Pourquoi cette appellation «El Majd» ? Les initiales du terme «majd» résument déjà les principes fondateurs du parti : «mim» c'est «mouatana» (citoyenneté), «jim» c'est «joumhouria» (République) et «dall», c'est «dimoûqratia» (démocratie). Ensuite, le mot «majd» est un mot récurrent dans notre hymne national, exemple de «halloumou, halloumou limajd el watan» ou de «ila izzi Touness, ila majdiha», ou encore de «lakal majdou ya Touness», c'est un bon référent sémantique à mon avis. Il y a enfin l'avantage de la concision. Dans la floraison des intitulés longs, ce n'est certainement pas de refus. Comme exprimés dans vos statuts, les principes et les objectifs du parti peuvent paraître un peu inaccessibles au public moyen. Si vous aviez à les synthétiser dans un souci didactique, comment vous y prendriez-vous ? Je dirais, citoyenneté, République, démocratie englobent tout. Sous le régime déchu, nous étions considérés comme des sujets, des objets. Ce régime a échoué parce qu'il n'a pas pu placer le Tunisien au cœur de la citoyenneté politique. Il a vidé la citoyenneté de son contenu qui est : participation à la politique, droits et devoirs des citoyens, égalité devant la loi, libertés individuelles et collectives. La République, c'est la souveraineté du peuple : l'expression de sa volonté. Elle n'est ni divine, ni héréditaire, ni oligarchique, ni tribale, ni clanique, ni sultanique. Et elle se traduit par des élections libres où la magie consiste en ce que les volontés individuelles dans l'urne se muent en volonté collective. La démocratie n'est pas un rituel, juste le geste du vote, mais un processus continu. La démocratie est une culture, une conception des relations dans la Cité. C'est surtout l'expression de la volonté de la majorité en même temps que le respect de la minorité. Pour nous, aussi la démocratie ne peut être que nationale, globale. Elle doit être transposée à tous les échelons, de la petite cellule au haut du pouvoir. Notre système politico-administratif reste basé sur la nomination, non pas sur les élections. Exemple des cantons (moôtamdiat) qui sont encore dirigés par des «omdas» désignés. Nous sommes convaincus que cette conception «caïdale», verticale a fait échouer le développement. Si on veut réussir le virage démocratique, il faut remplacer ce système par des conseils élus sur tout le territoire de la République. La transition démocratique suscite moult commentaires, où résident ses difficultés d'après vous ? Dans le manque de légitimité, je crois qu'aller directement à des élections présidentielles eût été préférable. Les rouages actuels fonctionnent dans l'incertitude. Avec un exécutif élu d'emblée, il y aurait eu moins de défiance dans l'opinion et chez la classe politique. Sans compter que les investisseurs étrangers et l'aide étrangère en général n'auraient sûrement pas montré d'hésitation en ayant à traiter avec un vis-à-vis légitime. C'est en tout cas ce que disent nos amis européens.