de la vie publique. A l'image de l'ordonnancement selon le diagramme de Gantt dans les réalisations de projets, l'ordonnancement politique dépend de la nature du projet initial, sa ou ses références idéologiques, la consistance du noyau fondateur, ainsi que son cap politique qui confèrent au projet une identité et un positionnement sur la carte politique et donc «its station in life». Or ce qui caractérise la vie politique tunisienne ces derniers temps, c'est un mouvement, que dis-je, une ruée vers le Centre de l'échiquier politique, tours, fous, reine, roi, pions tous au galop à cheval vers ce Centre devenu encombré par ce mouvement centripète contre nature.
Soyons un peu plus clair ! A la suite de la chute du dictateur un certain 14 janvier 2011, plusieurs partis politiques se sont formés en prenant position sur l'échiquier politique selon le diagramme de Gantt en respectant leur « station in life » aussi bien à gauche, qu'à l'extrême gauche, à droite qu'à l'extrême droite avec des arborescences et des émanations qui gravitent autour de ses positionnements ayant comme références toutes sortes d'idéologies ou de mode de pensées. De toutes les grandes formations politiques ou du moins celles qui sont bien en vue, on distingue sommairement deux «stations» (pour respecter la même terminologie) ou projets d'ordonnancement, à savoir la gauche avec ses variantes (Poct, Ettajdid, Alliance de Gauche, etc...), la droite avec ses composantes et ses différentes références y compris la référence théologique (PDP/Joumhouri, Ennahdha, Ettahrir, etc...). Chacune de ces formations revendiquait haut et fort son ancrage en veillant à se distinguer de toutes les autres et allant parfois même à proposer des programmes économiques et des projets de société tantôt pour homogénéiser l'ensemble dans un modèle uniformisant, tantôt pour individualiser au point que chaque homme devient une île comme dirait John Donne, et la société un ensemble d'individus mus par l'obsession de l'intérêt personnel selon le modèle crypto-RCDiste ou néo-RCDiste qui vient de voir le jour il y a quelques semaines. Toutes ces formations existaient dans l'opposition de l'une à l'autre et dans très peu de cas avec de réels projets de société et une vision claire de l'avenir de la Tunisie. Ce qui compte c'est d'exister dans la négation de l'Autre, en évacuant l'Autre, compensant la vacuité des projets et ainsi contraignant les électeurs au choix par défaut ou sur des critères autres que les critères objectifs (programme économique, social, politique, culturel) d'où l'emploi de toutes sortes de manipulations allant du marketing politique à la corruption par l'achat pur et simple des suffrages en passant par le clientélisme avilissant. La polarisation était de mise, au point qu'une formation s'était même donné le label de « Pôle » !!!
Au milieu de tout ce beau monde, coulait non pas une rivière, comme dans le film de Robert Redford, mais le Congrès pour la République, une véritable émanation du Centre de l'échiquier. Un parti qui n'a jamais exclu les autres (sauf le RCD), qui a comme « station » plusieurs références idéologiques qui rompent avec le positionnement dogmatique qui fige le mouvement pour adopter une attitude ouverte fédérant un ensemble d'idées dans un projet de société qui a su saisir l'âme du Tunisien dans sa volonté de trouver un équilibre reposant sur des milliers d'années de mouvements d'idées et d'interactions culturelles. Le centre de l'échiquier politique tunisien est la « station in life » du CPR, la matrice dont il est issu. Contrairement aux autres formations politiques le CPR ne fait pas de l'exclusion de l'Autre sa raison d'être, son actuel président d'honneur n'était-il pas allé jusqu'à appeler à voter pour les formations qui se trouvaient aussi bien à sa droite qu'à sa gauche, reconnaissant ainsi l'importance du pluralisme politique et affirmant ainsi la spécificité de son parti solidement ancré à la fois dans sa référence arabo-musulmane et dans une posture d'ouverture sur l'Autre sur fond de droits humains universels et inaliénables. Ce particularisme politique confère au CPR une identité en osmose avec l'essence même de notre « tunisianité » dans sa volonté consciente ou inconsciente de réduire le fossé qui sépare le centre des périphéries et ainsi offrir un projet d'une République de citoyens sans nivellement uniformisant ni polarisation individualisante.
Pourquoi donc une telle ruée vers le Centre ? Que s'est-il passé depuis le 23 octobre 2011 qui expliquerait un tel phénomène ?
