On voyait cela venir tellement on évoquait l'hypothèse depuis deux mois avec de plus en plus d'insistance : s'il y aura accession d'une division à une autre, en revanche, toutes les relégations ont été annulées sur décision du bureau fédéral réuni avant-hier. A titre exceptionnel pour cette saison. «Démagogique et populiste», a écrit sur ces mêmes colonnes notre collègue Sami Akrimi. En fait, cette mesure ne pouvait pas plus mal tomber par rapport à la course au titre qui devient complètement faussée, du fait de l'attitude et du degré de motivation des clubs du bas de tableau. Non point que le leader n'eut point réussi à s'imposer à La Marsa sans l'annonce de cette mesure la veille d'une journée décisive, mais il faut admettre que beaucoup de choses ont changé depuis. Tout le monde s'accorde d'ailleurs à dire que la FTF aurait pu attendre la fin de l'exercice pour prendre une mesure aussi grave qui bloque le processus de la relégation. Dans l'absolu, c'est l'Etoile Sportive du Sahel qui se révèle le grand perdant. Pourtant, le réalisme — que l'on peut condamner à l'envi — voudrait aux yeux de certains que le maintien sur un plateau, d'un simple trait bureaucratique, agisse sur la compétition tel un baume jeté au cœur des clubs «blessés» : le peloton des menacés par la relégation lesquels depuis l'affaire du match O‑Béja-ASMarsa n'ont pas cessé de remuer ciel et terre, chacun faisant valoir son bon droit. Le jugement rendu coup sur coup par la Ligue professionnelle, puis par la commission d'appel dans l'affaire ASGabès-ESZarzis a envenimé un peu plus l'atmosphère, un enchevêtrement des intérêts d'un quintette de clubs sous la menace de la descente produisant des réactions en chaîne : sit in, manifestations de protestation, menaces à l'encontre de ses propres favoris, empêchés d'effectuer un déplacement… On aura tout vu! La politique de l'autruche Il aurait pourtant fallu anticiper : le flair propre aux hommes de décision chevronnés aurait dû inviter l'équipe de Anouar Haddad à arrêter dès le départ les frais. Car les prémices de cette exacerbation des passions et les stigmates de cette montée des périls étaient là. Les instances, qui ne sont guère dupes, mais plutôt suffisamment renseignées sur le sujet, ont préféré fermer les yeux. Et l'on sait qu'il n'y a pas pire que la politique de l'autruche dans pareilles situations. Bref, dans le concert assourdissant des manifestations de joie naturellement produites auprès de clubs qui reviennent de loin, comme ont dit, sauvés par le gong après avoir vécu toute une saison au bord de la rupture, les protestations de l'ESS ressemblent aujourd'hui à une fausse note. Mais cette fausse note vient rappeler que le premier championnat de l'après-révolution a, d'une certaine façon, été faussé et sacrifié sur l'autel de la fameuse raison d'Etat.