Par Taha BELKHODJA De nos jours, on ne peut pas parler d'économie sans parler de finance, un organe essentiel pour le développement durable. Certains parlent de finance islamique, oui dans une démocratie, on doit écouter tous les sons de cloche et la diversité est l'un des principes fondamentaux de la liberté. Comme de la discussion jaillit la lumière, décortiquons la spécificité du système d'octroi de crédit par les banques islamiques en toute objectivité, transparence et respect de la loi. D'abord par hypothèse en se référant au Saint Coran et à ce qu'il est dit dans la sourate Al-Baqarah, précisément les versets 224, 233, 275 et 276 et au Code des obligations et des contrats, les articles 62 et suivants dont l'article 72 qui condamne celui qui ne justifie pas la cause de son enrichissement dans la mesure où il a profité de son fait. Prenons l'exemple de la Banque Zitouna et mettons de côté l'appellation symbolique en arabe (tamouil, mourabaha, moudharaba, etc..). En se référant aux documents établis par ladite banque, nous constatons : 1- Un tableau mentionnant : le TMM + un taux, appelé taux conventionnel, en fonction de la durée du crédit bien entendu! 2- En cas d'acquisition d'un bien immobilier, il y a lieu d'établir un premier contrat entre le vendeur et la Banque, à 100 millions de dinars par exemple, et au même instant un deuxième contrat entre la Banque et le client final, mais attention, à 100 millions + X ?, X étant la marge de profit qui revient à la Banque Zitouna, à quel titre ? Cela reste à définir ! 3- Les 2 contrats doivent être enregistrés dans un écart de temps de 24 heures maximum pour un problème d'imposition fiscale. Soyons clairs messieurs, vous êtes dans le cas d'une double infraction, d'abord avec le Code des obligations et des contrats puisque en un temps aussi cours, ladite Banque revend le bien en réalisant un profit considérable, presque le prix de l'immeuble, dépassant toute règle d'usage de courtage, bien que celle-ci ne soit ni promoteur ni agent immobilier, et là, il s'agit bien d'un enrichissement sans cause manifeste, ce qui est puni par la loi. Si la Banque n'a pas fait de marge " fantoche " alors elle a encaissé un profit, variable en fonction de la durée de remboursement, donc équivaut aux intérêts sur le crédit octroyé, qu'elle l'appelle "Moussa Haj ou Haj Moussa", c'est du pareil au même, puisque " la fin justifie les moyens ", à moins qu'elle donne des crédits gratuitement, à taux zéro, certes la banque sera la plus sollicitée, mais c'est sûr, elle ne fera pas long feu! En se référant aux données hypothétiques, ladite banque est en train de manquer au principe même de ses prétentions : finance islamique puisque l'une des bases fondamentales de l'Islam, c'est l'intention " innama al aamelou binniyette". Il ne suffit pas de se fier aux apparences, soit aux appellations arabes, "l'habit ne fait pas le moine", vous êtes bien en double infraction messieurs ! L'islam appelle la transparence effective dans les opérations financières à effectuer. "Ô croyants ! Quand vous contractez une dette à échéance déterminée, mettez-la en écrit" (sourate Al-Baqarah, verset 282). A part les actes de vente à crédit, le produit "Moudharaba" de la Banque Zitouna accorde une rémunération qui stipule le partage des résultats entre le client en tant que bailleur de fonds (rab el mal, je déplore d'ailleurs cette appellation, il est plus correct de dire : sahib el mal, tout l'argent appartient à Dieu) et la Banque en tant que gestionnaire " Moudhareb " selon les proportions convenues (qui veut insinuer taux d'intérêt), voyons donc, ce n'est rien d'autre que le bon du Trésor, produit des banques conventionnelles ! Messieurs, soyons honnêtes avec nous-mêmes "Allah est Audient et Omniscient", "Craignez Allah, et sachez qu'Allah observe ce que vous faites "(versets 224 et 233 de la sourate Al-Baqarah). Nous n'allons pas réinventer la roue, Dieu a tout prévu, la solution est très simple en se référant à la