Les professionnels du tourisme et autres curieux enthousiastes auront à cœur de découvrir ce document imposant intitulé Mélodie d'une vie, signé Habib Bennour, ce pionnier de l'hôtellerie à Sousse. L'auteur y remue une bonbonnière de souvenirs tapis dans le labyrinthe des années fugitives. Interview. Bon pied, bon œil, Habib Bennour a une mémoire d'éléphant. A preuve, son livre riche de 234 pages au papier soyeux. Soit un vrai kaléidoscope, reflétant les multiples facettes de ses relations familiales, professionnelles ou amicales. Très lié à Sousse, sa base natale, l'homme aura affiché un bel enthousiasme dès les premiers frémissements de notre tourisme national. Un homme pluriel L'homme coule des jours heureux. Ce qui l'a encouragé à concocter, avec bien des petites joies intérieures, cet ouvrage en langue française, strié d'une chaîne d'entretiens, rondement menés par Adel Ben Youssef, son ami, que nous saluons au passage. Souligner qu'en vrai mélomane, Habib Bennour aura réservé une part belle à bien des artistes sous tous les cieux, par lui, jugés «estimables et adorables», dit-il. Hélas, faute d'espace, il n'est pas possible de les citer tous. Curieux de tout, il dispose d'une photothèque impressionnante. Preuve que ce Soussien pur jus est un homme pluriel, capable de s'intéresser à tout. Et on peut après lecture de son livre aimer ce qui l'intéresse. Actif, cet hôtelier aux sourires ensoleillés n'est pas près de prendre un coup de vieux. Du reste, demandez-lui son âge et il vous répondra par une croustillante image, sans vous répondre vraiment. A savoir «qu'il a mille ans et qu'il est né ce matin», murmure-t-il sur un ton badin. Encore quelques regards rétrospectifs sur sa carrière : très tôt, il s'offre, volontaire, le droit d'oser. Grimpe-t-il ainsi l'ascenseur social, à la force des poignets? Non, à la force des jarrets, pour être précis. «La vie», dit-il, lui rappelle la bicyclette. «Si l'on s'arrête de pédaler, on chute». Preuve que cet homme n'a jamais fait l'éloge de la paresse. Autre registre, autre commentaire. Comme le fer et l'émail Dites-lui, le plus sérieusement du monde, que la vie est fragile, friable et éphémère. Dites-lui que les amis d'hier ne sont pas forcément les amis d'aujourd'hui et il affichera son désaccord. Pour l'en convaincre, servez-lui cette citation célèbre de Jacques Brel. A savoir que «les amis sont comme les fiacres, on n'en trouve jamais quand il pleut». Aussitôt dit, Habib Bennour se renfrogne. Tout bonnement parce que les siens ne l'ont «jamais déçu». Est-il donc le compagnon de Dame chance? Confirmation, en face. «Tant mieux, tant mieux». Vous apprendrez qu'il vit avec les siens autant qu'avec ses amis en parfaits complices. Un peu comme le fer et l'émail. Au final, et sans transition, si vous évoquez la récente «révolution du Jasmin», vous aurez droit à un regard aux couleurs d'un optimisme contagieux : «Cet événement historique ne peut que libérer de bonnes senteurs». C'est-à-dire «le calme, la joie, la sérénité. Et je m'en réjouis». Se réjouir aussi face «au travail qui doit reprendre sérieusement ses droits dans notre pays». Ajouter que cet homme aura mis souvent ses rêves au niveau de la réalité, lui, dont la vie s'écoule comme un fleuve tranquille. Enfin, souhaite-t-il, en humaniste, lancer un appel émouvant à ceux qu'il aurait involontairement offensés : «Leur demander pardon». Précision de taille : le secret de son livre se résume en quelques mots : avoir cédé volontiers le «vedettariat» à ceux et à celles qu'il estime. Conclure que Habib Bennour aura réalisé bon nombre de ses idées. Avec encore des idées en chantier, toujours riche d'une vitalité joyeuse.