La nouvelle édition estivale du festival de Hammamet a été inaugurée, mercredi dernier, avec la pièce théâtrale Taht borj addaynasour (Sous la tour du dinosaure) en présence d'un public jeune, venu à la découverte de la pièce écrite et mise en scène par Abdelwahab Jomli. Jouée par deux personnages protagonistes «Jaâfar» interprété par le comédien Taoufik El Ayeb et «Youssef» par Abdelmonôm Chouayet, la pièce, en deux actes, raconte l'histoire de deux malvoyants qui, obligés de partager une chambre dans un établissement pour handicapés, entrent dans un conflit éternel, né de la différence de mode de vie de chacun d'entre eux. Incapable de s'adapter à cette situation, «Youssef», d'une personnalité fragile et introvertie, décide de rompre le silence et cherche à entrer dans un dialogue avec le deuxième personnage, un vieil homme également aveugle, mais doté d'une personnalité imposante. Se révéler à travers l'autre Au cours d'une nuit, dans un décor dépouillé qui se résume à deux chaises, les deux acteurs se livrent à un jeu d'imagination. Usant d'un langage recherché comme instrument de communication, ils profitent de leur handicap pour se construire une image de soi totalement déformée, jusqu'à ce que chacun d'entre eux finisse par devenir le miroir de l'autre, reflétant sa vraie personnalité. Par leur présence scénique évidente, soutenue par une lumière qui allie le clair à l'obscur, fort appropriéé à la thématique abordée, les deux acteurs Chouayet et El Ayeb ont réussi à révéler les tréfonds de l'homme, ses faiblesses, son hypocrisie et cette opposition entre l'être et le paraître. Dans une mise en scène et un travail chorégraphique bien maîtrisés, dynamiques et vivants, le jeu se mêle à la danse pour dégager des sensations multiples, dont une profonde tristesse, chez le spectateur. Une nouvelle conception du théâtre? Le texte de la pièce Taht borj addaynasour se dérobe à toute classification de genre théâtral. Certes, il tend plutôt vers le dramatique, mais il peut être interprété comme une étude sociolinguistique qui traite la problématique du langage et de ses fonctions. Le langage y est, en réalité, considéré comme un moyen qui nous permet de reconnaître l'autre et de l'identifier. Dans la pièce, il devient un moyen de simulation, de mensonge, de rupture et de non-communication.