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Les chevaliers de l'incohérence
Haro sur la Haute Instance
Publié dans La Presse de Tunisie le 07 - 08 - 2011


Par Khalil ZAMITI
Le feu couvait, depuis longtemps, sous l'ample ressentiment. Après l'implosion, spontanée, de la révolution, le bouillon d'opinions favorise l'embrouillamini des formulations où le parleur- né, enfin déchaîné, au sens premier, insinue, accuse, nie, récuse, prêche, à titre double, pêche en eau trouble disqualifie, juge, propose, avertit, conseille, disqualifie, redit, contredit et prédit, l'imprévisible, tout comme si tout fut devenu permis, une fois plus ou moins dissout l'interdit choyé par l'implacable tyrannie de l'invincible Ben Ali. A juste titre, le démuselé, stupéfait à l'image du nouveau-né, subvertit le principe catégorique de l'antique espace médiatique où seuls bougent les bougres à écharpe rouge. Mais aujourd'hui, les tentatives d'élucidation peinent à clarifier une complexité où l'ombre meurtrière des saboteurs et des pilleurs plane sur l'irrésistible ascension des lumières si chères à Voltaire.
Mère de toutes les confusions, la profusion d'énonciations mène, parfois, aux abords de la déraison. L'un fustige la Haute Instance et l'autre exige d'elle, une plus grande prégnance, à l'instant même où un troisième larron prône sa liquidation, dès maintenant.
Ce dernier, bien qualifié, à déjà concocté une Constitution. Dès lors, à quoi servent les répétitions ? Le groupe mandaté serait donc bien inspiré de ravaler son programme d'activité. Dans cette compétition, la référence au vide postrévolutionnaire justifierait, à la fois, une légitimation et une délégitimation de l'autorité instituée. Si les franges élargies de la population, plus averties depuis la révolution, ne subodoraient le métalangage de ce bavardage sans rivage, l'incorporation, naïve, de pareils signaux paradoxaux livreraient un billet pour le vertige de la haute voltige, de la folie ou de l'échafaud.
Un relent d'ambivalence
De nos jours, la barrière dressée entre les sensés savoirs et les moins alphabétisés a presque perdu son étanchéité. Vu l'effectif estudiantin et scolarisé, chaque famille reçoit les informations jadis monopolisées par une minorité. Qui sur l'agora universitaire, ignore le vieux conflit surgi entre le campus et l'Ariana où les deux coqs, opposés, chantent le droit ? Dès lors, ces boulets rouges, tirés, sans modération, sur la Haute Instance exhalent un relent d'ambivalence. La panoplie des malfaçons nourrit la suspicion et la désillusion déroule un tapis rouge pour l'abstention.
Ajoutée à la rémanence, psychique, des élections truquées, la gabegie écrite et parlée dissuade l'envie d'aller voter. Mais après la débâcle du clan abhorré, bouder cette occasion inespérée convie à égorger le devoir de civilité.
Les pourfendeurs, systématiques, de la Haute Instance et du gouvernement déploient une série d'objections. L'un de ces réquisitoires plaint une Tunisie vouée, ad vitam, au pire trou noir. L'auteur clame son opposition "à la démarche du pouvoir, celles de ses agents et de ses acolytes dans la classe politique, une démarche qui est de nature à compromettre l'avènement de l'Etat de droit et du régime démocratique, à cours et à long terme" Où est le sens de la nuance ? Même pour un borgne, c'est là bien vite aller en besogne. Après un long voyage au royaume du silence l'homme, resurgi, plaque les qualificatifs appropriés à l'univers de Ben Ali.
Béji Caïd Essbsi et Yadh Ben Achour seraient, sans doute, ravis de connaître leurs sbires, "agents" et "acolytes".
Même au cœur de sa fureur, ce militant à l'authentique valeur serait bien inspiré de remettre sa pendule à l'heure où il est question, pour certains, de réclamer un pouvoir dépourvu de pouvoir.
De là provient l'ambiguïté quand l'un dit : "Si el Beji, sévissez", à l'instant même où l'autre demande à Yadh, aux abois, de croiser les bras. Pour une légitimité postrévolutionnaire, il aurait donc fallu un troisième sauveur à la poigne de fer, A ce compte, le général Sériati aurait fait l'affaire. Dans la même veine, le cheikh-avocat dit, quant à lui : "A cette commission qui est en train de légiférer, de tracer l'avenir du pays, j'aimerais dire : qui représentez-vous ? Nous sommes devant quelques 170 personnes qui ont été nommées par un président provisoire et qui n'ont aucune légitimité populaire". Ce remake, déjà paru, tel quel, dans la revue où le tribun déploit ses vues suggère une appréciation subsidiaire.
Certes, partager les mêmes idées, avec les nostalgiques du récent passé, pourrait ne pas émarger au registre du péché. Mais dans quelle mesure le message politique aurait-il partie liée avec une ligne tracée par le support médiatique ? Lors des préludes à l'interview, la petite palabre ne laisse pas de marbre.
La critique rôde autour d'une incontournable problématique. Durable ou éphémère, le pouvoir dépend, au premier chef, de ses pratiques.
L'éternité n'a jamais rien prouvé là où le provisoire, seul, est vrai. Eu égard au surplomb des intérêts maquillés, le droit sombre dans le carcan de la rigidité cadavérique sans la revivification des codifications par une philosophie juridique, liée à la situation.
