S'il y a un mois où les Tunisiens se détournent du charme du crépuscule et appréhendent plutôt ce moment merveilleux d'un regard gastro-boulimique, c'est bien le mois de Ramadan. Six mois après la révolution et à l'approche d'une échéance politique historique que sont les élections de l'Assemblée constituante, les Tunisiens s'apprêtent à accueillir dans quelques jours le mois saint, cette fête perpétuant des coutumes qui n'ont jamais cessé d'être vivantes. Rites immémoriaux transmis de génération en génération, qui rappellent l'enfance et entretiennent la nostalgie d'autrefois. Etant le rendez-vous d'une consommation éclectique et une aubaine pour les amateurs de bonne chère, le mois de Ramadan connaîtra cependant une dynamique particulière, marquée par la pénurie de l'eau minérale et de quelques produits de base, observée ces derniers jours, sans compter les augmentations nettes des prix de certains produits. Une dynamique où toutes les ruses commerciales sont permises, avec l'absence notoire des opérations de contrôle économique. Pour certaines familles, Ramadan ne se chiffre pas. C'est pourquoi ces familles s'inquiètent depuis quelque temps de l'approvisionnement du marché en produits de consommation courante (lait et dérivés, œufs, huile, viande, poissons….) et des stocks de régulation. Néanmoins, le consommateur est appelé plus que jamais à faire preuve de modération et de rationalité. Ce comportement est d'autant plus requis que le recours abusif au stockage de certains produits alimentaires ou à leur surconsommation, tout en grevant le budget du ménages, n'obéit à aucune raison valable. Les préparatifs engagés depuis quelques semaines afin d'assurer un approvisionnement normal et régulier du marché, à travers la constitution de stocks régulateurs, sont une garantie pour le consommateur au cours du mois saint. Pour ces quelques jours qui nous séparent du mois de l'abstinence et des «nourritures» spirituelles, de la convivialité et de la chaleur humaine, les structures concernées ont tout mis en œuvre pour assurer un approvisionnement des marchés en différents produits et parer ainsi à toutes les insuffisances. Aussi, une planification a été réalisée, selon le ministère en charge du Commerce, afin que tous les produits de base, tels que les légumes, les viandes, le lait, les fruits, les œufs… soient fournis en quantités suffisantes et à des prix étudiés. C'est dire qu'au mois de Ramadan, tous les excès sont permis. Pour cause de jeûne, les prix à la consommation courante augmentent du jour au lendemain, enfreignant toute mesure ainsi que les contrôles destinés à préserver le droit des consommateurs. A titre d'exemple, les prix de la viande augmentent et changent à la tête du client, surtout pour ceux qui, soi-disant, sont mieux servis que les autres, du point de vue de la qualité. Les marchés municipaux et ceux des quartiers sont assaillis dès le matin pour devenir inabordables et inaccessibles. C'est la fringale ; on achète pour acheter. On achète aussi parce qu'on croit pouvoir tout manger, le soir venu. Même la mauvaise humeur des marchands et leurs propos acerbes ne viennent pas à bout de la détermination des consommateurs, transformés à l'occasion en «rafleurs» de tout ce qui se met sous la dent. Le ventre a peut-être ses raisons que la raison ne connaît pas mais, pour savoir raison garder, il ne faut jamais oublier que la panse est commandée par le cerveau, siège de la raison.