Par Faïza AZZOUZ AZAIEZ * L'Unft est un acquis historique, c'est une organisation née avec l'indépendance, elle a été la courroie de transmission de la volonté politique de l'ère Bourguiba pour la vulgarisation du CSP. Dans l'après-Bourguiba, l'Unft (seule organisation de femmes implantée dans toutes les régions), a fait une tentative d'autonomie et a fait appel à des femmes indépendantes pour renforcer ses rangs. Craignant l'après-Bourguiba et une remise en question des acquis du CSP, quelques unes ont répondu à l'appel et ont amplifié la nouvelle voix de l'Unft. L'Unft ne se voulait plus être seulement l'appareil de l'Etat mais se voulait désormais porte-parole des militantes. Un nouvel objectif est d'ailleurs apparu dans ses textes‑: «Agir comme groupe de pression sur le pouvoir». Faut-il rappeler qu'au début des années 90 l'Unft a payé pour son élan d'indépendance, elle est devenue «persona non grata». Des conflits ont éclaté dans les régions où les représentantes de l'Unft ont été contrées par les structures des femmes du RCD. Mais l'euphorie démocratique a été de courte durée. Chemin faisant, la récupération de l'Unft a repris. Cette récupération a été d'autant plus facile que les présidentes, les unes après les autres, se sont plus préoccupées de leur trajectoire personnelle que de répondre aux aspirations des militantes. L'abus de pouvoir y était devenu monnaie courante. Il était plus important de plaire aux autorités pour monter au firmament que d'écouter les voix de la base. Oui, les voix, car l'Unft ne parle pas d'une seule voix, elle représente toutes les couches sociales, tous les niveaux et toutes les régions. Finalement, l'objectif d'agir comme groupe de pression sur le pouvoir a subitement disparu des textes et des pratiques. Néanmoins, l'Unft, malgré ses imperfections, est un acquis national. C'est "un syndicat" de femmes et un mécanisme de réseautage utile. C'est un héritage national. Au-delà de la qualité ou de la mauvaise qualité des personnes, il y a une structure historique à préserver et à récupérer dans les meilleures conditions pour qu'elle puisse jouer encore mieux son rôle demain pour les futures générations. Faut-il rappeler que c'est l'Unft qui a organisé le grand forum international pour la Paix en 1991(contre la guerre en Irak), 1.500 personnes étaient présentes de tous bords et des sommités internationales y ont participé. C'est encore l'Unft qui a envoyé ses militantes sur le bateau de la Paix qui se sont fait agresser par les paras américains en pleine mer. L'Unft a aussi mené des études qui ont été à l'origine de lois importantes comme l'étude sur la déperdition scolaire des jeunes filles en milieu rural ou celle sur la violence conjugale. En fait, l'Unft, en séparant le bon grain de l'ivraie, en éliminant les «opportunistes», qui n'y sont que pour avoir un dividende sur le dos des femmes, pourrait renaître de ses cendres avec une nouvelle génération de femmes indépendantes, honnêtes et intègres. L'Unft doit se reconstruire loin de toute récupération politique partisane. Il faut qu'elle retrouve l'image de son emblème original : une femme moderne, cheveux au vent, avançant avec détermination sur la voie d'un développement humain et égalitaire ! Quelles que soient ses erreurs, l'Unft a toujours été un mécanisme de promotion des droits des femmes. Aujourd'hui, il y a urgence, les femmes ne peuvent se permettre de faire la fine bouche, il faut sauver les acquis ! Il faut du sang nouveau, il faut s'unir malgré les divergences.