La manière temporaire des responsables ne suffit guère à la récusation de leur action. Gestes et paroles relèvent du perfectible, mais les pharisiens paraissent enclins à tout fourrer dans le sac des fusibles. Une jeunesse brave les balles des mafieux et des messieurs, qu'on nomme grands, tirent les marrons du feu. Libérée depuis le 14 janvier, l'expression illumine la cité, mais parmi les persifleurs, maints surfeurs sur la grosse vague, le plus souvent divaguent. Sous le couvert de la notoriété, de la franchise et du courage, les malfaiteurs objectifs cherchent à couler un frêle esquif.
Le plus célèbre théoricien de la révolution et critique de la religion écrivait : "Les philosophes n'ont fait qu'interpréter le monde de différentes manières; mais il s'agit de le transformer". Les amis de Mourou l'ont bien compris.
C'est l'homme qui fait la Constitution
Aujourd'hui l'aide allouée par les religieux, à la population déshéritée, fût-elle symbolique, procure un avantage politique. Mêlée à bien d'autres, cette pratique occupe l'espace public et réduit les constitutionnalistes fameux à presque jouer hors jeu. Pour les tenants du régime théocratique, tout le mal vient de l'option laïque. L'émancipation, c'est la dépravation. Dans ce rapport de force, déclaré ou masqué en termes d'islam éclairé, il n'y aura pas de laïcité instituée, sans l'abrogation de l'actuel article premier. Par -elà mille et une contorsions, déployées autour de la charia, la conciliation de la chèvre avec le chou ne surgira d'aucune élucubration. A cet égard, celui du chemin ambigu, Moncef Marzouki, militant au-dessus de tout soupçon, navigue à vue, sur une voie sans issue. A l'heure où les démocrates paraissent trainer les savates et engager la bataille en rangs dispersés, avec leurs constitutions, somme toute banales et tout, sauf originales, une observation des luttes menées sur le terrain dirige l'investigation vers une ultime conclusion : armé de son intime conviction, c'est l'homme qui fait la constitution et non la constitution qui fait l'homme; quand bien même un va-et-vient perpétuel ne cesse de relier le code au codifié. Face à l'emprise, ramadanesque, de la propagande politico-sacerdotale, et au projet de la juguler, voilà pourquoi des bénalistes embusqués renouent avec le plantasme du gourou, plus ou moins fou, mais encore debout. Dans une Constitution, la notion de " loi fondamentale" connote le pouvoir fondateur des pouvoirs. L'homme religieux l'appelle "Dieu", puissance indépassée par aucune autre. L'être suprême n'est pas un grand, parmi les grands, il est le plus grand; "allahou akbar". Au plan constitutionnel, ce plus petit commun dénominateur du profane et du sacré agrège la série des variations possibles autour du système théocratique, d'une part, et du régime démocratique, ou laïque, de l'autre. Ces deux frères ennemis sont fort bien à l'échelle universelle. Dans ces conditions, plus proches des enjeux et des luttes égyptiennes ou tunisiennes, réclamer cent constitutions là où pullulent cent partis politiques c'est prendre les citoyens pour des bourriques.
Stigmatiser, à la fois, le gouvernement provisoire, la Hatue Instance et l'ensemble des partis, coupables d'incurie, donne à voir les enfants du bon dieu pour des abrutis. Homme providentiel, et presque tombé du ciel, me voici, donc, venu colmater l'horrible vacuité.
Mais hélas, après le vieux destour, Bourguiba, le néodestour et mille débats, Zorro est arrivé, déjà, depuis bien des jours. La folie des grandeurs n'épargne guère les hommes de valeur, même à l'heure où plus rien ne parvient à sabrer la déferlante populaire et à l'empêcher de larguer, dans la poubelle de l'histoire, les verrouillages introduits, a priori, par l'expert engagé, en guise de mercenaire à tout faire. Hédi Baccouche excelle dans cet art de plaire aux grands seigneurs de la terre.
Partout, l'opposition, explicite et latente, n'a jamais cessé de tourner en dérision les fameuses révisions de la Constitution. L'expression "tankih eddastour" emblématise la prise de conscience générale et son inscription au fronton de l'humour. La Tunisie des réformistes n'a guère attendu. Don Quichotte pour, enfin, enfiler ses bottes. Assimiler un monde social, tout entier debout, à l'ignorance de la chose constitutionnelle révèle une drôle de logique d'arrogance, ou de cécité personnelle. En outre, élever un mur des lamentations, aussi décisif, entre la "société civile" et les partis politiques indique une méconnaissance, théorique, des classiques au premier rang desquels figurent Kant, puis Hegel. A l'évidence, le doyen commence à perdre ses moyens.
La société civile, "médiation du particulier par l'universel", selon Hegel, donna lieu à maintes représentations floues, approximatives et superficielles. Car la morale et la sociologie de la morale n'évoluent pas dans la même rubrique.
La société civile, ensemble de normes éthiques, juridiques et politiques associées au contrat protecteur de la propriété baigne dans un océan de subjectivité.
Exclure les partis de la nébuleuse mystérieuse, dont nul chercheur ne sait où elle commence et où elle finit, conduit l'auteur, monté sur ses grands chevaux, à conclure son brûlot par le maquillage de ce diktat‑: la société civile, c'est moi. Au nom de la contribution à la révolution, par la préparation de la nouvelle Constitution, ainsi sévit l'adieu aux armes de la modestie. Mais vue la compétence remarquable, cet égocentrisme, bancal, sert, néanmoins, l'intérêt général ; toujours selon Hégel. Enfin, dans tous les cas de figure, le débat est sans concession ou il n'est pas. Seul un esprit retors se donne, toujours, à voir pour l'unique, l'irremplaçable et le plus fort. De là fuse pour tous, la grande leçon de la mort.
A l'évidence, le prestigieux doyen commence, peut-être, à perdre quelques uns de ses fabuleux moyens. Sommes-nous tous de petits pharaons, à l'orée des élections ?


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