Etroitement lié à la bonne santé du tourisme, l'artisanat a été durement touché par la crise qui a secoué ce secteur ces six derniers mois. Les artisans arrivaient, jusqu'ici, à réaliser de petits bénéfices sur la vente de leurs produits en les écoulant dans les souks. Leurs principaux clients : les échoppes et les touristes qui, de passage, achètent des articles artisanaux de souvenir. Or, le nombre de touristes en visite en Tunisie a chuté de façon vertigineuse, se traduisant par des répercussions négatives sur la commercialisation des produits des artisans. Pour relancer le secteur et promouvoir le produit artisanal, l'Office national de l'artisanat (ONA) a, déjà, dressé un plan de crise qui prévoit la multiplication des foires et des salons. Le dernier en date: le salon de Sousse, qui se tient du 17 au 26 juin et qui accueille quelque 151 exposants venus des différentes régions de la Tunisie, offre aux créateurs et artisans l'opportunité d'exposer leurs produits dans diverses spécialités (broderie, bijoux traditionnels, textile, tapis...). L'Office a décidé de donner leur chance aux jeunes, en consacrant 30% de l'espace aux diplômés de l'enseignement supérieur qui ont monté des projets d'artisanat et qui exposent pour la première fois. Les difficultés que rencontre le secteur et le manque à gagner lié à l'activité de l'artisanat n'ont pas réussi à venir à bout de la passion de ces jeunes qui ont choisi de suivre une voie différente des études qu'ils ont effectuées, choisissant de se lancer dans l'artisanat. Elles s'appellent Mariem, Manel, Ferdaous, Kalthoum et ont remis au goût du jour des matières comme le jonc, les fleurs de palmier, le bois d'olivier, le cuivre, en osant des alliances dans le but de faire du moderne à partir du traditionnel. Doctorante, Manel Ben Moussa, qui a suivi ses études à l'Institut supérieur des métiers du patrimoine, a revisité le patrimoine tunisien et berbère en confectionnant des bracelets, des colliers, des boucles d'oreilles en argent et en laiton gravé. Cette dernière a apporté une touche moderne, en mêlant la rihanna, ce long collier d'inspiration berbère, avec de la pâte d'ambre, des pierres précieuses, du tissu et en créant plusieurs modèles qui connaissent un franc succès auprès de ses jeunes clientes. " En apportant une touche de modernité, je voulais sortir de l'oubli certains vieux bijoux berbères en les faisant aimer des jeunes adolescentes ", relève l'artisane. Dans un autre stand, ce sont de belles djellabas féminines aux couleurs vives qui attirent le regard. Contrairement aux djellabas traditionnelles qui se portent amples afin de ne pas gêner les mouvements de la ménagère, Basma Kifaya, une jeune étudiante qui poursuit des études de français et qui a décidé de monter son propre projet, a eu l'idée, elle, d'introduire des variations dans le modèle classique de la djellaba féminine en créant des habits traditionnels qui mettent en valeur les courbes féminines. " C'est une jeune parente, couturière, qui m'a donné l'idée de monter un projet de confection de djellabas. Nous avons commencé avec quatre machines à coudre. Aujourd'hui, nous avons notre propre atelier et nous approvisionnons les grossistes. Nous ne nous contentons pas de confectionner des djellabas classiques. Nous varions à chaque fois le modèle, en introduisant une nouveauté. A titre d'exemple, j'ai confectionné des djellabas féminines qui moulent le corps en ayant l'idée de changer le col classique par un col d'officier. Nous avons également pensé à confectionner, à partir du même tissu et en gardant les mêmes motifs en broderie, des tuniques et des pantalons bouffants. Ce modèle a eu du succès, notamment auprès des touristes ". Autre jeune promotrice, Kalthoum, la trentaine, qui a suivi une formation professionnelle dans le tissage, a monté son propre atelier il y a six ans. La jeune femme décide de créer des sacs à main à partir des couffins en osier en les agrémentant de motifs en similicuir en forme de fleurs... Prévoyant d'agrandir son projet, la jeune femme pense déjà diversifier les modèles en confectionnant de nouveaux types d'accessoires sur la même base, c'est-à-dire en mariant les matières, notamment les fibres végétales, et le similicuir. " J'aurais voulu utiliser le vrai cuir, mais malheureusement cela coûte cher, je n'en ai pas les moyens ". Pour encourager ces jeunes promoteurs, l'Office a décidé de mettre à leur disposition gratuitement des pavillons dans les salons et les foires. L'Office a également pris d'autres mesures dont celle de créer des opportunités de vente et d'export au profit de six cents artisans. " Outre l'élaboration d'une stratégie de communication, nous avons mis en place des mécanismes de soutien permettant à ces artisans une meilleure ouverture sur le marché national. Il y aura aussi des foires et des salons qui seront organisés dans les régions afin de cibler la population artisanale de ces zones", a relevé un responsable de l'Office. Des efforts qui, espérons-le, porteront leurs fruits.