L'enseignement le plus flagrant que nous pouvons tirer des résultats des élections du 23 octobre nous révèle le tissu socio-politique de la Tunisie qui se caractérise par un conservatisme de revendication. Autrement dit, la réponse à la volonté farouche de l'ancien régime de réduire et de contrôler l'espace d'expression religieuse a fait naître chez le Tunisien une frustration telle qu'être libéré de la chape de plomb signifie aujourd'hui pour lui le plein exercice d'une liberté retrouvée qu'elle soit sous la forme religieuse ou politique avec les excès que l'on constate ça et là. Cette forme de conservatisme avec la floraison de tous ses signes distinctifs s'est traduite aussi dans les urnes par le vote en faveur de la formation islamiste, un vote dont une bonne partie de l'électorat n'a aucune motivation idéologique ou politique, mais plutôt une expression de cette volonté de réparer « l'affront » religieux, culturel et politique rappelant ainsi à la Tunisie son identité mixte que la parenthèse RCDiste et sa marche forcée vers une forme de « modernisme » a tenté d'escamoter. Ce conservatisme réparateur a surpris plus d'une formation politique aussi bien à droite qu'à gauche au vu des résultats des élections et les a amenés à revoir leur copie en abandonnant le discours de la «modernité» dont ils ont fait leur emblème et leur étendard brandi face aux «conservateurs» et principalement face au mouvement d'Ennahdha. On constate aujourd'hui que les « modernistes » d'hier se sont mués en défenseurs des valeurs de l'Islam et des traditions et clament à qui veut bien les entendre leur attachement aux valeurs arabo-musulmanes truffant leur discours de versets du Coran et de références religieuses. Ils brûlent aujourd'hui leurs idôles d'hier quand ils parlaient des valeurs de modernité qui voulaient tout simplement dire les valeurs occidentales et plus particulièrement la francophilie du moins pour une bonne partie d'entre eux.
De l'autre côté de l'échiquier, nous assistons aujourd'hui au même mouvement mais dans l'autre sens, les conservateurs d'hier qui ont bel et bien profité de cet élan de conservatisme passager chez les Tunisiens tentent par tous les moyens de se démarquer de cet estampillage idéologique pour revendiquer un centrisme et une ouverture qui rompent avec le dogmatisme en parlant de « modération », et même de modernité. En définitive, les modernistes se démarquent de la modernité pour aller vers le conservatisme, et les conservateurs se modernisent et tout ce beau monde se trouve dans ce fameux Centre dont ils découvrent aujourd'hui des vertus socio-politiques qu'ils ignoraient hier !
Ignorance dis-je, oui parce qu'il y a une donnée socio-psychologique que tous ces partis fraîchement convertis au centrisme semblent perdre de vue, à savoir l'intelligence et la mémoire du Tunisien. Le Tunisien n'est pas dupe au point de ne pas se rappeler les discours polarisants de tous les partis de gauche comme de droite, les uns voulant une Tunisie qui tourne le dos à l'Est et ses valeurs « conservatrices » les autres une Tunisie qui tourne le dos à l'Ouest et ses valeurs « dégradantes ». Pendant ce temps-là le CPR maintenait son cap en revendiquant contre vents et marées cette identité tunisienne mixte où les quatre points cardinaux, l'Est et l'Ouest, le Nord et le Sud se rejoignent. Tous les esprits binaires accusaient le CPR de ne pas avoir une identité claire, soit à droite, soit à gauche, soit conservateur soit « moderniste » mus qu'ils étaient par une volonté de simplification réductrice, ne comprenant pas encore que la Tunisie se gouverne par le Centre. Que n'avons-nous pas entendu sur le CPR accusé d'être tantôt une émanation d'Ennahdha, tantôt un parti « athée », tantôt un parti gauchiste tantôt un parti conservateur. Ses détracteurs étaient et sont encore incapables de comprendre que les vieux clivages conservateurs/modernistes, Orient/Occident sont bel et bien dépassés, que l'évolution des peuples n'obéit pas à ces schémas essentialistes, mais plutôt à des facteurs exogènes et endogènes dans une interaction incontrôlable.
Aujourd'hui conservateurs et modernistes se ruent vers le Centre, vers cette « tunisianité » pour l'exploiter politiquement, tous revendiquent leur ancrage arabo-musulman et leur ouverture sur le monde, d'Ennahdha au Poct, en passant par l'ancien « Pôle » jusqu'au nouveau conglomérat de composantes disparates soumis à la pression d'un accélérateur de particules dénommé «Appel de la Tunisie» qui découvrent soudain qu'ils sont centristes et que c'est à l'appel de cette Tunisie devenue tout d'un coup orpheline qu'ils répondent ! D'aucuns diraient, heureusement que le ridicule ne tue pas ! Recyclage d'anciens «modernistes» à la carte, ultraconservateurs politiquement et économiquement, gauchistes dogmatiques, crypto-islamistes se lancent dans un mouvement centripète artificiel, contre nature, pour s'approcher non pas de l'essence de la nature centriste du peuple tunisien et ainsi proposer un choix de société qui y correspond, mais plutôt pour exploiter politiquement la «tunisianité» et se replier ultérieurement sur leurs bases naturelles qu'elles soient à droite ou à gauche, modernistes ou conservatrices mais qui ne resteront certainement pas au Centre là où évolue naturellement le CPR. Comme le dit le proverbe populaire : «Ne gisent dans le lit de la rivière que ses propres pierres».


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.