sourate Al-Baqarah et spécialement les versets 275 "Ceux qui mangent de l'intérêt usuraire …alors Allah a rendu licite le commerce et illicite l'intérêt… ", et 276 "Allah anéantit l'intérêt usuraire et fait fructifier les aumônes" et là, il s'agit d'intérêt usuraire perçu au dessus du taux d'usage, un abus qui va user l'emprunteur. Messieurs, sachant que l'apport du Saint Coran et le développement exceptionnel enregistré en seulement 23 ans de descente, il est clair le Bon Dieu fait allusion aux individus qui, au lieu d'aider les nécessiteux, au contraire profitent de la situation en prêtant de l'argent contre rémunération qui nuit considérablement à leur situation et les affaiblit. Aujourd'hui, 15 siècles après la révélation du Saint Coran, la situation n'est plus la même, les Banques sont le maillon fort de l'économie dans la société moderne, elles vendent des services et des droits incorporels qui figurent bien dans le commerce. Toutes les banques sont commerciales de par leur forme juridique et leur objet, elles sont soumises aux lois et usages en matière commerciale, article 7 du Code des sociétés commerciales y compris la Banque Zitouna. Les services rendus justifient bien la légitimité du profit dont bénéficient ces banques, on n'a pas besoin de faire des acrobaties ni passer par quatre chemins pour le prouver, ceci est clair et net, comme c'est dit à la sourate At-Tawbah verset 119 " Ô vous qui croyez ! Craignez Allah et soyez avec les véridiques ". On dit qu'il existe un comité Charia qui a approuvé la conformité des produits de financement aux principes et valeurs de la Charia. Je voudrais bien que ce comité Charia réponde à cette question : est-ce " hallal " qu'une personne prête de l'argent à quelqu'un, mille dinars pour acheter un vélomoteur par exemple, en se référant à la transaction commerciale mourabaha, appliquant le principe d'acquisition et de vente à mille cinq cents dinars à rembourser après une année ? Je pense que c'est non, c'est du riba à défaut de qualité commerciale de ladite personne. Toutes les banques tunisiennes méritent donc bien leur marge bénéficiaire, il s'agit d'un commerce conforme aux valeurs islamiques et si le mot " intérêt " gêne, on peut l'appeler profit comme la Banque Zitouna, c'est une question de principe. Une banque loue de l'argent autant qu'une agence de location de voiture ou location immobilière, la banque vend un service, il faut bien qu'une structure organisée le fasse, " la nature a horreur du vide " et tout service doit être rémunéré, il faut bien qu'elle paie ses employés et fasse des bénéfices ! Nous avons tous intérêt à se conformer à la volonté de Dieu en toute transparence et sincérité et de rejeter l'hypocrisie et tout type de symbolisme et de communautarisme. Je saisie cette occasion pour inviter toutes les banques tunisiennes et l'association Professionnelle des banques (APB) à traduire mot à mot, littéralement en français " nisbet el feïda " qui est marge de profit et non pas taux d'intérêt, l'intérêt c'est " el maslha ". Ainsi on aurait fini une fois pour toutes avec le mot " intérêt " qui porte préjudice à certains, et que les banques, en tant qu'acteurs économiques indispensable, n'auront plus besoin de faire usage ni d'acrobatie ni de détournement de procédure. Tout citoyen tunisien peut ainsi traiter en toute tranquillité avec toutes les banques de la place dont l'objet est exclusivement commercial, soit la vente de produits financiers indépendamment de toute confession religieuse en respectant même les spécificités islamiques. Les banques ne prêtent de l'argent qu'après avoir été rassurées de la rentabilité du projet et que la charge de remboursement ne doit pas nuire à la situation matérielle du postulant. Les banques islamiques n'ont pas connu un développement notable en Tunisie parce que le Tunisien a beaucoup évolué, c'est un investisseur suffisamment intelligent et assez raisonnable optant pour des solutions et procédures claires et nettes.