Par Fethi Frini* L'attentat meurtrier de Marrakech, pas très loin de nous,perpétré par El Quaida du Maghreb, ajouté aux tragiques évènements vécus du côté de Siliana le 18/05/2011 qui lui est encore attribué, et bien d'autres évènements tragiques vécus, interpellant l'opinion publique un peu partout, continuent de susciter les commentaires et les réactions quant au devenir du tourisme à court et à moyen termes, au risque d'hypothéquer la haute saison touristique qui bat déjà de l'aile? La Tunisie, le Maroc mais aussi l'Egypte se trouvent, en effet, parmi les pays les plus touchés. On en connaît les conséquences fâcheuses sur tous les plans, qui en découlent pour ces pays d'accueil dans leur tentative, quelque peu désespérée, dans ces moments décisifs, pour parer au plus pressé et redresser, un tant soit peu, une situation économique et sociale fort détériorée. Pour demeurer logique avec soi-même Les décideurs, au niveau des pays européens, principaux pourvoyeurs de touristes, auraient évoqué, juste au lendemain de notre Révolution, et à maintes occasions, la nécessité de stabiliser si ce n'est de soutenir notre économie, en dopant, entre autres, le secteur touristique, un secteur éminemment stratégique. Et, pour demeurer logique avec eux-mêmes, nos partenaires européens ne devraient, en aucune manière susciter encore des doutes infondés sur la stabilité de notre pays, et torpiller, pour ainsi dire, un secteur clé de notre économie, en passe de devenir presque aussi important que le peu de pétrole que nous exportons. Une réflexion à chaud Une question lancinante sinon insidieuse, que l'on continue de se poser pour le moment : que va devenir la Tunisie sans les revenus de notre or bleu, avec quelques six millions de touristes par an, drainant pas moins de trois milliards de dinars, bon an mal an, une manne céleste mais bien substantielle et qui pèserait lourd dans notre balance économique ? Quelle en serait surtout l'alternative, au cas où l'on viendrait, peut-être bien, à remettre en cause choix certains stratégiques ? Et comment enfin, serait vécue la reconversion de ce secteur, certainement bien douloureuse sur le plan social, du moins pisque celui-ci occupe, d'une manière directe et indirecte, quelque 700.000 personnes ? Voilà le genre de réflexion à chaud qui revient comme un leitmotiv au vu de la situation bien préoccupante vécue ces derniers temps par notre pays. Nous sommes pour ainsi dire passés de l'expectative à la stupeur. Nous avons engagé par le biais de notre Office de tourisme une campagne de promotion prometteuse certes mais fort coûteuse sur l'Europe, notre terrain de chasse traditionnel, pour ameuter ou pour ramener sinon pour rabattre du gibier. Nous avons certes suffisament de liens avec la France mais aussi avec l'Allemagne ou l'Italie. pour ne pas être systématiquement lâchés à l'orée ou alors au beau milieu de la saison qui nous intéresse directement. Du baume au cœur En se fondant sur les déclarations rassurantes auprès des hautes autorités ou bien des parties influentes européennes, tant les responsables politiques tunisiens que les opérateurs du secteur, espèrent bien, pour les prochains jours, sinon les prochains mois qu'un traitement particulier nous serait réservé, pour booster davantage le flux touristique vers notre pays, pour nous tirer de l'embarras dans lequel nous sommes empêtrés. Du fait même de la défection de notre clientèle traditionnelle, nullement alléchée par des prix au rabais affichés, défiant pourtant toute concurrence, en temps normal. Et, si l'on excepte l'afflux massif de nos frères libyens dans nos murs, pour des raisons évidentes, à opposer d'ailleurs au peu d'empressement manifesté jusqu'à présent, par nos frères Algériens, d'habitude fort nombreux à séjourner parmi nous, en pareille saison estivale. Certains mêmes pensaient déjà que, pour les besoins de la cause, Révolution oblige, notre pays serait assimilé ou traité en tant que nation la plus favorisée vis-à-vis de la zone de l'euro; laquelle éventualité a été certes évoquée, au tout début de notre révolution, de la part des gouvernements occidentaux qui auraient applaudi à l'émergence d'un élan révolutionnaire, et, peut-être bien, à leurs yeux éminemment démocratique, dans notre jeune pays, manifestant la volonté pour soutenir notre pays. Or, on se refuse à confirmer ou du moins à réitérer une telle profession de foi qui n'aurait que des conséquences salvatrices sur les relations économiques, voire politiques, en somme, sur le solide partenariat, qui nous lie pourtant à l'Europe. Laquelle, d'ailleurs, une fois le premier moment de consternation et de stupeur passé, les professionnels du secteur ont commencé à revoir leurs comptes à la baisse: quelque 400 MD de pertes sèches pour les quatre premiers mois pour la Tunisie. Et des hôtels à moitié vides. Ou plutôt, à moitié pleins, pour faire preuve d'un optimisme de bon aloi. Il en faut bien, non. Tout faire pour se tirer d'affaire En fait, les conséquences les plus néfastes d'une saison touristique, bien au creux de la vague, apparaîtront sans doute une fois que les décomptes seraient faits, et les bilans dressés. Les professionnels du tourisme savent pertinemment qu'il ne faut jamais perdre un client, même si on y va à perte, le temps d'une ou deux saisons, sinon il risque de ne plus revenir. Il fallait faire avec. Certes, un mauvais pli a été pris avec le recours abusif au fameux «all inclusive», à la braderie des prix, au surbooking, à la concurrence déloyale… pour un prix inconséquent et aux dépens de la qualité de service, devons-nous conclure désabusés. Mais, nullement décontenancés, nos professionnels du tourisme, il semblerait qu'ils naient guère maille à partir avec la crise qu'ils estiment d'ailleurs passagère. Ils compteraient volontiers tout faire encore pour se tirer d'affaire, pour récupérer le maximum de touristes un peu partout, ici et ailleurs, du côté de nos frères arabes et nos coreligionnaires musulmans… Et, tenter encore et toujours, de les attirer et surtout de les retenir, à titre d'appoint, certes mais réussir, par la suite, à les fidéliser à notre nouvelle enseigne, à savoir la Révolution du Jasmin, et, peut-être bien, à les fédérer à notre grand élan révolutionnaire…